Photo : Riad Par Abdelkrim Ghezali Yacine Gougelin, un moudjahid qui a pris la nationalité algérienne au lendemain de l'indépendance, vit toujours en Algérie et ne regrette pas ses choix. Interrogé sur les 50 ans d'indépendance, Yacine, a répondu : «Je ne suis pas qualifié pour décerner à l'Algérie un ‘‘bilan consolidé'' signé au bout de 50 ans. Je renverse la question : imaginez ce que serait l'Algérie sans l'indépendance ?». En effet, il est pourtant facile d'imaginer ce qu'aurait été l'Algérie sans l'indépendance. Cent trente deux ans d'occupation coloniale, d'oppression féroce, de génocide, d'acculturation, d'ignorance, de maladie, d'arriération, imposés à la majorité écrasante d'un peuple paisible et qui n'aspirait qu'à la paix. Le révisionnisme qu'on perçoit en filigrane de certaines lois de la république française, de certains discours politiques nostalgiques, de certaines thèses d'Histoire, visent à culpabiliser le peuple algérien d'avoir combattu l'occupation coloniale et visent surtout à présenter le bilan des cinquante ans d'indépendance comme un fiasco économique, politique, social et culturel. S'il est normal que les nostalgiques de l'Algérie française regardent aujourd'hui l'Algérie à travers le prisme colonialiste déformant, il est anormal que des Algériens fassent dans le négationnisme et le révisionnisme et déclarent qu'«avant l'indépendance, on était mieux». Il y a lieu de s'interroger sur ces errements et de faire la part des choses. Le colloque international qui s'ouvre aujourd'hui à la Bibliothèque nationale, co-organisé par le Cnrpah et la Tribune, tentera d'éclairer l'opinion publique sur l'«œuvre coloniale» et sur les réalisations et les ratages des cinquante ans de l'Indépendance. À travers une méthodologie universitaire rigoureuse, les intervenants, venus de différents pays d'Afrique, d'Europe, du monde arabe, afin de permettre aux Algériens de se réapproprier le débat sur leur propre histoire et de libérer l'Histoire des pesanteurs colonialistes. L'Histoire n'a certes pas de frontières, mais il appartient à ses faiseurs d'y laisser leurs empreintes et surtout de ne pas permettre à la partie adverse de la raconter à sa manière au risque de coloniser l'Histoire. Pendant trois jours de communications et de débats, l'Histoire des 132 ans d'occupation coloniale et celle des cinquante ans d'indépendance seront sous la loupe de spécialistes dans différentes disciplines universitaires.