La Banque d'Algérie a pris, en mars dernier, une mesure visant la dépréciation de 10 % du dinar par rapport à l'euro. Le cours officiel passe ainsi à 107 DA pour 1 euro. L'objectif étant de freiner les importations jugées trop onéreuses et par ricochet réduire la consommation excessive des ménages.Mais dans le milieu du patronat on estime que cela va plutôt détériorer le pouvoir d'achat des citoyens. Les acteurs économiques ont été, quant à eux, contre la décision de «dépréciation» du dinar, comme préfère l'appeler le ministre des Finances, lequel souligne que «la Banque d'Algérie ne peut pas, en tant que telle, procéder à une dévaluation du dinar. La dévaluation est une décision du gouvernement qui doit avoir l'aval du Parlement». Et d'ajouter que «la fixation du taux de change relève des prérogatives de la Banque d'Algérie, qui est indépendante du ministère des Finances et du gouvernement dans la prise de cette décision relevant de la politique monétaire, menée par cette même banque». La «dépréciation», elle, est le fait du marché. «Ce qui se passe par contre consiste en des fluctuations, appréciations ou dépréciations du dinar sur la base d'une observation continue du marché international», a expliqué Karim Djoudi en soulignant que la dévaluation est un «phénomène définitif» voire «structurel», tandis que la dépréciation est réversible. Mais selon les opérateurs économiques, qu'il s'agisse d'une dévaluation (acte légal) ou d'une dépréciation (évolution), l'essentiel c'est que le pouvoir d'achat du dinar ne cesse de dégringoler. A ce propos, le président du FCE, M. Reda Hamiani, estime que cette mesure va renchérir toutes les importations, qu'elles soient de consommation ou qu'il s'agisse d'intrants. Un avis partagé par l'économiste Camile Sari qui estime que «la dépréciation du dinar va augmenter les importations ce qui pénalisera les consommateurs et stimulera l'inflation». Pour stabiliser le pouvoir d'achat et diminuer les importations, la solution réside dans la réévaluation du dinar, préconisent le patronat et certains acteurs économiques. «Au lieu d'augmenter les salaires, on aurait pu réévaluer notre monnaie. Nos autorités ont fait l'inverse, en augmentant les salaires pour récupérer ensuite par la hausse de l'euro le pouvoir d'achat supplémentaire accordé par la hausse des salaires. C'est une recherche d'équilibre que font nos autorités pour que la hausse des salaires ne conduise pas à une inflation trop dangereuse», souligne un document d'analyse de l'Adem (Association algérienne de développement de l'économie du marché). Selon des économistes, la dépréciation du dinar est d'autant plus ressentie que la facturation de nos importations se fait en euros et les exportations en dollars, pénalisant tant les opérateurs économiques que les ménages algériens, puisque les exportations sont constituées à 98% d'hydrocarbures à l'état brut et semi-brut .La monnaie nationale, depuis son émission en 1964, à parité égale avec le franc français de l'époque, et jusqu'en 1973 (1DA=1FF), a subi, faut-il le rappeler, plusieurs dévaluations. Ainsi, avec l'effondrement du système de Bretton Woods, la valeur du dinar a été fixée par rapport à plusieurs monnaies à partir des années 1980, notamment de 1986 à 1990, période du choc pétrolier. Suite à la chute brutale des recettes liées à l'exportation du pétrole, le dinar a connu une très forte dépréciation, passant de 4,82 dinars pour1 dollar à 12,19 dinars pour 1 dollar, soit une dévaluation de plus de 150%. D'autres dévaluations importantes ont succédé. En 1991, il y eu une baisse de 22%, suivie d'une autre de 40% en 1995, toujours par rapport au dollar américain. B. A.