Photo : Lylia M. A regarder de plus près la ville et son foisonnement nocturne, et à moins de dix jours du début du Ramadhan, les Oranais donnent la nette impression d'être entré dans une course contre la montre pour profiter des moindres moments de détente que peut offrir une saison estivale amputée de son tiers. Sitôt le soir venu, Oran est prise d'assaut par les vacanciers venus des autres wilayas, des émigrés ou par ses propres enfants à la recherche d'un souffle d'air. Parce que la question qui taraude la plupart des habitants de la ville c'est où aller par ces temps de canicule où même la nuit thésaurise une fraîcheur tant recherchée. Où passer ses soirées estivales quand on n'a pas eu la chance de louer au bord de la mer ou de voyager à l'étranger si ce n'est à la recherche d'un coin tranquille, familial, loin de l'incivisme et de l'insécurité. Le Front de mer, première destination par excellence des familles oranaises et des touristes, ploie comme chaque année sous le poids des marcheurs. Ici on cherche à prendre du bon temps et surtout s'attabler dans l'une des nombreuses crémeries qui jalonnent le parcours du boulevard de l'ALN. Des couples, des familles entières ou en solo, les gens déambulent le long du balcon supérieur du front de mer, flânant au gré des rencontres, avec toujours le port et ses lumières en perspective. Pour beaucoup de familles, la ville offre peu de choix pour des sorties nocturnes. Absence d'infrastructures adéquates, cherté des quelques lieux de villégiature qui existent encore, prestations de service en deçà des attentes, insécurité ambiante en dehors du centre-ville sont autant d'ingrédients qui faussent les calculs des Oranais à chaque été. Pour Kader, fonctionnaire et père d'un enfant, mis à part le Front de mer et ses crémeries, il n'existe aucun endroit où promener sa famille. Des distractions, la Cité en offre peu à chaque année. L'an passé c'était le Festival panafricain avec son quota d'artistes africains pour Oran ainsi que le Festival du film. Pour cet été, les mélomanes sont conviés à la troisième édition du Festival de la chanson et de la musique oranaises. «C'est peu, très peu pour une ville qui se veut être un pôle culturel», se désole Samir, enseignant, qui ne sait plus où emmener ses trois enfants pour tromper les longues et fastidieuses nuits oranaises. «Même l'espace de jeu, en face de l'hôtel Sheraton, qui offrait quelques heures de loisirs pour les enfants a été fermé», ajoutera-t-il. Devenu un véritable phénomène social, illustratif de ce malaise urbain, l'envahissement des ronds-points de la ville et plus particulièrement ceux du Sheraton, de l'aéroport international d'Es-Sénia ou encore de la Pépinière, explique à lui seul toute la détresse culturelle et festive de la ville. Pour Slimane, la cinquantaine bien tassée, ces ronds-points sont devenus avec le temps des lieux de rencontre entre familles à la recherche de courants- d'air et de fraîcheur et, à la longue des amitiés mêmes se sont nouées sur ces espaces de «détente».