Une journée ! C'est le temps qui reste avant que le coup d'envoi de la campagne électorale ne soit donné, demain dimanche. L'heure de vérité. Bien sûr, le Parti des travailleurs n'a pas attendu la veille du rendez-vous et n'attendra, certainement, pas le jour « j » pour mettre la main à la pâte. Le PT s'est mis à l'heure des élections, bien avant. Mardi, au siège de cette formation ce n'est, certes, pas la fièvre des grands jours, mais le parfum d'une campagne électorale y flotte et se fait plus prégnant parmi les militants. Retour sur une journée pas comme les autres au quartier général de Louisa Hanoune. Juste à l'entrée de l'immeuble sis au 2, rue Belkheir-Belkacem Belfort (El Harrach), une photo de la secrétaire générale et une affiche de la candidate sont accrochées au mur. Les chevilles ouvrières du PT, Ramdane Taazibt et Djelloul Djoudi, sont déjà là, tout feu tout flamme. Dans la salle d'attente, un jeune, le chargé d'accueil, est scotché au téléphone. L'appareil sonne sans arrêt. 10h. Les premiers hôtes arrivent. Une quingénaire, militante, est venue de Tamanrasset remettre une lettre au député Ramdane Taazibt pour ensuite repartir vers le Grand Sud. Ce n'est pas terminé pour le député du PT. Il reçoit, en aparté, deux jeunes. Renseignement pris, ce sont des représentants des militaires à la retraite ou blessés de l'Armée nationale populaire dans le cadre de la lutte contre le terrorisme ou dans des accidents de travail. Ils revendiquent un traitement égal à tous les retraités de l'armée et aussi une indemnité d'invalidité. « Notre engagement, c'est de transmettre ces préoccupations au ministre de la Défense nationale et au Premier ministre », indique Taazibt. Encore une fois, la sonnette de la porte retentit. Ce sont des journalistes. Le duo Taazibt-Djoudi est à la rencontre des représentants des médias. « Ça va être la journée la plus longue », lâche Djoudi. L'alpha et l'oméga d'un programme M. Taazibt explique de manière docte le programme du parti. Il rappelle que celui-ci repose sur des « réponses de fait ». Reste que l'alpha et l'oméga de la politique du PT demeurent « cet audace d'instaurer une deuxième République », cinquante ans après l'indépendance. Une deuxième République basée sur la volonté populaire, la démocratie « véritable », les droits fondamentaux et sur la non-ségrégation entre les citoyens. Une deuxième République qui aura à consacrer une « rupture franche » avec le système du parti unique. Et, bien évidemment, c'est aussi « préserver » les acquis de l'indépendance et « reconquérir » ceux qui ont été « perdus » ces dernières années.Pas la peine de rappeler que l'unité nationale et la souveraineté du peuple sont toujours prégnantes dans les discours de la candidate. Les « fondamentaux » du parti constituent le « creuset » d'un Etat de droit fondé sur des « institutions fortes » et « crédibles », une justice « soucieuse » des droits de l'homme et de la femme. M. Taazibt exprime la « ferme » volonté et la détermination « croissante » et « entière » de Louisa Hanoune à se jeter à « corps perdu » dans la campagne électorale, placée sous le slogan : l'instauration de la deuxième République. Pour cela, la direction du parti table sur un tirage de trois millions d'affiches. Quid du financement de la campagne ? Mais d'abord cette précision de M. Taazibt : partant du principe qu'il ne peut y avoir une indépendance politique sans indépendance financière, le Parti des travailleurs n'a pas de pourvoyeurs de fonds. Comment compte-t-il s'en sortir ? En plus des cotisations et des rentrées militantes traditionnelles, « nous allons solliciter nos amis, petits chefs d'entreprise, pour des dons », explique-t-il. Mais pas n'importe qui : ceux qui « se reconnaissent dans le programme du parti », précise le même responsable. Le parti compte, également, sur ses sympathisants parmi les médecins et les avocats pour renflouer les caisses. « Nous n'allons pas faire une campagne à l'américaine. On va mener une campagne militante. Nous comptons sur l'argumentaire, sur la combativité, sur le militantisme et les convictions des militants et des cadres du parti pour mener une campagne politique », soutient le député du PT. N'empêche, le Parti des travailleurs sera présent dans toutes les wilayas. La réunion de plénum qui s'est tenue le week-end dernier s'est soldée par des recommandations claires. Vu les enjeux de cette élection présidentielle très « importante » et « déterminante » pour l'avenir du pays, notamment par rapport à ce qui se passe « autour de nous » mais aussi par rapport aux « risques de dérapage » qui peuvent intervenir même sur la « scène politique nationale », il y a nécessité d'une mobilisation « massive » et « générale ». « C'est pourquoi nous avons décidé d'aller vers toutes les localités, tous les villages et quartiers, pour présenter notre programme aux Algériens afin qu'ils se mobilisent pour la deuxième République », souligne le membre du bureau politique du PT. « Nous voulons, à l'occasion de cette élection, dialoguer et approfondir les échanges avec la population pour discuter des enjeux de cette situation mais aussi pour construire un rapport de forces qui pourra peser pour l'après-17 avril », poursuit M. Taazibt. Mais il est également question d'utiliser les moyens technologiques modernes que sont Internet et Facebook. À la guerre comme à la guerre Devant des candidats qui se voient déjà favoris de l'épreuve, le PT est déterminé à tirer son épingle du jeu et, pourquoi pas, déjouer tous les pronostics. « Louisa Hanoune ne compte pas jouer le rôle de figurante dans cette élection », lance Ramdane Taazibt. Ses cartes : un capital militant, l'expérience après trois participations, mais aussi et surtout le PT possède à son actif plusieurs victoires ces dernières années, particulièrement concernant la défense du secteur des hydrocarbures, l'arrêt des privatisations et l'augmentation des salaires. D'ailleurs, le parti utilisera ces cartes pour renforcer le camp de la « résistance » et pour que, le 18 avril, l'Algérie sort plus forte avec une « nouvelle ère ». Ramdane Taazibt annonce que l'alternative politique, c'est Louisa Hanoune qui l'incarne. « Aujourd'hui, en termes politiques, en termes de propositions, c'est notre candidate qui a une alternative politique », soutient-il. D'autres arguments : la pasionaria, aux yeux de son lieutenant, possède l'audace qu'il faut et le courage politique. aLouisa Hanoune s'engage à donner un statut officiel à la langue tamazight et qu'elle soit enseignée d'une manière obligatoire dans les 48 wilayas pour renforcer l'unité nationale. Elle a, également, le courage politique de vouloir mettre la religion hors de portée des politiciens et d'abroger la peine capitale, une « peine barbare ». Louisa Hanoune est, aussi, la seule candidate qui se propose de rompre les accords avec l'Union européenne et stopper l'adhésion de l'Algérie à l'OMC. Entre-temps, des « candidats donnent des garanties à l'extérieur », accuse M. Taazibt. Il affirme que ces derniers promettent la remise en cause de la règle 49/51. C'est là, selon lui, une intention manifeste de remettre en cause tous les acquis, à savoir la nationalisation d'ArcelorMittal et la préférence nationale. Les partisans du président de la République n'ont pas échappé à la diatribe du député du PT. « Nous avons appris qu'il y a eu un groupe de travail qui s'est réuni ces jours-ci sur le dossier de l'adhésion de l'Algérie à l'OMC. Mustapha Benbada veut abroger la loi de 2003 sur l'import-export pour l'adapter aux règles de l'OMC qui permettront aux grandes multinationales d'accaparer des marchés et de détruire la production nationale », regrette-t-il. Alors que le Parti des travailleurs propose, selon lui, au peuple algérien, une alternative d'espoir et la reconstruction du pays. « Pas d'invectives... » Pour le Parti des travailleurs, notre pays est bel et bien menacé de l'extérieur avec des « appuis » à l'intérieur. Donc, pour le défendre, il faut une armée de militants qui auront à sillonner, 23 jours durant, le pays. Leurs armes : argumentaire politique, programme ambitieux et détermination pour défendre le pays « qui a tellement souffert ». « C'est plus que légitime pour le peuple algérien d'aller vers la deuxième République pour donner une chance au citoyen de disposer de tous ses doits, politiques, démocratiques et sociaux », soutient la même voix. Ramdane Taazibt rassure, toutefois, quant au respect, par son parti, des règles de jeu. « Nous allons nous abstenir de toute invective, insulte ou violence. Nous allons mener une campagne organisée, disciplinée avec beaucoup de détermination pour convaincre le peuple algérien que le changement est possible et qu'une autre alternative politique est réalisable. Ça sera une campagne saine et propre, loin des discours flasques et sans relief », promet-il. Il regrette qu'en même temps, le parti ait été attaqué par des « personnes » sans motif convaincant. « C'est de leur droit de soutenir un autre candidat, c'est aussi de leur droit absolu de ne pas être d'accord avec nous, mais personne n'a le droit de porter atteinte à l'intégrité politique et morale de Louisa Hanoune et du Parti des travailleurs », met-il en garde. Les contours de la deuxième République seront explicités, sauf changement de dernière minute, dans la wilaya d'Annaba, où la candidate donnera le coup de starter de sa campagne. Pourquoi Annaba ? « Les militants de cette wilaya ont montré leur volonté et leur enthousiasme à recevoir le premier meeting de la SG », explique Ramdane Taazibt. Et de renchérir que c'est aussi un choix symbolique. Car c'est dans cette wilaya que « nous avons réalisé une victoire, irréalisable pour certains, à savoir la nationalisation du complexe d'El Hadjar. « C'est aussi, tonne-t-il, une symbolique pour dire que nous pouvons gagner, nous pouvons vaincre. »