Contrairement à son prédécesseur, Kofi Annan, l'émissaire de l'ONU et de la Ligue Arabe, sans renier le « poids » politique du nouveau conglomérat de l'opposition, soutenu par les Occidentaux et des pays arabes, privilégie les acteurs internes de la crise syrienne, dans l'espoir de lancer un dialogue entre l'opposition et le gouvernement. Le diplomate s'est déplacé à Damas avec une nouvelle feuille de route. Le plan aurait été préparé sur la base des décisions prises le 30 juin à Genève par des diplomates de la Russie, des Etats-Unis, de la Chine, des pays européens et arabes. Il suggère la formation un gouvernement de transition, avec de larges prérogatives, comprenant à la fois des représentants du pouvoir et de l'opposition. Ce gouvernement aura pour mission d'organiser des élections législatives et présidentielles après avoir garanti l'engagement du président syrien de quitter le pouvoir en 2014 sans avoir à se présenter à une nouvelle mandature. Au lendemain de ses entretiens avec le président syrien, à qui il a fait part de ses inquiétudes par rapport à l'escalade du conflit, M. Brahimi s'est réuni, hier, avec le chef de l'opposition intérieure, Hassan Abdel Azim, qui dirige le Comité de coordination pour le changement national et démocratique (CCCND), basé en Syrie. Ce comité, d'où sont exclus les Frères musulmans et les salafistes, regroupe des partis « nationalistes arabes », kurdes, socialistes et marxistes. Farouchement opposés à nouvelle coalition basée au Caire, ses animateurs refusent toute intervention militaire étrangère en Syrie. M. Al Azim a indiqué que le diplomate onusien pourrait rester jusqu'à dimanche prochain pour « essayer de mettre en application un consensus international afin de résoudre la crise ». Il devrait, également, tenir d'ici là des réunions avec d'autres représentants des Syriens. Les efforts du médiateur international auprès de l'opposition intérieure ne font pas l'unanimité. Les comités locaux de coordination, proches du Conseil national syrien CNS (qui compose le gros lot de la coalition) ont rejeté, sur la base de « quelques fuites » la solution proposée par Brahimi. « Nous rejetons toute initiative plaçant les Syriens devant l'alternative d'être forcés de choisir entre un compromis injuste ou la continuation des crimes du régime contre eux, leurs propriétés et les bâtiments publics », ont-il fait savoir dans un communiqué. Les animateurs du comité exigent le départ d'« Al Assad et tous les responsables politiques, militaires et sécuritaires ». Ils refusent, aussi, tout plan « qui accorderait l'immunité aux piliers de ce régime », car cela « détruirait les chances d'avoir une réconciliation politique ». Sur le plan diplomatique, les efforts de l'émissaire international ont été « confortés », hier, par le soutien des dirigeants du Conseil de coopération du Golfe (Arabie Saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Oman et Qatar) réunis à Manama (Bahreïn). Ils ont fait part de leur vœu que sa mission « contribuera à forger une entente au sein du Conseil de sécurité » tout en appelant à l'« accélération » de la transition politique. Les monarchies du CCG ont annoncé, aussi, la tenue d'une conférence internationale des donateurs, le 30 janvier prochain au Koweït, pour mobiliser une aide humanitaire au profit des civils syriens. Par ailleurs, les menaces lancées récemment, par des djihadites syriens contre deux villages chrétiens à la veille de Noël, n'ont pas laissé le Vatican insensible. Après l'appel du pape Benoît XVI à la fin de l'effusion de sang, le Saint-Siège se dit hostile à toute intervention militaire qui rappellerait ce qui s'est passé en Irak, en Libye et en Côte-d'Ivoire.