Après deux jours de débat agité à Istanbul, la Coalition de l'opposition a annoncé, hier, son accord pour participer aux négociations de paix. Le « pas important », salué par le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, et considérée comme une « condition du succès » par le médiateur international Lakhdar Brahimi, constitue une avancée qui pour être nécessaire n'en est pas suffisante. Car les conditionnalités risquent de réduire à néant les chances de paix. Dans un communiqué, l'opposition dit vouloir « participer à la conférence sur la base d'un transfert intégral du pouvoir et à condition que Bachar El Assad et ceux qui ont du sang syrien sur les mains ne jouent aucun rôle dans la phase transitoire et dans l'avenir de la Syrie ». Elle revendique, également, avant le coup d'envoi de Genève, un libre accès aux zones « assiégées » pour les convois d'aide de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et « d'autres groupes », la « libération des détenus, principalement des femmes et des enfants ». Mais les préalables d'Istanbul sont catégoriquement rejetés par Damas qui refuse de plier au diktat et se déclare totalement opposée au dialogue avec les groupes terroristes et les groupes inféodés aux Etats étrangers. Il reste aussi que les divergences entre les différentes factions de l'opposition compliquent davantage la donne syrienne. Une opposition hétéroclite qui peine à dégager un front commun, tributaire de la caution incontournable du camp des irréductibles réfractaires à toute négociation. Une démarche a été entreprise pour tenter de convaincre les organisations à l'intérieur et à l'extérieur de rallier la cause de la Coalition. « Nous devons partager ceci (le projet de résolution) avec les force à l'intérieur, ainsi qu'avec les chefs des communautés et les militants. Il faut que ceci soit confirmé avec eux », a souligné un des membres du Conseil national syrien, l'un des groupes qui forment la CNS. L'idée d'un « partenariat » avec les brigades de l'ASL (Armée syrienne libre) est avancée par le porte-parole de la Coalition. Deux délégations vont se rendre en Syrie pour discuter de l'opportunité de se rendre à Genève. Car il est établi que « si nous devons nous rendre à Genève, ils feront partie de la délégation » pour garantir la réussite d'une « Syrie démocratique ». Plus divisée que jamais, l'opposition, en quête d'unité et de crédibilité, est confrontée à l'épreuve de la légitimité. Présenté comme le groupe le plus important structuré autour du noyau dur des Frères musulmans, la Coalition peine à se faire entendre. Elle est viscéralement contestée par les groupes de rebelles se réclamant du « djihad », signant, il y a mois, un communiqué dans lequel ils ont affirmé ne pas se reconnaître dans cette coalition et menaçant de liquidation physique pour « trahison » tous ceux qui seraient tentés de se rendre à Genève. Plus encore, même si elle se présente comme le seul représentant à l'extérieur, l'emprise de la Coalition à l'intérieur est affaiblie par le rôle hégémonique du Front En Nosra, affilié à Al Qaïda, qui lui conteste une présence dans les « zones libérées ». Le chemin de Genève est encore long pour l'opposition.