le sommet du G8 entend débattre des questions majeurs qui agitent la gouvernance mondiale en crise. Lieu de leur rencontre : à 130 km de la capitale, Belfast, plus exactement dans le complexe de luxe de la petite localité d'Enniskillen, érigé en Bunker. pour contenir l'assaut du mouvement social contestataire on a mobilisé 8.000 policiers (4.400 policiers nord-irlandais et 3.600 venus de Grande-Bretagne. Près de 10.000 manifestants sont attendus dans la capitale irlandaise. Dans une sorte de répétition générale, un gros millier de syndicalistes et d'écologistes, venus du Nord comme du Sud irlandais, ont déjà défilé, samedi, pour dénoncer l'austérité. Même si « les gens se concentrent maintenant sur les combats qui ont lieu dans leur propre pays, en Grèce, en Espagne et en Turquie », les alters-mondialistes ne veulent pas lâcher prise. Ils veulent, quoi qu'il en coûte, continuer à défendre les idéaux de l'autre « monde possible », érigé en alternative à un ordre mondial injuste, discriminatoire et source de drames humains incommensurables. Perchés tout en haut de la tour d'ivoire d'Enniskillen, les chefs d'Etat et de gouvernement du G8, indifférents aux revendications légitimes du Sud de l'hémisphère plaidant pour le droit au développement et à une existence souveraine, imposent une approche égocentrique des affaires du monde qui se traduit par un ordre du jour limité aux thèmes de l'évasion fiscale et du conflit syrien. Le coup d'envoi a été donné par le Premier ministre britannique, David Cameron, invitant, le 15 juin, à Downing Street, les représentants des 10 territoires britanniques d'Outre-mer (Les Bermudes, Iles Caïman, Jersey, Guernesey), considérés comme des places fortes des paradis fiscaux de la Couronne, pour initier la lutte contre le secret bancaire et l'évasion fiscale. Au quotidien The Guardian, il s'est donc engagé à mener la vie dure aux groupes florissants en délicatesse avec les impôts, comme Google, Amazon ou Apple pointés du doigt pour avoir, en toute légalité, localisé artificiellement leurs bénéfices dans des territoires à faible fiscalité. Ce phénomène pernicieux a été dénoncé par l'ONG Global Financial Stability (GFI), basée à Washington, appelant le G8 à agir contre « l'évitement fiscal » des multinationales tenues de déclarer leurs bénéfices et leurs activités dans les pays où elles sont présentées. « Cet évitement prive les gouvernements de recettes au moment où des nations, riches ou pauvres, luttent pour payer leurs factures », assure GFI, qui se déclare opposée au « reporting » pays par pays, de nature, certes, à ne pas résoudre « complètement » la question, mais permettrait, toutefois, de « faire apparaître au grand jour » les stratégies de contournement. Elle exhorte les pays réfractaires (Canada, Japon, Russie, Etats-Unis) à développer « l'échange automatique » des informations bancaires pour détecter et décourager l'« évasion fiscale ». A Belfast, le dossier syrien est au cœur des discussions marquées par les profondes divergences entre Moscou, préconisant une solution politique au conflit dans le cadre de Genève 2, et ses partenaires du G8 prônant l'armement de la rébellion et mettant sous pression Damas, accusée d'avoir franchi « la ligne rouge » des armes chimiques. Jusqu'où ira le bras de fer ? Vendredi soir, pendant une environ heure, le Premier ministre britannique s'est entretenu avec ses alliés américains, français, allemands et italiens pour déterminer « la manière dont les pays du G8 devraient s'accorder pour travailler ensemble à une transition politique afin de mettre fin au conflit ». Exit le compromis de Genève 2, A Londres, David Cameroun devait accueillir le président russe, Vladimir Poutine, dès hier, pour en parler. Mais au-delà de ces dossiers, le geste fort de la solidarité euro-atlantique se caractérise par le lancement des négociations de l'accord commercial entre les Etats-Unis et l'Union européenne, parvenant, vendredi soir, à arracher un accord pour exclure le secteur audio-visuel du mandat des négociations. Principe de « l'exception culturelle », défendue âprement par la France, oblige.