Il existe à Alger sept belles horloges, certaines datent du 19e siècle, d'autres remontent aux dernières années de l'occupation française. Il y a les trois horloges de Bab El Oued, la sublime horloge florale du jardin Khemisti, celle du Palais consulaire, de la gare d'Alger, de la mosquée Djamaâ Djedid, de la Grande Poste et du Musée des arts modernes d'Alger (Mama). Ce sont aussi les plus célèbres. En revanche, seules trois d'entre elles fonctionnent à ce jour, bien que sujettes à de nombreuses pannes. Souvent, elles retardent aussi. C'est d'ailleurs l'une des principales raisons qui poussent les Algérois à ne plus se fier à l'heure qu'elles marquent. « Qui a besoin de ces horloges aujourd'hui ? On peut savoir l'heure sur nos téléphones portables, nos ordinateurs et même sur nos lecteurs de musique », justifie un jeune citoyen. Dans la rue Larbi Ben M'hidi, Bilel est surpris en train de chercher comment régler l'heure exacte sur sa montre. « Une montre aussi sophistiquée que défaillante », dit-il. Il n'a pas ce reflexe de regarder l'horloge du musée, juste au-dessus de sa tête. Mais peine perdue de toutes les façons, Celle-ci est abandonnée depuis des décennies. Elle ne fait désormais fonction que d'embellissement. Nostalgique, Fethi se souvient du temps où les aiguilles tournaient encore. « Les horloges publiques étaient une référence, elles donnaient l'heure exacte sans jamais une minute de plus ou de moins », déclare-t-il. Il regrette cette époque au vu de la dégradation avancée de ces horloges. « Ce sont des monuments abandonnés. Elles s'en vont comme les bâtisses coloniales et les grands boulevards. » Une question de maintenance Il existe bel et bien un service qui s'occupe de la maintenance des horloges publiques. Ce service appartient à l'Etablissement de réalisation et de maintenance d'Alger (Erma), qui s'occupe essentiellement de l'éclairage public. « Ce n'est qu'à partir des années 90 que l'Erma commence à s'occuper des horloges, alors que ce service a été créé en 1984 », indique le directeur général de l'Erma, M. Boudali. Selon la chargée de communication de l'Erma, Mme Mella, l'établissement prend en charge la fabrication, la vente et l'entretien des horloges publiques de 28 communes de la ville. Des visites d'inspection quotidiennes sont effectuées par le service horlogerie, pour s'assurer du bon fonctionnement de la minuterie qui fait tourner ces appareils. « En règle générale, les pannes légères sont prises en charge sur place ; cela dit, il nous arrive parfois de ramener l'horloge à l'atelier pour définir l'origine du problème », souligne, pour sa part, le chef du service logistique, M. Yasser Lahbib. Il explique : « Nous ne prenons en charge que les horloges dont l'entretien nous a été confié par la wilaya d'Alger. Il a été en revanche ajouté récemment à notre liste, l'entretien de l'horloge de la Grande Poste. Prise en charge financée par le ministère de la Poste et des Technologies de l'information et de la communication ». Le « listing des horloges publiques » de l'Erma compte 38 horloges réparties sur sept circonscriptions administratives entre Bouzaréah et Dar El Beida. Cette liste précise le type de fixation de l'horloge, le nombre de faces qu'elle compte ainsi que la nature de son moteur. Trois horloges anciennes y figurent, les seules qui fonctionnent encore. Ce sont celles de la mosquée Djamaâ Djedid, l'horloge florale du jardin Khemisti et les trois autres de Bab El Oued. Depuis la création du service horlogerie, la maintenance des horloges publiques à l'intérieur de la ville d'Alger est la mission de l'Erma, mais cela coûte à l'établissement beaucoup plus cher que prévu. « Il arrive que l'établissement dépense quatre fois le budget reçu de la wilaya », souligne M. Lahbib. Yazid, l'un des techniciens du service, affirme que c'est de plus en plus difficile de prendre soin de ces anciennes horloges. « L'absence des travaux de rénovation rend l'accès au lieu de plus en plus risqué », affirme-t-il. C'est par un lundi matin que Yazid et ses collègues effectuent une visite routinière à l'horloge de « Djamaâ Djedid ». Sur place, la porte qui donne accès au minaret qui soutient l'horloge est fermée à clef. « Ce n'est plus une surprise pour l'équipe, la personne chargée d'ouvrir est souvent absente », lance le conducteur. L'équipe de Yazid accède à une petite porte au-dessus de la mosquée à l'aide d'une échelle. Encore un risque pour lequel ils optent afin d'accomplir leur mission. Les voilà qui empruntent un escalier grinçant. Il mène à l'horloge. Le passage se fait sombre et étroit. Les murs sont lézardés et l'endroit vétuste. A l'intérieur, une petite cage y a été conçue dans le but d'éloigner les pigeons du moteur et de la boîte de minuterie. « Les pigeons sont un problème réglé, mais les bouteilles en plastique et les vieux tapis qui bloquent le passage sont un vrai obstacle », confie Yazid. La boîte de minuterie, l'alimentation en électricité et les projecteurs qui illuminent l'horloge sont vérifiés en un instant. Très vite, l'équipe rencontre un autre obstacle : des baguettes en bois fixées sur les quatre faces de l'horloge. Il devient impossible de les changer ou de les nettoyer une fois usées par la pollution ou le mauvais temps. « Nous somme contraints de descendre avec des cordes pour repeindre les numéros et nettoyer ou remplacer les aiguilles », affirme le technicien.