Rebondissement dans la crise politique tunisienne. Le Congrès pour la république, le parti du président tunisien Moncef Marzouki, revient sur sa décision de quitter le gouvernement. Comme Ennahda, il part en guerre contre le Premier ministre, Hamadi Jebali, plus que jamais déterminé à former un gouvernement de technocrates contre la volonté de son parti. Explication officielle de ce revirement : Ennahda aurait répondu à toutes les exigences du CPR, à l'issue d'une réunion tenue dans la soirée d'hier. « Nous avions présenté, il y a deux jours, la démission de nos trois ministres. Comme les dirigeants d'Ennahda qui nous ont contactés ont répondu favorablement à toutes nos demandes, nous avons décidé de geler notre décision de retirer nos ministres du gouvernement. Mais si dans une semaine, nous ne voyons aucun changement, nous quitterons le gouvernement définitivement », déclare, dans un point de presse, Mohamed Abbou, le SG du CPR. Principale demande du CPR, le départ de deux ministres, ceux des Affaires étrangères et de la Justice, que le parti de Rached Ghannouchi refuse de lâcher. Comme Ennahda, le CPR est contre un gouvernement de technocrates. « Cela permettrait le retour des figures de l'ancien régime », affirme Mohamed Abbou qui a qualifié la « veille » l'initiative de M. Jebali d'« historique et de positive étant donné qu'il a dépassé son parti ». « Celui qui veut changer ceux qui gouvernent actuellement ne peut le faire qu'à travers les urnes », avance le « respectueux de la légalité » pour justifier son revirement. Ettakatol, l'autre parti de la coalition, fait cause à part. Il soutient Jebali. Arguant de « l'urgence » de la situation et du « danger de violence », le Premier ministre estime qu'il n'a pas « d'autre choix que de former un gouvernement transitoire, indépendant des partis, avec des priorités : le développement des régions, l'emploi, la lutte contre la cherté de la vie, et, surtout, l'amélioration de la sécurité ». « Je vais demander amicalement à tous les ministres de démissionner. C'est un exercice difficile mais les circonstances l'exigent », dit-il précisant à l'endroit des 89 députés d'Ennahda et des 15 du CPR qu'il n'aura pas besoin de l'accord de 109 des 217 députés de l'Assemblée nationale constituante s'il arrive à créer un gouvernement apolitique. A défaut ? « Je démissionnerai », dit-il, avant d'évoquer les futures élections, dont la date reste incertaine en raison du retard accumulé par l'Assemblée constituante dans la rédaction de la future Constitution du pays. « Plus que jamais, je crois nécessaire d'organiser des élections (législatives) à la mi-juillet, un premier tour pour l'élection présidentielle le 1er septembre, par exemple, et un second tour le 15 septembre », avance-t-il. A Tunis, rue Bourguiba, des centaines de Tunisiens ont bravé, hier, le froid. Ils demandent au gouvernement de démissionner.