En 1960, la Révolution atteint sa maturité et gagne de jour en jour plus de soutien. Après un enlisement dans les turpitudes de la répression, la France veut sauver sa face. De Gaulle tente une « paix des braves », une solution qui laisse l'Algérie et ses richesses dans le giron français. Une visite pour tâter le terrain et avancer ses idées saugrenues, mais le peuple a son mot à dire. Il descend dans la rue contrecarrer sa propagande. Le peuple crie alors son soutien à la révolution, à son gouvernement, le GPRA, et à l'indépendance. Un premier échec pour de Gaulle et sa troisième voie. Les manifestations ont été violemment réprimées par l'armée, mais elles ont eu « un grand retentissement en Algérie, en France et dans le monde », disent les historiens. Elles ont surtout persuadé de Gaulle qu'il n'y avait d'autre solution que la reconnaissance d'une indépendance de l'Algérie négociée avec le FLN. Selon l'historien français, Gilles Manceron, le général de Gaulle, dès le 5 septembre 1960, avait parlé d'une « Algérie algérienne », il avait ajouté au dernier moment à son discours les mots « République algérienne » qui ne figuraient pas dans le texte qu'il avait fait lire à son Premier ministre, Michel Debré. Ce dernier était en désaccord avec cette orientation et a voulu démissionner. C'est lui qui va tenter, en 1961, de susciter une « troisième force » à laquelle de Gaulle ne croit plus. Ses rencontres à l'Elysée en juin 1960 avec des responsables de l'ALN, n'avaient rien donné. De plus, lors de son voyage en Algérie du 9 au 13 décembre 1960, il a bien vu que le peuple soutenait massivement le FLN et le GPRA. Quelques mois plus tard, de Gaulle décide d'ouvrir des négociations avec le FLN à Evian devant des généraux mécontents qui vont lui organiser un putsch en avril 1961 et l'opposition des ultras de l'OAS qui vont appliquer la politique de la terre brûlée. Mais les manifestations de décembre 1960 ont renforcé sa conviction et l'ont conduit à « prendre directement la conduite des négociations, en s'appuyant sur le secrétaire d'Etat, Louis Joxe, chargé de rencontrer secrètement le ministre des Affaires étrangères du GPRA, Saâd Dahlab ». Les manifestations, qui ont duré deux jours à Alger, ont eu un immense écho à l'étranger. Plusieurs pays dénoncèrent leur répression par l'armée française. Le slogan « Algérie algérienne » était ambigu et constituait un déni historique L'Assemblée générale des Nations unies a voté une résolution, par 63 voix contre 8 (et 27 abstentions), demandant l'autodétermination de l'Algérie. La France s'est retrouvée isolée. Elle, qui a longtemps nié l'existence d'une nation algérienne, se résigne à la reconnaître. Pour les observateurs, le slogan « Algérie algérienne » était ambigu et s'alimentait de ce déni historique. Les militants du FLN étaient alors obligés de le détourner en scandant « Vive le GPRA ! », « Vive l'indépendance ! ». Le slogan en question, ajoute Dr Djerbal, « pouvait tout autant mener à la solution envisagée et planifiée depuis octobre 1957 par le Conseil d'Etat français, c'est-à-dire une forme d'association avec la France qui n'excluait pas la poursuite de la dépendance ». L'historien ajoute que ce n'était pas la première fois que les Algériens occupaient la place publique et exprimaient leur opposition à la politique coloniale de la France. « Déjà en 1934, des manifestations avaient mené à des affrontements avec les forces de police à Alger. Les militants indépendantistes de l'Etoile Nord-Africaine prennent alors appui sur les jeunes des quartiers populaires pour lancer le Parti du peuple algérien. Mai 1945 aussi a été une date où le peuple s'est exprimé pour l'indépendance. Décembre 1960 comme octobre 1961 à Paris ont été autant de moments historiques où le peuple a pris conscience de son rôle comme acteur décisif de son propre destin. »