Dr. Soufi, président de l'association Aniss. L'engagement politique est fort et constant mais la coordination est absente, même l'ONUSida est très actif dans notre pays mais le problème de suivi et d'évaluation des actions menées par l'ensemble des partenaires reste posé ». La lutte, la prévention et la sensibilisation sur le VIH/Sida sont le cheval de bataille des Associations qui, à l'aube de la découverte des premiers cas en Algérie, ont jugé nécessaire de se lancer dans ce combat. Parmi ces associations, Aids Algérie et Aniss. L'association de lutte contre le Sida et de Promotion de la Santé (Aniss), installée à Annaba, est un regroupement de bénévoles au service des autres que préside le Dr.Skander Abdelkader Soufi. Si la propagation de la maladie a ralenti dans le monde, dans notre pays, le VIH se propage et les cas de sida ne cessent d'augmenter. Les chiffres même s'ils ne sont pas révélateurs de la véritable prévalence de la maladie, sont éloquents. 600 nouveaux cas enregistrés en 9 mois durant l'année en cours, portant le nombre de cas cumulés depuis 1985 à 1118 cas de sida et 4745 séropositifs, soit un total de 5863 personnes touchées. Ces chiffres selon M. Soufi ne reflètent pas la réalité puisque des estimations parlent de près de 30 000 cas soit 1% de la population». Dr.Skander estime «que cette situation est à prendre au sérieux», car les pays reconnus pour leur forte prévalence ont tous commencé avec des taux aussi faibles avant de se voir propulsés au plus haut point de cette pandémie. L'Algérie n'est donc pas à l'abri d'une propagation encore plus alarmante du virus, sachant tous les tabous qui bloquent les initiatives de prévention et de lutte. L'existence de groupes vulnérables (travailleurs du sexe, consommateurs de drogue par injection sont cette menace silencieuse sur la propagation de la maladie et reste «la passerelle entre le virus et la société», affirme le président de l'Association Aniss qui se base sur les résultats d'une étude officielle. Cette dernière démontre que «4% des prostituées sont contaminées par le VIH/Sida» et qu'entre «30% et 40%, les usagers de drogue injectable sont atteints par le Sida ou l'hépatite C». L'autre danger sur la société algérienne selon M.Soufi est : «les homosexuels, bien qu'aucune recherche fiable n'ait été menée mais, selon des études au Maghreb et dans les pays arabes, régions ayant les mêmes référents culturels, plus de 10% des homosexuels sont atteints par cette maladie». 600 CAS EN 9 MOIS : PRISE DE CONSCIENCE OU AGGRAVATION DE LA SITUATION ? L'association AIDS Algérie a, quant à elle, depuis 1996 introduit la question du VIH/SIDA, à son programme de sensibilisation initié au préalable à la lutte contre la toxicomanie. Elle s'occupe surtout de «prévention et de sensibilisation mais aussi de plaidoyer, d'action de lutte contre la stigmatisation en matière d'intégration des personnes vivant avec le VIH au sein de la société algérienne, afin de lutter contre la discrimination à l'égard de ces personnes ». Son président M.Othman Bourouba affirme que « les bases de lutte et de prise en charge de la maladie sont là, très solides, les capacités humaines et techniques existent aussi mais, ce qui manque c'est de pouvoir travailler ensemble. L'engagement politique est fort et constant mais la coordination est absente, même l'ONUSida est très actif dans notre pays mais le problème de suivi et d'évaluation des actions menées par l'ensemble des partenaires reste posé ». Cette situation s'est accentuée par un manque des fonds ressentis notamment depuis le retrait du fonds mondial de lutte contre le sida d'Algérie en 2008. Toutefois, l'absence de cette aide financière selon M.Bourouba «n'a pas empêché de mobiliser d'autres partenaires, d'activer et de lancer trois projets de sensibilisation. Le premier a concerné les jeunes universitaires auprès desquels une enquête a été menée, le deuxième a concerné les groupes vulnérables et le troisième destiné aux immigrants. Ces deux derniers projets ont été menés avec l'appui de l'Union européenne. Le manque des Fonds a également influé sur l'application du Plan national stratégique lancé en 2008 sur une période de quatre ans soit 2012. M. Bourouba a assuré que des propositions sont faites pour mobiliser les ressources locales et réaliser les objectifs du Plan. Car, comme il le soulignera «il faut mettre en place un consensus et un mécanisme pour pérenniser les actions mais surtout les évaluer pour pouvoir corriger les lacunes et aller de l'avant». Il dira en substance : «on distribue des moyens de prévention (préservatifs), nous envoyons les groupes à risque dans les structures de santé mais nous ne disposons pas d'échos de ces actions et leurs impacts sur les cibles comme nous ne connaissons même pas le nombre exact des centres de dépistage ni leur emplacement. D'ailleurs le ministère de la Santé a promis de communiquer le 1er décembre prochain les adresses de ces structures». L'enregistrement de 600 cas en 9 mois peut, pour le président de Aids Algérie, traduire une prise de conscience chez les citoyens qui se font dépister comme elle peut constituer une aggravation de la situation d'autant «qu'un relâchement de la part de tous les intervenants durant ces deux dernières années a été enregistré. Ceci, en plus de l'absence d'une étude sentinelle (séro-surveillance sentinelle) depuis 3 ans». En un mot, la propagation du VIH/Sida en Algérie ne peut être déterminée avec précision. Pour M. Bourouba «il est nécessaire de promouvoir le dépistage et de réunir les efforts de l'ensemble des intervenants (pouvoirs publics, associations et médias)».