Chaque année, Ali, à peine sorti de l'adolescence, passe ses vacances au quartier de Bab El-Oued. Il est sollicité pour vendre la vaisselle en terre cuite. C'est la période du mois de Ramadhan qui est privilégiée pour ce genre de commerce. Sa tante qui habite à Béjaia lui envoie des caisses pleines de marmite et de couscoussiers à écouler en contrepartie d'un pourcentage sur chaque article vendu. Tôt le matin, il fait du porte à porte pour proposer la marchandise. Au fil du temps, il a acquis une certaine expérience. Il ne s'arrête pas d'énumérer le prix de chaque ustensile, allant jusqu'à vanter les mérites de ce genre d'ustensiles. Avec des mots simples et convaincants, il arrive souvent à vendre le contenu du panier. « Madame, essayez et vous verrez, la marmite en terre cuite est meilleure à tout point de vue ; elle ne brûle pas les aliments et les cuit doucement tout en gardant la saveur et la chaleur ». A force de répéter cette longue phrase avec conviction, la ménagère « succombe » et ouvre de suite son porte-monnaie. Ali est devenu un commerçant né malgré son jeune âge. Alors que ses camarades profitent de la plage El-Kettani, du soleil, de la détente ou de la piscine, lui, aide sa famille. Il ne se plaint pas du tout. Tant qu'il y des acheteurs, Ali, essaye de faire de son mieux. Sa tante de Béjaia travaille sans relâche la terre cuite. De la vaisselle en passant par les brocs pour contenir le petit lait ou du lait caillé jusqu'au bougeoir. Les finitions sont bien réalisées et la décoration savamment recherchée. Il suffit à Ali de tomber sur des acheteurs connaisseurs. Pour ce mois de Ramadhan, sa chambre est pleine à craquer. Depuis une semaine, il a commencé la vente. A Bab El-Oued, les différents quartiers, les impasses, les ruelles, il les connaît comme sa poche et n'ont aucun secret pour lui. D'ailleurs s'il trouve, plus tard, un travail comme facteur, il remportera l'examen ou le test d'embauche haut la main. L'argent récolté durant le Ramadhan par ce commerce est plus conséquent que les autres mois. Beaucoup de familles préfèrent de loin cuire l'ham lahlou et la chorba dans le « fekhar » comme au bon vieux temps. Les mets cuits dedans ont une saveur particulière et l'odeur qui s'exhale est exquise. Ali n'a qu'à taper à la bonne porte.