Assurément, la célébration de la Fête du bijou à Beni Yenni, du 7 au 15 août, reflète tout l'intérêt devant être porté à l'artisanat algérien, sous toutes ses formes, tenant compte de ce qu'il reflète en termes d'histoire et de culture économique et sociale. L'artisanat algérien a tenu une très grande place en termes économiques, également en tant que repères socioculturels. Les tapis du Guergour, du M'zab, des Aurès, d'Aflou et de Tlemcen avaient leur place sur le marchés international. De même, les bijoux des différentes régions d'Algérie n'ont cessé de susciter l'intérêt des amateurs et des collectionneurs tout en attirant l'attention de chercheurs et historiens, même les poteries n'échappant pas à ces derniers. Et si le monde moderne tend à reléguer en un lointain classement les productions artisanales, fort nombreux sont en différents pays les artisans qui ne démordent pas du métier traditionnel. Ces résistance et présence professionnelles méritent d'être reconnues et soutenues à plus d'un titre... Cette fête du bijou organisée par les artisans de Beni Yenni est à la mesure de leurs ambitions d'autant que n'est pas manqué de signaler le nouvel intérêt accordé par le gouvernement aux artisans, d'une façon générale, plus particulièrement lorsqu'il s'agit d'activités aux spécificités culturelles marquantes telles celles des bijoutiers de Beni Yenni dont la renommée n'est plus à faire. Il faut savoir qu'à Beni Yenni la technique de fabrication des émaux filigranés est une spécialité exclusive de cette région de Haute-Kabylie où l'artisan continue de travailler avec l'outillage et les procédés traditionnels. Dès lors, la création et la fabrication d'un bijou relèvent du grand art et de la passion, car l'artisan est tout autant transformateur de matière, créateur et réalisateur, il doit savoir fondre, marteler, dessiner, découper, ciseler, graver et souder tout en ayant une idée précise des proportions et du décor... Et c'est tout dire de cet art, sachant que les procédés de fabrication en zone rurale, dans les montagnes et dans le Sud ont subi peu de changements depuis les temps les plus reculés. Cet art, concernant la fabrication des bijoux, est très ancien en Kabylie, et en 1880, à travers une première approche, on y enregistrait 138 ateliers d'orfèvres et d'armuriers. Si la tradition de l'orfèvrerie s'est conservée dans de nombreux villages, il demeure que le centre de fabrication le plus important est constitué par les petits villages célèbres par leurs bijoux d'argent ornés de cabochons de corail et surtout par la technique des émaux filigranés, technique savante dont on pense qu'elle aurait été introduire au 15e siècle par les émigrés andalous ayant rejoint le royaume de Bejaïa... Technique réfugiée au fil du temps chez les Beni Yenni où les artisans la conservent jalousement, transmettant leurs connaissances et leur art de père en fils. Des bijoux de Beni Yenni ayant tous une signification particulière quant aux raisons de leur port, nous dirons brièvement que les parures sont en argent massif et que la polychronie des émaux croise l'éclat discret des coraux. Cela étant, le filigrane en demeure l'élément essentiel, dessinant des chevrons, des lignes brisées et des figures géométriques simples, si ce ne sont, parfois, des lignes ondulées ou festonnées. L'originalité des bijoux de Beni Yenni aura dépassé depuis longtemps, les frontières du pays, entrant dans la mode du temps, en 1963, aussi bien dans certaines capitales européennes qu'à Ottawa et Montréal, au Canada... Auront été pour beaucoup, dans ce succès, les granules d'argent s'ajoutant au décor filigrané, le corail rehaussant de sa couleur chaude le reflet mat de l'argent. Enfin, l'éclat des émaux, bleu, vert et jaune. Fabriqués par des procédés simples et, très souvent un matériel archaïque, les bijoux de Beni Yenni n'en finissent pas de réjouir les regards toujours présents dans l'histoire et la culture algériennes.