Des actes dans une pièce de théâtre jouée exclusivement par le défunt. A travers un face-face entre Bouguermouh et Mouzaoui, les péripéties du vécu du premier évoquant tour à tour son enfance, son exil en France remontent. Il y a aussi cette incompréhension des autorités de l'époque quant à sa vision du cinéma, notamment « La colline oubliée », qui sera la consécration de sa carrière. A travers le titre de ce film « Mon ami, mon double », d'aucuns avaient pensé que c'était un peu prétentieux de la part du réalisateur de mettre en exergue son amitié avec son interviewé au point de l'assimiler à son double. En fait, c'est une réplique de Bouguermouh pour rendre hommage à sa femme. « On dit souvent à propos de son épouse qu'elle est notre moitié, moi j'estime qu'elle est mon ami, mon double », dira Bouguermouh, dès les premières séquences du film. Ces dernières nous plongent dans un décor qui évoque l'authenticité et surtout les valeurs ancestrales. Elles seront ressuscitées dans l'œuvre littéraire de Bouguermouh « Anza ». Sans transition, le film s'attache à faire revivre les racines, la terre, qui vous ont vu naître. Elles sont l'identité et la culture dont vous ne pouvez vous défaire tant elles vous collent à la peau. La mémoire déroule les souvenirs. Ceux de son enfance à Sétif, dans une maison où les grands noms de la Révolution séjournèrent. Et cette terrible séquence de Bouguermouh, qui avait perdu une sandale avant de la retrouver à côté d'un enfant gisant sur le sol, une balle dans le corps tué par l'armée coloniale lors des événements sanglants du 8 Mai 1945. Puis ce fut l'exil et le début d'une carrière en France où il se lia d'amitié avec Malek Haddad, Mouloud Mammeri et Taous Amrouche. La solitude assimilée à une mort par Bouguermouh : « Terrible est la solitude même si parfois tu l'as choisie, tu te l'es imposée mais cela fait très mal de se savoir seul, toi qui est connu de milliers de personnes, qui connaît des centaines de personnes et partager un tant de choses avec des dizaines d'autres », dira-t-il. Bouguermouh, dans ce film qui montre ses derniers moments, évoque deux Malek très chers. Son frère et son ami de toujours Malek Haddad partis très jeunes. Le film se clôt avec les images du cortège funèbre qui emmena Bouguermouh vers sa derrière demeure dans le cimetière de son village natal. Le film était poignant et vivant. Sa veuve très émue à la fin de la projection dira : « Lorsque les lumières avaient illuminé la salle, je pensais que Dahmane était là avec nous. » Dahmane, comme il le disait, hantait la salle où prirent place aux côtés de Yacine Si-Ahmed (journaliste-anthropologue), Ali Sayad, Saïd Zanoun, Dr Aggoun, El Hadi Ould Ali, le directeur de la maison de la culture. Il est à noter que le réalisateur a tenu à remercier les APW de Bejaïa et Tizi Ouzou, dont le président Hocine Haroun était présent et avait déclaré soutenir tout projet culturel porteur, pour leur soutien financier pour concrétiser ce film qui a nécessité trois années de travail.