Né à Séville en 1126, Sidi Boumediene fut un ascète et un mystique dont l'âme s'élevait continuellement vers le ciel. Il parcourut les terres musulmanes, faisant des miracles et prêchant aux hommes l'inanité des biens du monde, le mépris de notre courte vie terrestre, le respect du Coran et l'amour de Dieu. Se trouvant à Bougie, des envieux le dénoncèrent au sultan almohade Yakoub El Mansour. Mandé à Tlemcen par ce prince, il partit ; mais ses jours étaient comptés. A quelques bornes de la ville, il se sentit mourir ; alors il contempla une dernière fois ce monde qu'il avait tant méprisé et, près de le quitter, le trouva beau sans doute, car, apercevant au loin les pentes boisées d'El-Eubbad, il en vanta le charme et les élit pour site de son tombeau. Le vœu de Sidi Boumediene fut exaucé. Depuis, sa tombe devint un lieu de pèlerinage. Les pieux monuments de Sidi Boumediene comprennent le tombeau du saint, une mosquée et une medersa. Plus bas, à leur ombre, se trouvent les ruines d'une demeure, petite mais jadis très ornée, qui appartint, dit-on, aux souverains du Maghreb. Le chemin qui y mène n'a pas changé depuis des ans. A droite se trouve la mosquée en contre-haut ; à gauche, le tombeau du saint en contrebas. Pour y accéder, on descend d'abord un escalier d'une dizaine de marches, rampant et tortueux, qui mène à une courette, bordée de galeries étroites dont quelques colonnes grêles soutiennent les arceaux. Dans un angle se trouve un puits très vénéré des fidèles. La margelle d'onyx, amincie, usée, porte des stries profondes, traces des chaînes et des cordes dont les pèlerins se servent depuis des siècles pour puiser l'eau miraculeuse. L'onyx a pris des tons d'une blancheur neigeuse. On dirait, à la voir ainsi dentelée, une margelle de glace demi-fondue aux rayons du soleil, puis reprise par un gel subit. Le tombeau « Dharih » se trouve dans une pièce à coupole, mal éclairée par des vitraux de couleurs criardes. Le bas des murailles est garni de faïences communes ; plus haut courent des arabesques de plâtre, exécutées sans art et grossièrement peinturlurées. Deux châsses occupent le fond de la pièce : celle de Sidi Boumediene et celle d'un autre personnage, également vénérable. Ainsi l'exigent les coutumes du pays. Dans les hypogées maugrebins, tout grand marabout doit partager ses honneurs funéraires avec un compagnon de sépulcre. Devant les châsses s'élève une cloison, sorte d'iconostase, ornée de grands étendards en faisceaux. La décoration générale est laide, les châsses sont couvertes d'oripeaux. En outre, toute une série de décors donne au tombeau l'air d'une friperie orientale. Ce sont entre autres une horloge normande dans sa haute boîte peinte ; des lustres dont les pendeloques de cristal s'effilochent ; des lanternes carrées garnies de verres multicolores ; une suspension de salle à manger et sa lampe à pétrole ; des glaces communes serties de cadres dorés ; d'affreuses images rapportées de la Mecque ; enfin beaucoup d'œufs d'autruche accrochés çà et là. De l'autre côté de l'allée, devant la mosquée, s'élève un haut portail décoré de faïences comme celui de Sidi el-Haloui, mais plus magnifique encore et d'une plus riche fantaisie. Il précède un large perron, abrité par une coupole. Des revêtements de plâtre, ciselés avec un art infini, garnissent les voussures d'innombrables stalactites, et, plus bas, forment des panneaux d'arabesques sur les murailles qui soutiennent la coupole. Une grande porte en cèdre, toute bardée d'ornements de cuivre en losanges, marque le seuil même du temple. Les vantaux de cette porte furent, dit-on, ouvragés en Espagne et offerts par un riche infidèle, prisonnier des pirates barbaresques, comme prix de sa rançon. Le vaisseau qui les portait fit naufrage ; mais la mer ne voulut point engloutir ces merveilles et le flot les déposa doucement sur le rivage. A l'intérieur, la mosquée de Sidi Boumediene ressemble beaucoup à celle de Sidi el-Haloui. Les jours de fête, de nombreux pèlerins viennent à Sidi Boumediene ; leur présence anime le sanctuaire, lui donne toute sa couleur, tout son cachet. Les uns, prosternés, recueillis, émus, prient devant le mihrab ; d'autres devisent, pensent, dorment sous les voûtes allongées des portiques ; d'autres encore font leurs ablutions. La cour de la mosquée est à peu près carrée. La salle de prière est formée de cinq nefs supportées par des piliers maçonnés. Les murs sont couverts d'arabesques en plâtre. Une coupole ajourée, garnie de vitraux de couleur, couvre la travée qui précède le mihrab ; celle du mihrab est à stalactites. On franchira les 92 marches qui conduisent à la plateforme du minaret aux élégantes proportions et d'une riche décoration céramique. De là tout Tlemcen s'étend aux pieds. Une vue splendide. Sidi Boumediene est une référence et un symbole, il a combattu auprès de Salah Eddine, il a redynamisé la voie du Prophète (QSSSL)... Sidi Boumediene nous a appris comment vivre ensemble outre les valeurs extraordinaires... Et comme l'avait souligné Zaim Khenchalaoui : « Sidi Boumediene figure parmi ceux qui furent à l'origine du fondement du soufisme en Andalousie et dans le Maghreb. Il fut l'un de ceux qui ont tracé les routes de la foi pour l'humanité à travers le monde ». Depuis des années, rien n'a changé au sein de cette mosquée restaurée lors de la manifestation Tlemcen capitale de la culture islamique 2011. Elle est très visitée par les touristes. Mohamed Medjahdi Sources : *Tlemcen et sa région 1921 : Livret-Guide publié par le syndicat d'initiative de Tlemcen * OranTlemcen Sud Oranais 1899-1900 de A. CREPIN-LEBLOND.