En moyenne, 45 Algériens meurent chaque jour à cause du tabac. Un fléau qui tue autant que les accidents de la route. Pis, 7.000 cas d'infarctus du myocarde et 3.000 cas de cancer des poumons sont enregistrés annuellement dans le service pneumologie du CHU Mustapha-Pacha. 7% des enfants scolarisés dans le cycle primaire fument une moyenne de 7 cigarettes par jour, 11% des fumeurs sont des lycéens, 16% des étudiants dont deux tiers de filles. La moitié de ces étudiants révèlent avoir consommé, ne serait-ce une fois, du cannabis. Tels sont les chiffres alarmants avancés par le professeur Nafti, chef du service pneumologie au CHU Mustapha-Pacha, à l'occasion d'une conférence de presse portant sur la lutte contre le tabagisme, tenue hier au centre de presse d'El Moudjahid. Selon le Pr Nafti, « la cigarette est responsable de plus de 25 maladies, dont le cancer, les problèmes cardiovasculaires ». Le professeur n'a pas manqué de rappeler que « vivre avec un fumeur peut développer le cancer des poumons ». Selon lui, « plus de 50% des femmes souffrant d'une forte bronchite sont mariées à des fumeurs ». « L'inhalation de la fumée s'avère plus dangereuse que la consommation de la cigarette », a-t-il averti. Pour atténuer les dangers du tabagisme, le professeur a annoncé la formation de spécialistes dans le sevrage tabagique. « Une cinquantaine de centres ouvriront prochainement pour couvrir l'ensemble des wilayas », a-t-il annoncé. Interdire toute publicité ? « La consultation pour sevrage est assurée au CHU Mustapha-Pacha depuis 2004 mais elle reste insuffisante », a affirmé le Pr Nafti. Le spécialiste pointe du doigt la SNTA. Selon lui, l'entreprise n'a jamais communiqué aux médecins la composition de ses cigarettes. « Un échantillon de cigarettes algériennes a été envoyé à un laboratoire canadien et l'examen a fait ressortir que celles-ci contiennent trois plus de goudron et deux fois plus de nicotine », a précisé le professeur. « Pourquoi n'a-t-on pas une loi antitabac en Algérie ? » s'est interrogé le conférencier. Selon lui, la cigarette est « le produit le plus vendu et le plus toléré en Algérie ». Pour sa part, Hamida Agli, présidente de l'association El Fadjr d'aide aux personnes atteintes de cancer, une série de recommandations a été mise en œuvre par l'association en vue de protéger les fumeurs et les non-fumeurs. Selon elle, « il est urgent d'adopter une loi et d'élargir les lieux d'interdiction de fumer, voire d'éliminer le commerce illicite du tabac ». « Il faut réglementer la composition du tabac, interdire toute publicité directe ou indirecte au sens large (cigarette, chique, narguilé...) et introduire des amendes contre ceux qui ne respectent pas les lieux destinés aux non-fumeurs », a-t-elle proposé. « Le vide éducatif, l'environnement, l'absence de sanction et la démission des parents ont à l'origine de la consommation de tabac », a -t-elle fait savoir. Hamida Agli a rappelé que le décret exécutif 01-285 du 24 septembre 2001 fixe les lieux publics interdits à la consommation de tabacs. La coopération entre l'OMS et l'Algérie s'est soldée par la signature d'un accord le 20 décembre 1962 et la convention de lutte antitabac a été ratifiée par l'Algérie le 30 juin 2006. « La lutte reste insuffisante », a-t-elle déploré.