L'accoutumance fait d'eux des personnes dangereuses qui sont prêtes à prendre tous les risques pour assouvir le manque. Inconsciemment, ils recourent à la violence. Personne n'est épargné par leur comportement brutal. Cette insécurité contraint, de plus en plus, les pharmaciens de garde à travailler la porte entrebâillée, pour éviter de se faire agresser par des drogués en manque de psychotropes. La terreur gagne, chaque jour un peu plus, les pharmacies de garde. « Les pharmacies sont devenues la cible privilégiée de drogués en tous genres », a indiqué Abed Fayçal, président du Syndicat national algérien des pharmaciens d'officines (SNAPO). « Certains médicaments prescrits seulement sur ordonnance que beaucoup de jeunes utilisent pour se droguer, les affolent à tel point qu'ils n'hésitent pas à agresser les pharmaciens qui refusent de répondre à leur demande », a indiqué un pharmacien de la rue Bab-Azzoun. Ce dernier affirme que la majorité des agressions se déroule généralement pendant la nuit, à une heure tardive et surtout dans la périphérie de la capitale. « Le pharmacien est à la merci de ces jeunes, surtout dans les endroits plus ou moins isolés », a affirmé un autre pharmacien qui a quitté Boufarik, pour s'installer rue Asselah-Hocine dans la capitale. Bras de fer ! Souvent en situation de manque, ces jeunes drogués sont capables de tout, et le pharmacien ne peut qu'abdiquer face aux menaces avec un couteau ou autre arme blanche. C'est pour cette raison que « beaucoup de pharmacies de garde travaillent depuis quelque temps à porte entrouverte pendant la nuit. Les pharmaciens utilisent généralement les rideaux à accordéon et le client est servi de l'extérieur de la boutique », souligne un autre pharmacien de la rue Bab-Azzoun. Pour plus de sécurité, le client fait passer l'ordonnance et la somme d'argent à travers le rideau métallique. « Avant, nous avions un simple rideau mais depuis que nous sommes régulièrement attaqués par des drogués en quête de psychotropes, nous avons installé ce rideau à accordéon et nous assurons la vente par la porte entrebâillée », indique un pharmacien de la place des Martyrs. Pis encore, certains vendeurs en pharmacie ont fait l'objet de menaces, même à l'extérieur des officines. « La dernière fois, je me suis fait agresser, car j'avais refusé de leur servir des antidépresseurs sans prescription médicale », témoigne un pharmacien de Ben Omar à Alger. Eu égard aux proportions alarmantes qu'a atteint ce phénomène, les pharmaciens de la wilaya de Mascara ont organisé, au début du mois en cours, une journée d'étude pour exposer leurs problèmes en présence des corps de sécurité. Les différents intervenants ont résumé la situation : ils sont entre le marteau des drogués et l'enclume des autorités qui les soupçonnent de « complicité » ou de « vente illégale » de médicaments prescrits seulement sur ordonnance. La lutte contre ce fléau, selon le président régional de l'ordre des pharmaciens, est un combat de longue haleine. Selon lui, il faut combattre le mal à la racine. « Tout le monde doit y contribuer. Les parents, les enseignants, la société civile et les forces de sécurité », a-t-il précisé. Interrogé par nos soins, le président du SNAPO indique : « Si les pharmaciens abdiquent, l'autorité peut les soupçonner de complicité ou de vente illégale de médicaments prescrits seulement sur ordonnance. » Pour lui, il devrait y avoir des patrouilles nocturnes du côté des pharmacies de garde, dans un premier temps, afin de venir à bout de ce phénomène qui prend de l'ampleur. Il affirme qu'une vingtaine d'agressions ont été enregistrées en 5 ans. A Batna, il y a eu même un décès, selon lui.