Selon les cotations publiées par la Banque d'Algérie, le cours moyen de la monnaie nationale est établi, dans le marché officiel des changes, à 96 DA pour un dollar américain alors qu'il se situait à 79 DA il y a quelques mois. Une question se pose : quel est l'impact de ce glissement sur l'économie nationale ? L'expert dans le domaine des finances, Abderrahmane Benkhalfa, ex-délégué général de l'Association des banques et établissements financiers (Abef), tient d'abord à expliquer que ce décrochage de la monnaie nationale n'est pas une dévaluation, « car une telle mesure devra faire l'objet d'une décision politique ». En fait, l'expert lie ce glissement à la fluctuation du dollar américain. « Le flottement de la monnaie américaine est ressenti dans le marché mondial, ce qui fait que son appréciation a un impact non seulement sur le dinar mais aussi sur les autres monnaies, y compris l'euro », note-t-il. Selon Benkhalfa, la parité du dinar a été toujours actualisée par rapport à ce flottement des principales devises. « La gestion d'une monnaie doit prendre en compte la parité internationale des autres monnaies. C'est à partir de là que l'impact d'une appréciation ou d'une dépréciation d'une monnaie peut être mesuré », souligne-t-il. En clair, l'économie nationale est rattachée à plusieurs monnaies principalement le dollar et l'euro et avec moins d'incidence pour la livre sterling ou le yen japonais. Aussi, les effets de ces fluctuations obéissent à beaucoup de paramètres. « Les recettes de l'Algérie sont en dollar, mais la majorité de ses dépenses se font en euro », observe Benkhalfa. Aussi, la parité entre ces deux monnaies est un élément principal pris en compte dans la politique économique nationale. « Quand le dollar s'apprécie, la conversion des recettes en dinar suit le cours et donc elles augmentent elles aussi. Cela induit une quantité de dinars plus importante et donc un gain monétaire par rapport à ce qui était enregistré avant l'appréciation du dollar. Mais si ces dinars sont transformés en euros dans le cadre des opérations d'importation, le gain sera perdu », précise-t-il. En fait, ce que l'Algérie va gagner en recettes transformées en dinars, elle le perdra dans ses dépenses faites en euros. Pour Benkhalfa, plusieurs aspects doivent être pris en considération, à savoir la nouvelle parité dinar-dollar ainsi que la parité dinar-euro, le volume des importations et la structure de la composition des règlements à l'étranger. « Nous devons savoir ce que nous réglons en euro et en dollar pour mesurer l'impact global », indique-t-il. On en vient donc aux prix sur le marché interne. Car si pour les produits de première nécessité, « l'inflation importée est supportée automatiquement par le Trésor public », pour les produits semi-finis importés non subventionnés, la fluctuation monétaire est supportée par les entreprises. Par contre, concernant les produits finis, l'impact sera ressenti sur le marché local puisque les prix vont automatiquement augmenter. Mais pour l'ancien responsable de l'Abef, tout n'est pas négatif. Cette situation permettra « de diminuer les importations et donc les sorties en devises et d'avantager la production nationale ». Une situation qui favorise la production nationale, selon le patronat Un avis que soutient Redha Hamiani, membre du Forum des chefs d'entreprise (FCE). « Les conséquences du glissement du dinar ne sont pas désastreuses par rapport à l'inflation. Celle-ci sera beaucoup plus mesurée et restreinte », estime-t-il. Rappellant que 60% des échanges commerciaux extérieurs de l'Algérie se font avec la zone euro, Hamiani observera que sur le plan macroéconomique, « la dépréciation du dinar a un effet direct sur les importations ». Autrement dit, la facture sera plus « salée ». Aussi s'attend-il à leur baisse. « Les importateurs vont réfléchir à deux fois avant d'importer », prévoit-il, ajoutant que « les ménages vont être orientés vers la production nationale ». Le problème qui se pose dans ce cas, c'est le fait que « nous n'avons pas tous les produits localement, ce qui fait que l'offre va être réduite ». Face à cette situation, le président de la Confédération algérienne du patronat (CAP), Boualem M'rakéche, a souligné la nécessité d'assurer l'équilibre de la balance commerciale. Une des solutions est que « la Banque d'Algérie anticipe la fluctuation en achetant des monnaies au moment où la valeur du dinar est appréciée ». Et de conclure en soulignant que la CAP a préparé une série de propositions à soumettre lors de la conférence nationale sur le commerce extérieur prévue à la fin du mois en cours.