Quelque 40 des 82 millions d'Egyptiens se rendront aujourd'hui aux urnes pour renouveler le Majliss el-Chaab, une assemblée composée de 518 députés, dont 74 sièges sont réservés : 10 seront pourvus par le président Hosni Moubarak et 64 aux femmes. Aucun analyste ne doute d'une victoire des 700 candidats Parti national démocratique (PND) de Moubarak à ce scrutin supervisé dans les 254 circonscriptions par une Haute commission électorale de 11 membres, dont 7 nommés par le Parlement et dont le 2e tour est prévu le 5 décembre prochain. Selon eux, le PND qui a refusé la présence d'observateurs internationaux et des ONG, n'acceptera pas de descendre sous le «seuil » des deux tiers, soit la reconduction de ses 417 députés, lors de ces législatives, prélude à la présidentielle de 2011. Moubarak ne veut pas, à un an de cette élection à la magistrature suprême, permettre aux Frères musulmans, un mouvement interdit depuis 1982 mais toléré, qui ont « présenté » 130 candidats de s'imposer comme lors des législatives de 2005 où ils ont glané 88 sièges. Comment éviter un remake de la « surprise » de 2005 ? En discréditant les « Frères » qui participent à un scrutin boycotté par l'opposition, procédant à l'arrestation de quelque 250 d'entre eux, suspendant leurs candidats dans 24 circonscriptions à Alexandrie et dans le delta du Nil et invalidant ceux qui se feraient élire comme « indépendants ». Les analystes accordent aux «Frères» entre 15 et 20 sièges. Tout en ayant le regard fixé sur le taux de participation - 20% seulement des électeurs ont retiré leurs cartes-, et les risques de violence, le Raïs, qui a été mis dans l'embarras par George W. Bush–c'est lui qui l'aurait convaincu que Saddam Hussein possédait des armes bactériologiques et chimiques– veut hisser le Wafd, un parti laïc associé à la conquête de l'indépendance nationale dans les années 1920 qui dispose de 6 sièges dans l'Assemblée sortante, au rang de principal bloc d'opposition. Le PND sait que son candidat en 2011 (Hosni Moubarak ou Gamal son fils, le général Omar Suleïman, le patron des services de sécurité ou Amr Moussa, l'actuel chef de la Ligue arabe) pourrait se retrouver en face de Mohamed El-Baradei qui milite pour une démocratisation de l'Egypte. L'ancien patron de l'AIEA et Nobel de la Paix qui a le soutien de Kefaya, al-Ghad et le Front démocratique–trois partis qui boycottent ces législatives–pourrait compter sur les voix des « Frères ». D'où la volonté manifeste du Caire de barrer la route à ceux qui souhaitent prendre les clés du pouvoir par les urnes sans aucun engagement de les remettre. «Toute pression est susceptible de provoquer un renversement du système de séparation de la religion et de l'Etat au profit d'un Etat religieux», prévient Fathi Sorour, le président de l'Assemblée, dans une allusion à peine voilée aux Etats-Unis et ONG internationales qui évoquent les pressions que « subissent » les islamistes.