Bien assis sur le secteur de la vente en ligne qu'il domine largement, notamment sur les marchés porteurs, comme celui des Etats-Unis, Amazon donne des signes d'impatience pour en finir avec le marché de la vente des livres électroniques qu'il entend verrouiller pour couper l'herbe sous les pieds de toute concurrence. Pour y parvenir il est prêt à tout pour imposer sa loi et, surtout, la faire admettre par ceux qui lui tiennent tête, en particulier l'éditeur français Hachette, cible, durant cet été, de multiples attaques d'Amazon qui tente différents stratagèmes pour le faire infléchir sur sa politique des marges. C'est ainsi que la presse internationale rapporte, avec de grandes pointes d'étonnement la trouvaille d'Amazon qui a rendu publique l'adresse email du patron du groupe Hachette, l'a transmise à ses utilisateurs en les incitant à faire pression sur lui pour accepter de faire baisser les marges de vente des livres électroniques comme le souhaite Amazon. Le site de l'hebdomadaire français lepoint.fr qui a rapporté la nouvelle, parle d'une lettre adressée par Amazon via le site www.readersunited.com dans laquelle il maintient son engagement, voire même son « combat pour des prix de livres électroniques raisonnables », convaincu selon la même source « que rendre les livres accessibles est bon pour la culture. » Dans ce combat le marchand en ligne américain en appelle à l'aide de ses usagers qu'il exhorte à se joindre à cette lutte, notamment en écrivant à « l'adresse électronique de Michael Pietsch, le directeur général de Hachette Publishing Group » pour lui demander de cesser de maintenir les marges trop hautes sur le commerce du livre électronique. A titre d'inspiration, Amazon suggère à ses « troupes » de commencer par s'en prendre à Hachette coupable, à ses yeux « d'entente illégale » pour tirer les marges vers le haut, et leur fournit même des « éléments de langage », une sorte de prêt à penser qui leur ferait dire, poursuit lepoint.fr, « nous avons remarqué votre entente illégale. S'il vous plaît, arrêtez de tout faire pour faire payer trop cher les livres électroniques ». A l'occasion, le site de vente en ligne américain n'oublie pas de rappeler les termes de son combat, qui a connu une nouvelle escalade durant cet été, avec l'éditeur Hachette, et qui reposent sur l'argument d'une défense « de prix plus bas pour les livres électroniques » car à ses yeux, ils « peuvent et doivent être moins chers », au motif que leur modèle économique n'englobe « plus de coûts d'impression, de stockage ni de livraison. » La bataille menée actuellement par Amazon vise à faire réduire le prix des livres électroniques à « un prix unique à 9,99 dollars pour la plupart des livres électroniques, contre de 12,99 à 19,99 dollars actuellement ». Ce coup de tête d'Amazon vient quelques jours après la publication d'une lettre dans laquelle pas moins de 900 auteurs ont signé une pétition invitant le marchand américain Amazon à cesser « les hostilités » avec l'éditeur Hachette. Cette pétition qui a eu la signature d'auteurs à succès célèbres, à l'instar John Grisham ou Stephen King, devait ensuite être relayée sur une plein page par le quotidien le New York Times. Les signataires se tiennent à distance des deux belligérants, mais refusent de voir leurs œuvres prises en otage à cause de conflit. Les auteurs ont ainsi réagi à un nouvel épisode du conflit inauguré par Amazon qui a décrété, une quasi mise sous embargo des œuvres éditées par Hachette. Le quotidien économique français s'en est fait l'écho et rapporte que les admirateurs d'Harry Potter « n'en croyaient pas leurs yeux : ceux qui avaient commandé le nouveau livre de J. K. Rowling sur le site d'Amazon se sont vus notifier des délais de « un à deux mois » avant la livraison. Le même sort a été réservé ces deux derniers mois à quelque 5.000 bouquins publiés par Hachette, affirme la maison d'édition. » Du coup de nombreux auteurs ont écrit au patron d'Amazon, Jeff Bezos pour dénoncer cette prise en otage de leurs livres dans le cadre d'un conflit qui l'oppose à ses fournisseurs, notamment Hachette et un éditeur allemand, la maison Bonnier dont le quotidien français dit qu'elle « pâtit des mêmes mesures de rétorsion : nombre de ses ouvrages sont livrés par Amazon avec plusieurs semaines de retard. » Même si rien n'a filtré des termes de négociations restées secrètes, le quotidien français lesechos.fr, croit savoir, sur la bas de rumeurs ayant circulé à ce propos, « qu'Amazon souhaite porter de 30 % à 50 % la commission qu'elle prend sur la vente de livres électroniques. Pour un livre vendu à 12 dollars, Hachette ne toucherait donc plus que 6 dollars, au lieu de 8,40 dollars aujourd'hui. » En jouant de la sorte, Amazon sait qu'il s'attire les foudres de nombreuses parties mécontentes, à l'image de la vedette de télévision américaine Stephen Colbert qui « a ainsi provoqué un gros buzz aux Etats-Unis en comparant le P-DG d'Amazon à Voldemort, un personnage incarnant le mal dans la saga « Harry Potter » », d'après lesechos.fr qui rapporte également l'avis de Davia Temin, une spécialiste des médias, travaillant à New York, qui estime que cette « stratégie est d'autant plus risquée pour Amazon qu'il a bâti sa première audience autour des livres ». Dans une démarche qui ressemble beaucoup à un coup de communication, en vue d'atténuer ces mauvais effets sur son image, le marchand en ligne américain, a tenté de charmer son monde en jetant un pavé par une proposition jugée par leschos.fr, de « machiavélique », suggérant « que les auteurs récoltent 100 % du produit des ventes numériques, et que ni lui ni Hachette ne touchent le moindre dollar, le temps de régler leur querelle. » Et c'est naturellement qu'Hachette a rejeté le piège tendu par Amazon, car, poursuit le quotidien économique français, « un tel pacte l'aurait pénalisé bien davantage que son adversaire, qui réalise près de 75 milliards de chiffre d'affaires, dont une part de plus en plus faible grâce aux livres. » Tout le monde a eu en tête la puissance financière d'Amazon, tirée essentiellement du commerce en ligne, et qui peut, selon de nombreux observateurs, lui permettre de nourrir et de tenir un tel bras de force durant une longue période. Les conséquences de son geste importent apparemment peu, pour Amazon soucieux de donner l'image d'une entreprise défendant les intérêts des auteurs, et aussi de passer sous silence son emprise sur le marché du livre où il règne sur « 30 % des ventes physiques aux Etats-Unis, et 60 % des livres électroniques ». En Europe son implantation est différemment accueillie. Alors que les éditeurs allemands se liguent contre l'invasion des méthodes de vente Amazon, en France le combat est beaucoup plus acharné. Soucieux de préserver un modèle d'exception culturelle française, traduit par la politique du prix unique du livre, les pouvoirs publics ont été amenés, en début d'année à promulguer une loi dite « anti Amazon », interdisant le cumul de la gratuité de la livraison et des réductions promotionnelles. Une loi que le marchand américain se fait un malin plaisir à contourner par de multiples entourloupettes. Pour autant, l'agitation médiatique et marketing d'Amazon peut constituer une illustration de difficultés de son modèle économique qui souffrirait, selon le site www.actualitte.com d'une « sérieuse épine dans le pied par rapport aux commerces traditionnels. » La présence exclusivement virtuelle du marchand serait ainsi une source de « préoccupation » ajoute ce site qui explique, en effet, que « suffisamment détesté pour se voir interdire l'accès à des magasins partenaires, le site n'a pas ménagé, et ne ménage toujours pas ses efforts pour s'implanter dans le monde physique. » Alors qu'il n'a pas encore réussi une pénétration des circuits physiques de la distribution, Amazon est conscient du coût d'une telle entreprise sur ses finances, puisque « l'ouverture de magasins propres, et les loyers nécessaires, pèseraient un peu plus sur les finances du site », ajoute actualitte.com qui note qu'Amazon « retarde en effet le paiement de dividendes à ses actionnaires, en raison d'un manque de liquidités flagrant. » Sa propension à vouloir un peu trop tirer sur les marges vers le bas le prive de matelas financiers susceptibles de rassurer des investisseurs en mal de dividendes. En plus des difficultés inhérentes à son modèle économique, Amazon devra également faire avec la concurrence rude qui se profile sur le marché du livre électronique, et notamment affronter une nouvelle alliance de poids sur ce segment ; celle du géant de la recherche sur internet, Google avec les librairies Barnes&Noble qui promettent de « livrer en moins de 24 heures les ouvrages commandés sur l'appli Google Shopping Express », selon le site www.lesechos.fr qui rapporte l'information selon laquelle, depuis le jeudi 7 aout dernier, « les acheteurs de livres à Manhattan, Los Angeles et dans la baie de San Francisco, peuvent recevoir les ouvrages commandés auprès des librairies locales de Barnes & Noble dans la même journée, grâce à l'appli Google Shopping Express. » De son côté Google n'exclut pas de voir ce service élargi « aux quartiers de Brooklyn et du Queens », ajoute le même site qui souligne qu'avec cette nouvelle alliance, la liste des partenaires commerciaux de Google s'enrichit pour atteindre 19 au total. Les observateurs ont vite fait de mettre en exergue les motivations conjointes des deux partenaires pour faire face à Amazon. Du côté du libraire Barnes&Noble, les affaires ont commencé sérieusement à coincer depuis « l'arrivée des services de livraison express à bas coût offerts par Amazon », avec une chute des ventes et de la fréquentation des sites de vente physiques, au point, souligne le journal leschos.fr que « le libraire a fermé 63 magasins au cours des cinq dernières années. » Quant à Google, il s'agit essentiellement de préserver son avance sur le marché publicitaire pour lequel Amazon constitue un concurrent sérieux qu'il est plus indiqué d'attaquer sur son marché propre de la vente par correspondance, pour ne pas avoir à l'affronter plus tard sur le terrain de Google, celui de la publicité en ligne.