En clôture de sa tournée régionale, le ministre de la Défense français, Jean-Yves Le Drian, s'est rendu à Bangui. Pour la troisième fois, depuis le déclenchement de l'opération Sangaris. Face à l'« épuration ethnique » que les forces françaises n'ont pu empêcher, le syndrome libyen des miliciens régnant en maîtres absolus dans un pays en ruine souligne davantage les limites et les conséquences désastreuses de l'interventionnisme d'un Occident en crise. Ni la Misca, dûment habilitée à l'emploi de la force en cas de menace sur la population, ni les forces françaises n'ont réussi à enrayer la machine à tuer des Sélékas, à dominante musulmane, délogés du pouvoir, et des anti-Balaka, de confession chrétienne, sévissant en toute impunité et forçant à l'exil des habitants de régions entières installés au Tchad et au Cameroun. Que faire ? Le recours « si besoin à la force » pour faire entendre raison aux milices coupables d'exactions et de meurtres, a souligné, depuis Brazzaville, le ministre français de la Défense. La menace est clairement identifiée : les anti-Balaka, pointés du doigt par le commandant de la Misca, le général camerounais Martin Tumenta Chomu, et qualifiés de « bandits » et de « principaux ennemis de la paix » par le commandant de l'opération Sangaris, le général Francisco Soriano. L'organisation de défense des droits de l'Homme Amnesty International appelle à « faire barrage au contrôle des milices anti-Balaka et à déployer des troupes en nombre suffisant dans les villes où les musulmans sont menacés ». Tout en qualifiant la réponse de la communauté internationale de « trop timorée », Amnesty International s'insurge contre les réticences des forces de maintien de la paix, impuissantes à faire face aux anti-Balaka, procédant à une épuration ethnique des musulmans victimes de pillages et de lynchages au quotidien. Elle cite le cas de Bossemptélé où une attaque anti-Balaka a fait, le 18 janvier, « plus de 100 victimes parmi la population musulmane ». Le constat de faillite de Sangaris sonne la révolte de la présidente Catherine Samba Panza, fraîchement élue (20 janvier), qui déclare vouloir « aller en guerre ». Elle annonce une traque impitoyable contre les milices de la terreur, lors d'une visite effectuée dans la localité de Mbaïki (80 km au sud-ouest de Bangui), en compagnie du ministre français de la Défense. Le « risque avéré » de partition, évoqué mardi par le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a été catégoriquement réfuté par la présidente centrafricaine de transition, déterminée à « ne pas céder un seul pouce du territoire centrafricain qui a toujours été uni et laïque ». La ligne rouge d'« une seule Centrafrique, d'un seul chef d'Etat » est ainsi codifiée par Le Drian qui veut en finir avec la menace anti-Balaka.