Le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, 52 ans, s'est rendu, hier, à La Haye, Pays-Bas, pour être entendu aujourd'hui à « titre personnel et non en qualité de président » par la Cour pénale internationale. C'est la première fois que la CPI reçoit un chef d'Etat en exercice. « Pour protéger la souveraineté de la République du Kenya » il a fait usage d'un article de la Constitution kenyane jamais utilisé auparavant. Cet article lui permet de nommer durant son séjour aux Pays-Bas son vice-président, William Ruto, « président en exercice ». Convoqué dans le cadre du procès sur les violences post-électorales de fin 2007-début 2008, qui ont fait plus de 1.200 morts et 600.000 déplacés, le président kenyan est soupçonné d'être pénalement responsable en tant que co-auteur indirect de meurtre, transfert forcé de population, viol, persécution et autres actes inhumains. Il a annoncé, lundi dernier, qu'il se rendrait à la convocation de la Cour pénale. « J'assisterai à titre personnel » à l'audience sur un éventuel report du procès, déclare devant les parlementaires des deux Chambres à Nairobi, le président kenyan. « Il ne sera pas dit que j'assisterai à la conférence de mise en état en tant que président du Kenya », leur dit-il, « et rien dans mes fonctions ou mes devoirs de président ne justifie ma présence au tribunal ». Kenyatta a comparu une fois devant la CPI, avant son élection à la magistrature suprême en mars 2013. Il ne s'est jamais rendu à La Haye depuis son accession à la présidence. Son procès a été reporté à plusieurs reprises notamment en raison de la rétractation de témoins. Le procès de Ruto, lui aussi accusé de crimes contre l'humanité dans le cadre de ces violences, s'est ouvert le 10 septembre 2013. La CPI a exigé la « présence physique » de Kenyatta à l'audience d'aujourd'hui, qualifiée de « stade crucial de la procédure ». Le procureur Fatou Bensouda a dénoncé le « manque de coopération » de Nairobi. « Le gouvernement kenyan ne va pas nous donner ce que nous demandons », affirme Ben Gumpert, représentant du bureau du procureur. « La seule conclusion qui s'impose (...), c'est que si la Cour estime que nos arguments sont les bons, elle devrait rendre une décision établissant la non-coopération du gouvernement du Kenya », dit-il. Nairobi dément. L'Union africaine estime que les personnalités en fonction ne devraient pas être poursuivies par la CPI.