A Ouled Fayet, ceux qui empruntent l'ancien chemin qui mène au vieux village colonial assistent à un phénomène nouveau : sur les abords de ce sentier verdoyant, des sacs entiers d'ordures débordent sur la chaussée. Un spectacle désolant, assorti d'odeurs intenables qui obligent les conducteurs à garder les vitres fermées. Des témoins révèlent que ce sont les camions chargés d'acheminer les ordures à la décharge qui déversent sur leur passage leur contenu, ainsi que des particuliers qui y jettent leurs sacs. Il n'y a pas que les résidents de ce village qui vivent cette situation dramatique. Même s'ils en sont fortement touchés. Même les habitants de Baba Hassan, d'El-Achour, de Douera, de Souïdania, de Chéraga souffrent des odeurs nauséabondes dégagées par la décharge publique qui se trouve en amont de la ville d'Ouled Fayet. Cette décharge, qui devrait être fermée « progressivement d'ici à la fin de l'année », comme l'a annoncé récemment le ministre de l'Environnement et de l'Aménagement du territoire, continue d'accumuler des tonnes de déchets. Ces derniers dégagent d'épaisses fumées noires enveloppant les localités les plus proches. Les beaux vergers d'antan sont jonchés de sacs en plastique répandus, çà et là, par le vent. La décharge ressemble à une fourmilière : des dizaines de camions à bennes ou camions tasseurs à ordures y viennent pour déverser des tonnes d'ordures ménagères. Aussi, sur leur passage, génèrent-ils toutes sortes de désagréments (poussière, odeurs et émanations toxiques) qui enlaidissent les plateaux surplombent « Dounya park ». Les populations riveraines subissent les effets de cette pollution et les odeurs nauséabondes qui se dégagent de ces amas de déchets. « Impossible d'ouvrir la fenêtre, surtout lorsqu'il vente », témoigne un propriétaire d'un café à Ouled Fayet et d'ajouter : « Les enfants, les malades et les personnes âgées respirent difficilement et certains font souvent l'objet d'admission aux urgences ». Un commerçant indique que les habitants de ces localités ne croient pas vraiment à la déclaration du ministre concernant le réaménagement de cette décharge en espace vert. Il rappelle qu'une décision de justice avait enjoint, en 2007, la délocalisation de cette décharge, considérée comme un danger pour la sécurité et la santé des habitants d'Ouled Fayet. « Mais rien n'a été fait dans ce sens », a-t-il souligné. Pis, des camionneurs sans scrupules et des particuliers jettent les déchets aux abords des routes menant à la décharge. Sur ces routes, il se passe un phénomène nouveau : des particuliers font le tri des ordures. Ces derniers montent sur les camions à bennes, fouillent dans les détritus pour récupérer le plastique. « Nous préférons prendre le plastique à la source », a indiqué un des « fouilleurs ». Afin de combattre ces pratiques et fermer cette « plaie » dont souffre Ouled Fayet, des associations locales et des comités de quartier organisent des rassemblements, rédigent des requêtes et bloquent parfois la route. Par leurs actions, ils veullent attirer l'attention sur la prolifération des maladies respiratoires à cause des rejets de la décharge et réclament l'intervention des pouvoirs publics pour remédier à ce problème de pollution. Une question se pose tout de même : où est passée la police de l'environnement ? Pour rappel, au début des années 2000, l'Algérie avait annoncé un programme ambitieux de gestion des déchets, notamment le Plan national de gestion des déchets solides ménagers (Progdem), où il était question de l'installation d'une centaine de centres d'enfouissement technique, de la réhabilitation des décharges sauvages, et de la mise en place d'incinérateurs, notamment au niveau des hôpitaux. Mais, aujourd'hui, seuls une vingtaine de CET sont exploitables. Quant aux incinérateurs, la majeure partie des hôpitaux n'en disposent pas et déversent ainsi leurs déchets directement dans les décharges.