Le séisme du vendredi 1er août a remis au goût du jour la sempiternelle problématique du vieux bâti, notamment dans l'Algérois. Et relancé l'urgence de l'éradication de l'habitat précaire. Certes, les décès enregistrés sont le fait de la panique mais les dommages causés à nombre d'habitations, en raison de leur fragilité, est symptomatique de l'état de délabrement des vieilles bâtisses. Si par malheur, la magnitude a été plus élevée, une autre catastrophe se serait ajoutée à celle de 2003 qui a englouti 3.000 vies humaines, causé des dizaines de milliers de blessés et réduit en ruines des milliers d'habitations. Pourtant, les signes d'une décrépitude ne manquent pas dans les vieux centres urbains. A Alger, des morceaux de balcons ont plusieurs fois chuté sur la tête de passants. Faute d'entretien et de rénovation, des édifices menacent ruine aujourd'hui. La peinture écaillée visible sur toutes les façades cache une profonde vétusté. Le constat est partagé par tous. Et la prise de conscience quant à la nécessité de restaurer ou de rebâtir ne fait pas défaut. Les statistiques indiquent que 17% des constructions en Algérie sont des ouvrages historiques dont certaines datent de la période ottomane, 13% du patrimoine immobilier est classé dans la catégorie « ancien » et la moitié des constructions d'avant 1954 a besoin d'une réhabilitation. Il semble que l'intervention des pouvoirs publics, dans le cadre des programmes de réhabilitation, bute sur un écueil d'ordre juridique. Les biens immeubles sont tantôt la propriété de l'Etat, du privé ou sont en copropriété. Cela retarde le travail, le financement des projets de réhabilitation devant être adossé à un propriétaire défini. Cet aspect caractérise le bâti de l'essentiel des villes algériennes, Annaba, Alger, Constantine et Oran... qui ont fait l'objet d'un diagnostic. L'enseignement majeur du tremblement de terre de 2003 a fait adopter un règlement parasismique qui semble avoir conforté les nouvelles constructions. Selon le président du Conseil national de l'Ordre des experts architectes, Djamel Chorfi, les contrôles effectués sur les bâtiments de l'Agence d'amélioration et de développement du logement de H'raoua et les sites de l'Office de promotion et de gestion immobilière d'Alger, ont démontré une résistance à l'activité sismique. Ce qui lui fait dire que « l'activité sismique enregistrée récemment a permis de confirmer l'efficacité des normes parasismiques adoptées dans les nouvelles constructions ». Le défaut de la cuirasse serait donc dans le vieux bâti en retard d'une guerre dans le processus de restauration. Le dernier tremblement de terre d'une magnitude de 5,6 sur l'échelle ouverte de Richter a révélé le grand écart entre ce qui est fait et ce qui devrait l'être. Des logements en attente d'expertise depuis 2003 sont de nouveau menacés de s'écrouler. Les équipes du contrôle technique des constructions, chargées d'expertiser près de 2.000 logements à Bab El Oued, La Casbah, Belouizdad et Bordj El Kiffan, ont conduit à la conclusion qu'il est impératif de reloger leurs occupants. Le contrôle en cours ne manquera pas de mettre en lumière de potentiels dangers d'effondrement en cas de secousse importante. Des opérations similaires se poursuivaient dans les quartiers de Bologhine, Alger-Centre et Hussein-Dey, notamment relatives aux vieilles bâtisses implantées sur le Front de mer. Tandis que l'Ordre national des experts architectes élargirait son activité aux autres wilayas sur la base des informations fournies par le Centre de recherche en astronomie, astrophysique et géophysique. Le ministère de l'Habitat, qui aura à recenser le manque à gagner, a du pain sur la planche au regard de l'étendue des retards à combler. Et des brèches à colmater. Le séisme de la matinée du vendredi aura servi, en ce sens, d'électrochoc.