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« L'action policière doit être accompagnée de mesures sociales » Le colonel ghali belksir, commandant du groupement de la Gendarmerie nationale d'Alger
Comment interprétez-vous la recrudescense des « guerres des gangs » dans les quartiers de la capitale ? D'abord, je tiens à préciser qu'il ne s'agit nullement de « guerres des gangs ». Un gang est composé de plusieurs membres avec un chef et une organisation bien structurée. Mais dans notre cas, on fait face à des bandes rivales de jeunes, notamment des adolescents, qui suite à des malentendus banals prennent de l'ampleur surtout qu'elles recourent aux armes blanches et s'attaquent aux personnes et aux biens. Des quartiers ont été, ces derniers temps, le théâtre de batailles rangées entre des jeunes des cités et les délinquants, créant un climat de terreur et d'insécurité. La singularité de ces bandes, c'est qu'elles sont équipées de sabres, de couteaux, de cocktails Molotov, de fusils à harpon, de fusils de signalement de bateaux, de bombes lacrymogènes. Conséquence : les affrontements sont caractérisés par une violence inouïe mais la situation est maîtrisée grâce à l'intervention rapide des services de la Gendarmerie nationale qui a permis l'arrestation des individus impliqués et la saisie de lots importants d'armes blanches. Dans l'incident de Baraki, des citoyens reprochent à la Gendarmerie nationale d'avoir mis du temps à intervenir... II est important de mettre en exergue les difficultés que rencontrent nos éléments dans la lutte contre la criminalité. Dans les affrontements de Haouch El Mihoub, à Baraki, nos unités sont intervenues dès le début de l'incident et ont pu maîtriser la situation avant qu'elle ne dégénère, et nous avons eu recours aux éléments d'une unité spécialisée, à savoir la section d'intervention et de sécurité (SSI). Cette opération s'est soldée par l'arrestation de 21 individus impliqués et la saisie d'un lot important d'armes blanches. Autre difficulté, les victimes refusent de déposer plainte par peur de représailles. Dans le cas des évènements de Baraki, nous n'avons enregistré que huit plaintes, et ce, cinq jours après. Il est important également de signaler que ces incidents surviennent en fin de soirée du fait que la plupart des jeunes impliqués passent la journée dans leurs quartiers d'origine avant de rejoindre leurs nouveaux lieux de résidence. L'intervention de nos unités, dans ces incidents, nécessite la mise en place de grands moyens humains et matériels. Ce qui explique l'intervention des gendarmes à l'aube ? Effectivement. Notre plan d'action dans la lutte contre ce phénomène repose essentiellement sur des descentes inopinées et l'interpellation des meneurs. Elles sont programmées la nuit afin d'intercepter les individus impliqués. Cela n'est possible que par la perquisition des domiciles après la saisie de la justice, ce qui permettra l'arrestation des personnes impliquées et la saisie des armes blanches utilisées dans les affrontements notamment. Des résultats satisfaisants ont été obtenus à Baraki, Aïn El Melha à Gué de Constantine. Des batailles rangées sont régulièrement signalées dans plusieurs nouvelles cités dans la banlieue d'Alger, comme Aïn El Melha, Dély Ibrahim, Baraki, Tessala El Merdja, Béni Messous ou Birtouta ... Je rassure la population algéroise que la situation est maîtrisée. Les quartiers de Sebala, à Draria et Douéra, qui dépendent de la compétence de la Gendarmerie nationale, connaissent une accalmie depuis la dernière intervention des SSI, il y a près de deux années. Un travail de proximité en direction des jeunes a été effectué dans une perspective de prévention. Le commandement de la GN de la capitale a dégagé deux axes de travail. En premier lieu, l'organisation de campagnes de sensibilisation en direction des jeunes. Cette mesure a été efficace. Aucun incident n'a été enregistré depuis une année à Douéra et Draria qui ont été, à plusieurs reprises, le théâtre d'affrontements entre bandes rivales. C'est dans ce contexte aussi que le commandement de la GN a procédé à la création des unités spéciales et formées dans la lutte contre le grand banditisme et la violence urbaine que sont les sections de sécurité et d'intervention (SSI). Sur le plan sécuritaire, un travail est fait, mais ces événements sont plutôt d'ordre social que sécuritaire, l'action policière nécessite donc un accompagnement social. La construction de logements s'est souvent limitée à l'aspect quantitatif, une approche qui a donné lieu à l'émergence de cités-dortoirs. Ne pensez-vous pas que le manque d'infrastructures de loisirs en est l'une des conséquences ? Les nouvelles cités manquent d'infrastructures. Ce sont des bâtiments sans âme, mais des mesures viennent d'être prises par les autorités publiques pour pallier ce manque par la construction de structures de proximité, chargées notamment de la sécurité, avant toute opération de relogement de citoyens. Quelles sont les mesures adoptées par vos services pour y faire face ? Nous avons maintenu notre présence permanente sur les lieux. Des éléments des SSI et des groupes d'intervention et de réserve (GIR) sont sur place. Nous avons opté pour la perquisition des caves et des terrasses, en plus des patrouilles mobiles dans les quartiers qui manquent d'unités de gendarmerie. Des descentes sont programmées toutes les 48 heures dans les quartiers touchées par cette délinquance. D'autre part, des compagnies de la GN ont créé un fichier pour répertorier les repris de justice et les délinquants dans les nouveaux quartiers. Il s'agit de ceux qui ont été reconnus coupables de délits et qui ont changé de domiciliation après leur relogement. Ainsi, les repris de justice dans des affaires liées au trafic de drogue, vols et agressions sont fichés dans cette banque de données, destinée à fournir des renseignements aux enquêteurs. En outre, ces délinquants sont soumis à un contrôle rigoureux lors de leurs déplacements, ceci dans un cadre préventif, mais aussi de renforcement du travail de renseignement en coordination avec nos collègues de la police. Le ministre de l'Intérieur a insisté sur le renforcement de la sécurité au niveau de la wilaya d'Alger. Quelle est la nouvelle stratégie de vos services ? Les services de la GN ont procédé récemment à la mise à jour de la carte criminelle dans les régions touchées par la délinquance afin de prendre des mesures urgentes, selon la spécificité de chaque zone. Il s'agit d'un plan d'actions qui tend à préserver l'ordre public par une présence permanente des gendarmes dans ces quartiers et la multiplication des patrouilles au niveau des foyers de la délinquance. Ce plan « zoning » qui consiste en le partage de la capitale en trois zones, est, sud-est et sud-ouest, implique des descentes inopinées de trois compagnies de la GN. Des résultats satisfaisants ont été réalisés sur le terrain. Il y a aussi le travail de renseignement pour identifier les délinquants. En outre, des études sont effectuées sur la délinquance juvénile, la violence dans les établissements scolaires, et c'est à la lumière des résultats qu'un plan d'action a été établi. Vous avez également procédé à une étude sur la violence urbaine dans les nouvelles cités. Quels en sont les résultats ? Une étude analytique a été faite juste après l'apparition de ce fléau et, actuellement, une autre enquête complémentaire est confiée au bureau de la police judiciaire. D'ailleurs, la première étude nous a permis de prendre plusieurs mesures préventives, dont les campagnes de sensibilisation. Parmi les propositions, il y a le lancement des études sur les quartiers avant toute opération de relogement afin d'analyser le phénomène. Nous avons recommandé la mise en place de salles de jeux et de sport, la réalisation de mosquées, de salons de thé et de lieux de détente ainsi que la création de comités de quartier pour rassembler les jeunes. Les individus impliqués dans ces incidents sont généralement des repris de justice, des jeunes chômeurs, des délinquants avec un niveau scolaire bas et qui refusent tout dialogue. Nous veillerons dans la nouvelle enquête à mieux analyser ce phénomène dans l'objectif de mieux le maîtriser.