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« Nous sommes engagés pour l'éradication des réseaux criminels actifs et dormants » Abdelkader Kara Bouhadba* directeur de la police judiciaire de la DGSN
Le trafic de stupéfiants connaît, ces deux dernières années, une progression constante. Quelle est votre analyse ? Durant les années 2011 et 2012, il a été constaté par nos services spécialisés, une circulation significative de drogue, dont le cannabis. Selon les statistiques, il est constaté le trafic d'importantes quantités de cannabis, plus particulièrement dans les régions du centre et de l'ouest du pays. Nous avons saisi plus de 56 tonnes de résine de cannabis et arrêté 9.400 personnes, dont des étrangers, entre usagers et dealers. Le trafic de drogues synthétiques est également en hausse... En ce qui concerne ce type de drogues, la sûreté nationale a saisi ,en 2012, 267.228 comprimés et interpellé 2.271 individus, ce qui est en nette augmentation par rapport à 2011 où nous avons saisi 160.885 comprimés, soit une hausse de 24,83%. S'agissant des opiacés et de la cocaïne, l'Algérie, compte tenu de sa situation géographique, a enregistré quelques cas de transit au profit d'organisations criminelles structurées. Que font les services de sécurités pour endiguer ce fléau ? Face à ce phénomène qui menace l'économie, la santé, la paix et la sécurité du pays, les services de police, de concert avec d'autres services de sécurité nationaux et internationaux, déploient tous les efforts nécessaires afin de cerner ce type de criminalité via un échange permanent et en temps réel de renseignements s'y rapportant. Pour cela, toutes les ressources humaines, techniques et scientifiques ont été mises en œuvre dans l'objectif de lutter efficacement contre ce type de trafic et renforcer également les investigations opérationnelles. D'autre part, le nombre d'arrestations effectuées démontre, une fois encore, l'engagement de notre institution policière dans ce combat ciblant l'éradication des réseaux criminels organisés actifs et les réseaux dormants. Il est important d'indiquer que le trafic illicite de stupéfiants est étroitement lié à d'autres formes de criminalité, notamment le blanchiment d'argent. La cybercriminalité est devenue aussi, sinon plus, dangereuse que le trafic de drogue. Quelles sont les mesures prises par la police judiciaire pour y faire face ? Le retour au calme sur le plan sécuritaire qu'a connu le pays depuis quelques années nous a permis de nous consacrer à d'autres formes de délinquance, notamment la cybercriminalité. La sûreté nationale s'est engagée, ces dernières années, dans la lutte contre les nouvelles formes de criminalité, en rapport notamment avec l'utilisation d'Internet. Cette nouvelle typologie de crimes et de délits a nécessité la mise en place, aux niveaux central et territorial, des formations et des moyens spécifiques pour lutter contre cette nouvelle forme de criminalité. Les équipes spécialisées de la police judiciaire ont été mises en place sur l'ensemble du territoire national afin de mettre un terme à ce genre de crimes, qui prend une ampleur inquiétante. Les résultats prouvent l'importance des efforts déployés dans ce domaine. En 2012, pas moins de 47 affaires liées à la cybercriminalité ont été traitées par nos services. Les mis en cause, à savoir 48 personnes dont 4 femmes, âgées entre 18 et 50 ans, encourent des peines variables pour différents délits, dont l'usurpation d'identité, le traitement automatique des données et la diffamation via le Net, outre des affaires liées à l'atteinte à la vie privée et la publication de photos pornographiques. Au niveau de la police, la lutte contre ce phénomène a enregistré, ces dernières années, des résultats satisfaisants grâce à la formation spécialisée des personnels et leur dotation en moyens matériels adéquats. Je dois préciser que l'investigation en matière de cybercriminalité ne se fait pas uniquement après le constat de l'infraction. C'est la prévention qui est exercée en amont. Pour ces missions, le policier doit utiliser les mêmes techniques et moyens et s'introduire dans le même univers que le délinquant, avec la seule condition d'agir dans le cadre de la loi. Concernant la coopération internationale, des conventions et protocoles d'accord ont été signés avec plusieurs pays. L'effacement des rapports géographiques entre les pays, induit par les nouvelles technologies de l'information et de la communication, a favorisé l'internationalisation de la criminalité, d'où la nécessité d'adhérer à toute initiative basée sur l'idée d'une action concertée pour une lutte efficiente. Le crime organisé, le banditisme et la petite délinquance prennent souvent de nouvelles formes auxquelles les services de la DGSN doivent s'adapter. Avez-vous procédé à une mise à jour de votre stratégie ? Le plan de lutte contre le crime organisé a été renforcé dans ses volets organisationnel et structurel. La DGSN a également renforcé ses moyens de lutte contre la délinquance dans les quartiers sensibles. Parmi les mesures décidées figurent la redynamisation des opérations d'envergure menées dans les quartiers jugés à risques et donnant lieu souvent à l'effritement de plusieurs réseaux de délinquants. L'occupation par les éléments de police des lieux de prédilection de la délinquance est un des principaux axes du plan d'action et de prévention de la DGSN. Sur instruction du directeur général de la Sûreté nationale, de nouvelles unités opérationnelles spécialisées dans la lutte contre les différentes formes de crime organisé ont été créées. Je souligne également la mise en place, depuis 2006, de brigades de recherche et d'investigation (BRI). Compte tenu de leur efficacité, la DGSN a procédé à leur déploiement progressif. Je cite également la mise en œuvre de mécanismes de coordination opérationnelle interservices et la mise à contribution des organes internationaux, tel qu'Interpol, dans le cadre de l'échange du renseignementl. Justement, quel est le rôle d'Interpol et du Bureau central national (BCN) Interpol Algérie ? Il faut savoir que la première mission de l'Organisation internationale de Police criminelle (Interpol) est d'assurer une coordination efficace entre elle et les BCN des différents pays. Ceci nécessite évidemment la célérité d'une communication sécurisée 24h/24 et 7j/7, le suivi des enquêtes au plan criminel, la lutte contre la criminalité nationale et internationale, l'apport d'un soutien probant et solide aux enquêtes présentées par les services nationaux et la formation. Pour le BCN Algérie, son rôle est de garantir l'efficacité et la rapidité dans les échanges d'informations policières à dimension internationale, dans l'unique souci de combattre efficacement la criminalité organisée sous toutes ses formes, d'améliorer et de développer la coopération internationale via la contribution efficace de l'Algérie. L'objectif aussi est d'assurer un suivi actualisé des dossiers afin de protéger les droits des citoyens algériens résidant à l'étranger faisant l'objet des enquêtes policières ou judiciaires menées par les autorités étrangères. Je tiens à souligner que nous entretenons des relations très étroites avec Interpol. Qu'en est-il des personnes recherchées par Interpol ? En 2012, le Bureau central national Interpol Algérie a diffusé des bulletins de recherche internationale à l'encontre de 141 personnes recherchées par les autorités judiciaires nationales, qui ont été diffusés au niveau international. D'autre part, le BCN a reçu environ 676 bulletins de recherche internationale émanant d'un certain nombre de pays qui ont aussitôt fait l'objet d'une diffusion à l'échelle nationale. Je précise que l'année 2012 a connu une coopération internationale intense et fructueuse, marquée par l'enregistrement de plus de 8.000 affaires d'échange d'informations, en particulier avec la Tunisie, le Maroc, la France, l'Italie et l'Espagne. Durant l'année 2012, la DGSN a enregistré 19.339 échanges avec les différents BCN et le secrétariat général de l'OIPC avec une hausse par rapport à l'année 2011 qui a enregistré 19.310 échanges dont 9.600 reçus des BCN et 5.684 du SG. La DGSN a émis 15.905 informations en 2012 et en a reçu 13.431 dans le cadre des échanges avec les services nationaux. Concernant les opérations d'extradition de criminels entre l'Algérie et les pays membres, cinq personnes ont été extradées de l'Algérie dont quatre Marocains et un Espagnol. D'autre part, le BCN a procédé à la récupération de pas moins de 197 voitures recherchées à l'étranger et 127 faux documents qui sont à l'étude. L'Algérie est l'un des premiers pays ayant acquis une station de télécommunications Interpol... Oui, effectivement, nous disposons d'une station de télécommunications Interpol permettant l'échange d'informations 24h/24 et 7j/7. L'Algérie est parmi les premiers pays ayant acquis cette station qui, de par sa fonctionnalité, permet de stocker des bases de données et d'échanger des fichiers, photos d'identité, empreintes digitales, immatriculations de voiture, numéros de passeport, liés aux documents volés ou falsifiés, aux véhicules recherchés, aux objets d'arts volés, à l'ADN et à l'exploitation sexuelle infantile. Ces bases de données sont mises à la disposition des services de sécurité et des Douanes. Des quartiers de la capitale et de plusieurs wilayas ont connu dernièrement des affrontements entre « gangs ». N'est-ce pas là le signe d'une nouvelle menace pour la sécurité ? L'apparition de ce type de phénomène a souvent pour origine le croisement de coutumes entraîné par le déménagement dans le cadre du plan de réaffectation des logements sociaux, touchant des familles de différents bords, qui comptent parmi elles des jeunes refusant le déracinement de leurs quartiers d'origine et prédisposés à la violence et encadrés souvent par des délinquants. A titre indicatif, les forces de police sont intervenues, au cours de l'année 2010, dans six cas d'affrontements entre bandes rivales enregistrées, notamment à travers les wilayas d'Alger, Tipaza, Jijel et Tizi Ouzou alors que 14 cas du genre ont été recensés durant l'année 2011 à travers les wilayas d'Alger, Tipaza, Oran, Constantine, M'sila et Béchar. Par contre, 44 cas ont été constatés en 2012, dont 24 dans la capitale. Ces actes qui prennent l'allure d'une bataille de rue se manifestent notamment par des agressions, vols et intimidations entre deux bandes de jeunes issus de quartiers populaires à l'effet d'asseoir un leadership, comme c'est le cas dans la localité de Birtouta. Cependant, l'intervention des forces de police ayant pour objectif la localisation et l'arrestation des principaux instigateurs, donne des résultats probants en matière de démantèlement des groupes rivaux de quartiers, qui se sont soldés, au titre de l'année 2012, par l'interpellation de 68 personnes. La situation est maîtrisée. N. B. * Bio express Le contrôleur Abdelkader Kara, directeur de la police judiciaire, est le représentant d'Interpol Zone Afrique pour 3 ans, suite à son élection à ce poste, en novembre dernier. Il a été également promu, en décembre dernier, au grade de « contrôleur », créé dans le cadre du nouveau statut particulier de la police.