Dans son allocution d‘ouverture, le commissaire de ce festival, Aïssa Rahmouni, a indiqué que l'objectif de cette manifestation était de valoriser et de promouvoir la musique andalouse, rappelant l'existence de six festivals de la musique andalouse en Algérie. « Cette musique est issue du peuple algérien qui a su préserver son patrimoine, en dépit des tentatives coloniales visant à dénaturer la culture algérienne », a-t-il souligné. Il a ensuite rappelé l'attachement du peuple algérien à sa culture tout en restant ouvert sur les autres cultures. Aïssa Rahmouni a souligné que cette soirée artistique se veut un hommage aux Cheikhs Mohamed et Abderrezak Fekhardji. Pour tous les amoureux et les passionnés de la musique andalouse, les deux cheikhs sont des maîtres, deux exemples, vers lesquels des élèves se tournent et se tourneront. Au-delà de leur génie et du rayonnement de leur carrière, ils incarnent une morale, un idéal artistique fait d'intégrité, de rigueur, de respect infini pour leurs passions et leurs mélomanes. Ils ont su, avec délicatesse, légèreté et fantaisie, instruire. Ces « chioukhs » ont formé de nombreux jeunes musiciens qui, fidèles à leurs inspirations, à l'éthique et à leurs engagements artistiques, le remarquent aujourd'hui, à l'occasion de cet hommage posthume rendu. Mélodies entraînantes La soirée inaugurale a débuté par un concert musical conduit par l'ensemble régional d'Alger. Un répertoire musical interprété remarquablement par Dalila Mekadder et dirigé d'une main de maître par Zerrouk Mokdad. Il a présenté une nouba maya et des morceaux du patrimoine andalou. L'ensemble régional d'Alger (ERA) se consacre à la sauvegarde du répertoire et de l'interprétation de la musique Sanaâ de l'héritage arabo-andalou tout en visant l'innovation dans le respect des canons de cette musique. Il s'est enrichi tout au long de son parcours, de la participation de nombreux noms prestigieux tels que Nasreddine Chaouli, Fayçal Benkrizi, Abdelkader Rezkallah , Beihdja Rahal et, bien sûr, le maître, Mokdad Zerrouk. Gratifiant le public d'un florilège de chansons du terroir, Dalila Mekadder a présenté, dans la subtilité, une nouba maya, d'une durée d'environ une heure et demie, dans le respect des préceptes académiques de l'école Sanaâ. Déroulant une succession de pièces aux rythmes différents constituant la nouba, l'artiste a offert à l'assistance un programme riche, composé de M'ssader, Istikhbar, B'tayhi, Derj, Insiraf, Dlidla, Inkhilas et d'une Hwaza, en apothéose. Ecrits par les plus grands poètes du patrimoine andalou, les textes interprétés par l'ensemble régional d'Alger évoquent, entre autres, la convivialité, l'amour, l'adoration de Dieu, la nature et la pureté de l'âme alternant lyrisme romantique. On retouve beaucoup de soufisme dans le spectacle animé par l'ensemble syrien « Al Kindi ». Les rythmes composés et les mélodies entraînantes ont alterné avec les modes majeurs et mineurs, illustrant son texte par une gestuelle expressive, pour vivre de l'intérieur l'intensité du moment. Dans la noblesse des sonorités denses des instruments à cordes rassemblant le luth, la kouitra et le r'beb, les adeptes de ce genre musical ont pris du plaisir à savourer chaque moment du récital dans l'allégresse et la volupté. « Magnifique ! Une belle randonnée dans les méandres de notre beau patrimoine ! », a confié un sexagénaire. Imad Hariri, chef d'orchestre de l'ensemble syrien « Al Kindi » nous a confié son intention de vouloir « s'ouvrir sur l'expérience de l'harmonisation des mélodies, jusque-là enfermées dans l'orchestration à l'unisson et dont la richesse impose une distribution musicale. » L'ensemble « Al Kindi » a eté fondé en 1983 par le virtuose de la cithare arabe (qânûn), Julien Jâlal Eddine Weiss. Il est considéré comme l'un des meilleurs ensembles de musique classique arabe pour la qualité de son interprétation et la rigueur de son travail sur les traditions musicales classiques du Proche et du Moyen-Orient. Sous la direction de Julien Weiss, cet ensemble interprète le répertoire de la musique savante en revalorisant les instruments, rétablissant un équilibre souvent rompu à la faveur exclusive du chant.