Telle a été la « Mecque des révolutionnaires », fondamentalement éprise des idéaux de solidarité avec les peuples en lutte pour la libération nationale et faisant éclater la vérité toute simple de l'indépendance algérienne considérée comme incomplète sans la libération de la Palestine. Réminiscences ? Telle a été aussi et surtout, la belle et rebelle Algérie du nationalisme économique révolutionnaire pleinement convaincue du formalisme des indépendances politiques sans la récupération totale des richesses nationales et l'émergence d'un « nouvel ordre économique international » plus juste et plus équitable. Vieilles rengaines ? La loi d'airain de la mondialisation-globalisation a imposé les règles de l'uniformisation de la « pensée unique » qui vante la dictature du marché des économies les plus puissantes et imposer le néo-colonialisme dans ses formes légitimantes et ses méthodes les plus abjectes : un « printemps » occidental dans l'enfer arabe essaimant l'Irak démembré et voué à la guerre confessionnelle, la Libye en ruines happée par les fléaux du tribalisme, des particularismes régionaux et des tendances autonomistes, et, last but not least, la Syrie à feu et à sang... Dans son combat en solitaire, l'Algérie historique a réussi l'autre Novembre sorti victorieux de l'épreuve du terrorisme sans foi, ni loi, tapissant le projet jamais démenti de la déstabilisation à grande échelle et du « devoir d'ingérence » hautement proclamé par les nostalgiques de l'Eden perdu encore et encore. C'est que la quintessence de la nouvelle « mission humanitaire » des temps néo-coloniaux, prenant le relais de la « mission civilisatrice » en faillite historique, lance l'assaut contre toutes formes de résistance et se nourrit de la perversion et de la manipulation des valeurs fondamentales des droits de l'Homme et de la démocratie. Le négationnisme se fraie un chemin dans un profond travestissement des réalités historiques universellement admises et le mépris de l'autre, écrasé par la haine inflationniste de la xénophobie et de l'islamophobie. Au summum de cette vision discriminatoire et raciste : le rejet de l'Africain qui n'a pas réussi son entrée dans l'Histoire. La bataille mémorielle qui bannit le « devoir de reconnaissance » pour une réconciliation maîtrisée, comme cela fut le cas entre l'Allemagne et la France, longe la culture de l'amnésie et du révisionnisme institutionnalisé dans la loi scélérate du 23 février 2005 prodiguant l'enseignement des « bienfaits du colonialisme ». La démarche proche de la thérapie de type freudien est l'expression d'un renoncement du passé colonial refoulé dans un ordre inversé : les peuples anciennement colonisés coupables des crimes coloniaux. Tout comme, dans le débat sur le cinquantenaire, la victimisation des harkis et des pieds noirs bat le plein cathodique des médias de l'occultation et de la falsification de la vérité historique. Le siècle de l'expropriation, du pillage, de l'acculturation, de la paupérisation, de la destruction et de la négation absolue des droits humains les plus élémentaires, s'invente les alibis d'un ratage aussi monstrueux pour faire le procès d'une si jeune indépendance. A l'ombre du cinquantenaire algérien, bien loin du nihilisme du globalement négatif, le bilan du développement socio-économique et éducatif a largement tourné la page de l'horreur coloniale dans toutes ses manifestations pour une réappropriation du destin national aux ambitions de l'Algérie libre, stable et en chantiers de la renaissance.