Médecins généraliste, spécialistes, professeurs ou paramédicaux, tous estiment vital d'opérer des changements dans la gestion des hôpitaux pour sauver « ce qu'il y a encore à sauver ». Mais pour le professeur Nacer Djidjelli, président du Syndicat national des professeurs et docents en sciences médicales (SNPDSM), le remède n'est pas pour demain tant le budget alloué au secteur de la santé est dérisoire. « L'Algérie débourse 180 dollars par habitant pour l'accès aux soins. A Cuba, ce chiffre est trois fois plus important, alors qu'en France, l'Etat débourse, en moyenne, 3.800 dollars par habitant », signale-t-il. Selon lui, il faut revoir sérieusement le système avec lequel est administré ce secteur. Il estime que le changement impose la révision du système de la sécurité sociale, exige la modification de la politique de la médecine gratuite qui « a montré ses limites » et incite à l'autonomie des hôpitaux. « Comment peut-on gérer un hôpital alors qu'on n'a pas de pouvoir de décision dans sa gestion ? Il n'y a pas longtemps, nous avons dû fermer le bloc opératoire pendant dix jours à cause de l'absence d'une femme de ménage. Trouvez-vous normal qu'un directeur d'hôpital ne puisse recruter une femme de ménage dans de brefs délais du fait qu'il doit informer, consulter et attendre la réponse de la hiérarchie ? », s'interroge-t-il. Pour lui, un changement radical dans la gestion du secteur est nécessaire. Même constat du président du conseil de l'ordre des médecins, Dr Berkani Bekkat, pour qui la mauvaise gouvernance des hôpitaux est constatée depuis des années par le peuple algérien. « Le diagnostic aujourd'hui, c'est que l'Algérien n'arrive pas à accéder aux soins dans les hôpitaux et cela malgré les moyens financiers dont dispose l'Algérie. En tant que praticien et président de l'ordre des médecins, je vis au quotidien les problèmes dans les hôpitaux et nous avons envoyé des rapports au ministère dénonçant le gaspillage, l'incompétence du personnel, la mauvaise gestion, l'absence des médicaments et la mauvaise réalisation des infrastructures. Une année après son installation, le ministre Ziari constate qu'il y a une mauvaise gouvernance dans les hôpitaux, je dis seulement qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire », indique-t-il. Face à cette situation, il préconise l'organisation d'une conférence nationale sur la santé à laquelle tous les professionnels et surtout les associations qualifiées participeront. « On doit sortir avec des popositions de solution à court terme qui seront présentées au gouvernement pour adoption dans les bref délais même si cette rencontre doit durer une semaine et quitte à travailler jour et nuit », recommande-t-il. Le représentant des paramédicaux, Lounès Ghachi, estime que les critiques du ministre sont constructives. « Nous partageons l'avis du ministre sur la mauvaise gestion des hôpitaux. Mais ce constat doit être suivi de changements que nous attendons depuis des années. A mon avis, le changement dans les hôpitaux ne peut advenir sans l'adhésion de tout le monde et en premier lieu les responsables du ministère car il faut préciser que nous avons un ministre et un ministère. C'est-à-dire la volonté du seul ministre ne peut bouleverser le fonctionnement sans l'implication réel des directeurs centraux », estime-t-il. Lyès Merabet, président du syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP), rappelle que le constat du ministre a été fait, bien auparavant, par les professionnels et les syndicats du secteur. « Le projet de la réforme hospitalière a été entamé il y a déjà 10 ans, suite a un constat établi par des experts, mais, depuis rien n'a été fait. On est en train de réitérer le constat sans apporter de solutions concrètes », estime-t-il. Après avoir évoqué les multiples problèmes qui freinent toute évolution du secteur comme celui de la pénurie des médicaments, M. Merabet s'interroge sur les raisons qui empêchent le projet de loi qui encadre la loi sanitaire de 2011 d'aboutir. « Il faut impliquer tous les intervenants afin de sortir avec des solutions pérennes et pratiques. A mon avis, il faut aller à l'essentiel en évoquant les problèmes intersectoriels comme la caisse de sécurité sociale », suggère-t-il.