Le cinéma Ibn Zeydoun de l'Office Riad El Feth (Oref) a abrité, dimanche dernier, la projection en avant-première du film « L'Héroïne » de Cherif Aggoune. Cette fraîche production de l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (AARC) et la société Cilia Films est une œuvre de mémoire, qui relate les douloureux événements de la décennie noire. A quelques kilomètres d'Alger, Achour exploite une ferme avec ses deux frères Djelloul et Mourad. Mais nous sommes au milieu des années 1990 où des terroristes armés s'en prennent aux villageois et attaquent des fermes isolées. Leur sport favori consiste à racketter ceux qui gagnent de l'argent. Un procédé qu'on accepte au début, mais qui fâche, par la suite. Auparavant, Achour meurt dans un guet-apens tendu aux forces de sécurité. Un drame qui vient endeuiller la famille et plus particulièrement son épouse Houria. Ce deuil familial est le prélude à un massacre de toute la famille lors d'une attaque de la ferme par des terroristes qui voulaient faire taire cette soudaine résistance à leurs méfaits. Houria réussit à s'échapper et à sauver les enfants. Elle est recueillie à Alger par sa famille, mais des conflits surgissent. A commencer par les agissements condamnables de son frère, qui utilise son argent pour faire démarrer une nouvelle entreprise familiale. Ici, l'accent est mis sur cette vision rétrograde que l'on se fait de la femme avec la complicité d'une mère, qui reproduit le schéma dominant de l'homme. Houria qui a, de toute façon, décidé de se prendre en charge, va se mettre à la recherche d'un travail. Ce qu'elle réussit de fort belle manière lorsqu'elle sera embauchée par un photographe, qui lui recommande de capter des images vidéo lors des fêtes familiales. Le choix de la photographie associé à l'image n'est pas fortuit puisque le réalisateur veut entretenir la mémoire. « C'est un choix pour ne pas oublier et impressionner la mémoire », a-t-il déclaré. La fin du film reste ouverte à toutes les supputations, chacun pourra trouver lui-même l'issue des personnages. Le réalisateur affirme, en outre, que ce film n'est pas seulement une thérapie, mais raconte soi et son pays. « On ne peut pas faire du cinéma si on ne prend pas la peine de se regarder », a-t-il souligné. Pour rappel, Cherif Aggoune entame, en 1978, des études en cinéma à l'Ecole supérieure d'études cinématographiques (ESEC) de Paris. En 1981, il retourne à Alger et intègre la télévision en tant que premier assistant réalisateur. En 1990, il réalise le premier film professionnel en langue berbère. Un court métrage de 22 mn en 35 mm couleur sélectionné, l'année suivante, au Festival international du court métrage de Clermont-Ferrand. « L'Héroïne » est son premier long métrage.