La création au sein du gouvernement d'un ministère chargé de la Réforme du service public s'inscrit en droite ligne du programme de l'équipe Sellal. On serait presque tenté de dire que ce fut l'une des priorités d'un responsable dont l'ambition affichée était de rendre meilleure, moins stressante, la vie des Algériens. Sitôt nommé Premier ministre fin août 2012, il n'avait cessé d'appeler à l'amélioration des prestations de l'administration. Dans de multiples déclarations publiques, au cours de ses interventions devant la société civile lors de ses déplacements dans les wilayas, ce thème revenait sans cesse, prenant parfois l'allure d'un vibrant plaidoyer pour « un changement des mentalités ». Le Premier ministre fustigeait les lourdeurs au niveau des banques et des collectivités locales, imputant à celles-ci le ralentissement de projets d'investissement et la dégradation de la qualité de vie dans notre pays. C'était son véritable cheval de bataille pour redonner de la crédibilité à l'action de l'Etat, garantir son efficacité et rétablir la confiance avec les citoyens, largement ébranlée. C'est un fait que l'Algérien se plaint du parcours du combattant auquel le soumettent beaucoup d'administrations. S'acquitter d'une simple tâche comme payer une facture ou se faire délivrer un simple document vous fait perdre dans beaucoup de cas votre temps et met à rude épreuve vos nerfs. Cette situation était d'autant plus mal vécue que le recours aux nouvelles technologies pouvait mettre fin à ces anomalies. A la décharge des organismes publics, qui, il faut le dire, n'ont jamais bénéficié, à l'exemple des APC, d'un encadrement de qualité, parfois de simples moyens et qu'eux-mêmes sont les victimes du « système ». Chacun était à la merci d'une tutelle tatillonne et papivore. Avec le recours massif ces dernières années à un personnel contractuel et sous-payé, la qualité de service s'est nettement dégradée, alimentant bien des foyers de tension. Cela se ressent notamment dans les services d'état civil. La déliquescence du service public alimentait une grogne sourde et parfois ouverte contre des organismes, dont le respect du citoyen était la dernière préoccupation. Si certains secteurs comme la justice ont commencé à rompre avec les anciennes habitudes, au niveau de l'éducation nationale et des banques surtout, la situation ne s'est pas améliorée et des lourdeurs semblent résister à tout changement. Pour la petite anecdote, un homme s'est mis à se creuser la tête pour comprendre pourquoi à chaque inscription, on demande deux extraits de naissance à un élève. On doute qu'il y ait déjà trouvé une réponse. Placer sous l'autorité directe du Premier ministre, le chargé de cette nouvelle mission, en l'occurrence M. El Ghazi, ne paraît nullement un hasard. La mission, confiée à quelqu'un qui a dirigé plusieurs wilayas dont les dernières furent Chlef et Annaba, nécessite la collaboration de tous les autres départements ministériels. Une synergie des efforts est nécessaire car les services publics relèvent de multiples tutelles. C'est un véritable travail de coordination que se voit confier le titulaire de cette mission qui connaît bien les rouages de l'administration. La tâche ne sera, de toute évidence, pas facile. Une vision aussi novatrice soit-elle et la volonté ne suffiront pas. Outre la difficulté de coordonner l'action de multiples acteurs, chacun ayant ses priorités et vivant sous des pesanteurs propres à lui, un autre risque peut surgir. Celui de se voir créer une nouvelle administration qui vit pour elle-même sans influer sur le cours des choses. Le Premier ministre est conscient de l'importance de la mission et fera, sans nul doute, le nécessaire pour éviter cet « enlisement ».