La juriste Me Fatima Benbraham est revenue, hier, sur le dossier du colonialisme, précisément dans son aspect lié aux condamnations à mort, exécutées en violation des textes régissant l'acte. Intervenant au forum du quotidien El Moudjahid, Me Benbraham affirme que le dossier est lourd et compliqué compte tenu du statut « variable » des condamnés mais aussi de l'accès verrouillé aux archives. Au début de la révolution, les autorités coloniales désignaient, fera savoir la conférencière, les combattants comme des hors-la-loi ou terroristes pour mettre en œuvre un texte de loi « secret » relatif à la condamnation à mort par guillotine de tout « fellaga », dont la première a exécutée, le 19 juin 1956, à l'encontre de Ahmed Zabana. La date choisie n'est pas fortuite pour la juriste puisqu'elle symbolise, dit-elle, la naissance d'un mouvement populaire de résistance en Algérie le 19 juin 1930. « C'est une manière pour les autorités coloniales de mépriser les combattants en cette date précise ».En cette période de la révolution, les colons ont doublé de leur férocité à l'égard des moudjahidine notamment après le monopole de tous les pouvoirs par l'autorité militaire. En 1958, poursuit l'oratrice, il y a eu changement dans l'appellation des fellagas pour devenir combattants. Conséquence : les condamnations à mort s'exécutaient par fusillade et non par la guillotine. Mais avant le passage à la guillotine, les condamnés étaient livrés à des tortures morales. Dans le même aspect conceptuel, elle fera remarquer que la reconnaissance, par la France en 1999, de la guerre d'Algérie, était dans l'objectif de fuir le texte de loi, adopté une année auparavant (1998) pénalisant les crimes contre l'humanité. « Il n'y a pas eu de guerre en Algérie, il y avait une révolution populaire d'un peuple en quête de sa liberté et son indépendance. La guerre est entre deux forces, ce qui n'est pas le cas en Algérie ». Sur la lancée, elle affirme que le projet visant la criminalisation du colonialisme reste de mise. Présents au forum, des rescapés de la guillotine ont livré des témoignages vivants de ce qu'ils ont vécu. Le moudjahid Arbadji Mahmoud, condamné à mort, affirme avoir assisté à l'exécution de 39 de ses frères de combat, dont certains ne dépassaient pas 20 ans, à l'image de Rahal Boualem, né en 1937, guillotiné en 1956. Des membres de famille de ces héros ont été honorés par El Moudjahid ainsi que par l'association Machaâl Chahid, coorganisatrice de la rencontre.