Assurer la sécurité énergétique du pays sur le long terme constitue un axe majeur dans la politique énergétique nationale. Le gouvernement a ainsi opté pour le développement de l'exploitation des énergies non conventionnelles, notamment les gaz de schiste dont les ressources sont sept fois supérieures à celles des gaz conventionnels, d'après les études préliminaires réalisées par les experts de Sonatrach. Les ressources algériennes sont donc «suffisantes», selon Youcef Yousfi, ministre de l'Energie et des Mines, pour prendre le relais du gaz naturel, dont les gisements devraient commencer à décliner à partir de 2030, et du pétrole que l'Algérie pourrait être contrainte d'importer dès 2020. Les ressources en gaz du schiste du Sahara sont, d'après M. Yousfi, connues depuis longtemps. L'intérêt pour ces hydrocarbures non conventionnels s'explique, entre autres, par la nécessité d'assurer la transition énergétique du pays, par la faisabilité technique d'une telle exploitation et par des cours mondiaux élevés. Des démarches ont été donc entreprises et d'autres sont en cours pour le développement des énergies non conventionnelles, notamment les gaz de schiste, comme alternative au pétrole et au gaz. Sonatrach, faut-t-il le rappeler ? a conclu des accords avec des partenaires étrangers pour développer le potentiel national en gaz de schiste et les premiers forages expérimentaux afin d'évaluer ce potentiel sont programmés avant la fin 2012. En avril 2011, le groupe pétrolier avait signé avec le géant pétrolier italien ENI un accord en vue de développer le gaz de schiste en Algérie. En juin dernier, un premier, au sud d'In Salah avec le concours de la Royal Dutch Shell. Le gouvernement prévoit également un amendement fiscal de la loi relative aux hydrocarbures, dans l'optique d'encourager fortement le développement de l'exploration, les partenariats expérimentés en mesure d'apporter leur savoir-faire technologique ainsi que de permettre à Sonatrach de développer les importantes ressources non conventionnelles dont dispose l'Algérie. Selon le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, relayé par le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, la nouvelle loi sur les hydrocarbures, en cours de préparation, ouvrira, la voie à l'exploitation des gaz de schiste.
Le gouvernement décidé, les écologistes réticents Le gouvernement semble donc bien décidé à exploiter les ressources d'hydrocarbures non conventionnelles dont la méthode d'extraction fait débat dans le monde développé. Des pays comme la France, la Pologne ou la Chine se préoccupent déjà de l'impact environnemental de l'extraction du gaz de schiste. En Algérie, les écologistes ont exprimé leurs appréhensions quant à la menace que risquent d'engendrer ces gaz sur l'environnement. «La démarche du gouvernement fait peser un réel danger sur les ressources hydriques non renouvelables des aquifères albiens du Sahara», affirment-ils, ajoutant que la nappe albienne, qui constitue une réserve essentielle pour le Sahara, risque d'être contaminée et perdue. Mais d'après Ali Hached, conseiller du ministre de l'Energie et des Mines, «une réglementation et des normes très strictes, notamment en matière de protection de la nappe phréatique, entourent l'exploitation du gaz de schiste». L'exploitation par l'Algérie du gaz de schiste - controversé en Europe - ne constitue pas une menace pour l'environnement dans la mesure où il s'agit de zones désertiques inhabitées, a précisé Ali Hached, au 17e Congrès international du gaz et de l'électricité, qui s'est tenu dernièrement à Paris. Des propos soutenus par M. Ahmed Mechraoui, conseiller du ministre de l'Energie, qui a tenu dernièrement à assurer que «rien ne se fera sans la prise en compte de l'environnement». Il a aussi affirmé que les contrats doivent, à l'avenir, prévoir des «garde-fous » ainsi que des contrôles menés par des organes indépendants pour vérifier que l'exploitant respecte les normes légales en matière de protection de l'environnement.Le gaz de schiste constitue, estime M. Hached, une véritable révolution technologique qui va sans doute donner une nouvelle configuration à l'industrie mondiale du gaz. Il est donc naturel pour l'Algérie de se placer dans cette dynamique et de se doter des moyens institutionnels, humains et technologiques afin de saisir toutes les opportunités pour valoriser son important potentiel en hydrocarbures. Le développement des gaz de schiste en Algérie est ainsi «possible», selon l'ancien ministre algérien de l'Energie et consultant international, Nouredine Aït Laoussine. Néanmoins, cela doit être considéré comme un objectif à long terme. C'est-à-dire, lorsque les conditions techniques et économiques seront réunies, explique-t-il dans une interview en ligne au groupe international CWC, organisateur d'événements énergétiques, basé à Londres. «La reproduction du succès américain dans l'industrie des gaz de schiste requiert un transfert de la technologie des compagnies pétrolières internationales, une régulation favorable et un cadre d'investissement», ajoute-t-il. Se disant favorable à l'exploitation des gaz de schiste, M. Aït Laoussine relève que le plan lancé par le gouvernement algérien pour remplacer les réserves d'hydrocarbures non renouvelables, «vise à intensifier l'investissement dans les hydrocarbures conventionnels et non conventionnels, aussi bien dans les régions déjà exploitées que dans celles encore inexplorées. Pour exécuter ce plan, le groupe Sonatrach avait porté ses prévisions d'investissement de 65 milliards de dollars à 80 milliards de dollars d'ici à 2016, rappelle à ce propos le consultant pétrolier. L'ancien P-dg de Sonatrach, s'est, quant à lui, prononcé sur l'option gaz de schiste retenue par le gouvernement Sellal pour développer nos réserves hydrocarbures. Il avance différents arguments en faveur du développement de ces ressources non conventionnelles. «Il est nécessaire de développer les gaz de schiste en Algérie, parce qu'il s'agit aujourd'hui de préparer non pas la pérennité de la rente, mais l'indépendance énergétique du pays dans quelques décennies seulement». Le monde entier, selon ce responsable, est en train de travailler sur une transition énergétique vers de nouvelles ressources qui comprennent aussi les renouvelables (solaire, éolien et autres), et bien sûr un nouveau modèle de consommation basé sur l'économie d'énergie surtout. Les pays d'Amérique du Nord y travaillent depuis plus d'une décennie et ont réussi à le rendre techniquement exploitable même si, pour le moment, son coût d'exploitation demeure très élevé, souligne t-il. Appelé également «gaz de roche-mère» ou «gaz de shale», le gaz de schiste est généré par la décomposition d'argile riche en matières organiques, et extrait à partir de terrains marneux ou argileux. Contrairement au gaz naturel, ce gaz est piégé dans les roches poreuses qui le produisent, et il est nécessaire de détruire la structure de ces roches pour pouvoir le récupérer. B. A.