Le débat sur l'exploitation du gaz de schiste est décidément passionnant. Qu'ils soient pour ou contre, les experts en la matière avancent leurs arguments pour défendre leur position. Abdelmadjid Attar, expert en énergie et ancien PDG de Sonatrach, a qualifié le débat sur l'exploitation ou non du gaz de schiste de « faux » dans la mesure où le recours par le gouvernement aux énergies non conventionnelles est une alternative face à la réduction des réserves des hydrocarbures « qui seront nulles en 2030 » et à « la faiblesse de la production de l'énergie renouvelable, estimée à 40% seulement en 2030 ». « Il y a un sérieux problème de réserve et le vrai débat soit s'orienter vers le changement de l'économie et comment la soustraire des hydrocarbures », a-t-il expliqué au forum de Liberté. « Mais peut-on explorer le gaz de schiste d'ici 2030 ? », s'est-il interrogé en précisant que les recherches de cette ressource ont été entamées sur 11 périmètres seulement, situés au sud-est du pays. A propos des risques de pollution de la couche albienne, Attar a affirmé que la roche qui contient le gaz est située à des milliers de mètres de la nappe phréatique et qu'il n'y a aucun contact entre les deux. Il cite l'exemple de l'exploitation des hydrocarbures pour laquelle l'Algérie a réalisé 12.000 forages qui ont tous traversé l'albienne sans incident majeur à l'exception de celui de Hassi R'mel, il y a des dizaines d'années. Il a démenti également l'hypothèse relative à l'utilisation d'une grande quantité d'eau pour assurer l'extraction du gaz de schiste de la roche. « A l'horizon 2050, nous allons exploiter 2,5 milliards m3 pour les hydrocarbures contre 250 millions m3 pour le gaz de schiste pour 10.000 puits par an, ce qui est insignifiant », a-t-il estimé. Pour Amor Khelif, professeur d'économie et directeur de recherche au Cread, l'exploitation du gaz de schiste ne peut pas être réduite « aux données techniques seulement » car cela relève « de la gestion du patrimoine national et de l'évaluation de 50 ans d'exploitation des hydrocarbures ». Le danger de s'orienter vers cette énergie consiste, selon lui, dans le maintien de l'Algérie dans cette logique sectorielle et cette politique de spécialisation gérée par le plan mondial de l'énergie et les grandes puissances. « Ce plan vise à spécialiser l'Algérie dans le segment de l'exploitation de la matière première, qui est une orientation du 19e siècle », a-t-il mis en garde. Il notre aussi « cette incertitude totale » et « le manque de maîtrise des couts, des techniques et autres » de cette nouvelle stratégie dans le système énergétique international d'où « le repli des entreprises géantes d'énergie sur les réserves conventionnelles ». « Aujourd'hui, nous n'avons aucune garantie sur la maîtrise de cette technologie », a-t-il affirmé. Reste que pour Attar, l'exploration du gaz de schiste ne peut pas constituer « une nouvelle rente pour l'Algérie ». Les raisons ? « Le gaz de schiste sera un appoint seulement aux hydrocarbures car le potentiel n'est pas énorme », a-t-il expliqué. Selon lui, Sonatrach ne va pas investir dans le gaz de schiste puisque les 6 conventions de prospection ont été conclues en partenariat avec des partenaires étrangers qui viendront faire des recherches et des tests à leurs propres frais.