Politique et géopolitique, le conflit syrien est aussi confessionnel. Malgré les démentis répétés de l'opposition anti-Al Assad, le rapport de la commission internationale indépendante d'enquête sur la Syrie, présenté, jeudi, au cours d'une session de l'Assemblé générale de l'ONU, confirme les mises en garde de Damas sur les risques d'une exacerbation des tensions ethnico-religieuses alimentées par les combattants islamistes, qui constituent le gros des troupes de la rébellion. Selon les experts, des Arméniens, chrétiens, Druzes, Palestiniens, Kurdes et Turkmènes, ont été déjà emportés par le conflit. Deux jours après la publication dudit rapport, le chef de la brigade Al Ansar (l'une des factions djihadiste de l'opposition armée), Rachid Abou Al Fida, a menacé, samedi, de s'attaquer « immédiatement » aux habitants des localités chrétiennes de Mharda et Al Sqilbiya, dans le centre de la Syrie, si ces derniers n'en délogeaient pas les soldats du régime du président Bachar Al Assad. Forte de 1,8 million de personnes, la communauté chrétienne syrienne est dans l'œil du cyclone islamiste en raison de son « soutien » au régime. Selon le directeur du très controversé Office syrien des droits de l'Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane, ces deux localités comptent « des dizaines de milliers d'habitants », dont une partie s'était déjà réfugiée dans la région côtière de Tartous, de peur de représailles. Le chef de l'Eglise grecque-orthodoxe de Syrie, Youhana Yazigi, patriarche d'Antioche et de tout l'Orient, est monté au créneau, pour sonner le tocsin d'une guerre intercommunautaire, mais aussi et surtout, pour défier les menaces islamistes. « Ce qui arrive aux chrétiens, arrive également aux autres » a-t-il prévenu, réaffirmant que « les chrétiens (resteront) en Syrie ». Accusée de souffler sur le brasier confessionnel, la plus importante faction de l'opposition syrienne, le Conseil national syrien, s'en lave les mains. Il assure « que les divisions en Syrie n'étaient pas d'ordre religieux ou ethnique ». « La seule division dans la société syrienne est celle entre un régime oppressif et sanguinaire (...) et le peuple qui réclame la liberté et l'égalité », estime le CNS non sans regretter le rapport de la commission onusienne. « Il est très triste que l'ONU ait été réduite au rôle d'analyste politique alors qu'elle devrait assumer sa responsabilité et mettre en place une action urgente et décisive », poursuit le communiqué du CNS. Lakhdar Brahimi, entré, hier, en Syrie par la route depuis le Liban, réussira-t-il à sauver le bateau syrien qui chavire ?