Il est difficile pour un citadin, particulièrement dans l'Algérois, de prendre la destination qui lui convient en sollicitant les services d'un taxi. En effet, le choix de l'itinéraire est, de nos jours, fixé par le seul chauffeur de taxi qui dicte sa loi et vous transporte selon sa bonne volonté. Une virée aux différentes stations de taxi de la capitale, renseigne sur l'enfer quotidien vécu par le citoyen. Les scènes de colère se succèdent et se ressemblent. Des files interminables se forment en quête de « l'oiseau rare ». L'attente peut durer jusqu'à une heure aux heures de pointe. « Ce n'est pas sur mon chemin » ou « je ne suis plus de service », sont les ruses de ces chauffeurs de taxi pour éconduire les clients. D'autres trouvent un malin plaisir à hocher leur tête en signe de refus à l'adresse de ces clients « potentiels » parfois en détresse, tandis que d'autres font comme si vous n'êtes pas là. Personne n'est épargné par ce « diktat ». Les personnes âgées, les femmes enceintes et même les handicapés. Outrée, une vieille femme à la station de la place Audin dénonce : « Je dois rentrer chez moi à El Biar, mais le chauffeur de taxi ne veut pas me déposer à côté de ma maison. Je suis contrainte de faire 3 kilomètres de marche pour arriver chez moi. A quoi bon alors prendre un taxi pour ne pas être déposé là où on veut ? » « Les chauffeurs de taxi préfèrent les clients en solo, afin d'empocher davantage d'argent, bien que la loi interdise formellement le jumelage », affirme un quinquagénaire rencontré à l'avenue Pasteur, à Alger-Centre. Pour les lieux-dits « hors zone », la tendance est au forfait. à la station de taxi de la place Maurice-Audin, la confusion qui règne dans le secteur des transports en commun est des plus désastreuses. Avant même d'arriver à la station, les taxis de places sont pris d'assaut par les usagers, alors que ceux roulant au compteur préfère s'arrêter loin de la station et proposer leurs services à la course. « Il me demande 500 DA pour une course à destination d'Hydra », lance un jeune stupéfait par cette attitude des chauffeurs de taxi à compteur, avant de signaler que certains « clandestins » proposent des tarifs beaucoup moins élevés. « Chez ces messieurs, la zone en question se limite uniquement au centre de la capitale », peste un passager. Un autre usager, rencontré au square Port-Saïd, affirme que pas moins de 10 chauffeurs de taxi ont refusé la destination de Bir Mourad Rais alors que la loi les oblige à transporter le client vers n'importe quelle destination de l'Algérois. Au niveau de la station de la gare de l'Agha, les chauffeurs de taxi sont à l'affût du moindre client. Généralement un voyageur fatigué par un long trajet et qui doit se plier à leurs exigences. « Personne n'utilise le compteur, ils sont tous de mèche. J'ai pris dernièrement un taxi de la gare de l'Agha vers square Port-Saïd et cela m'a coûté 400 DA. Personne ne contrôle ces chauffeurs de taxi qui imposent leur loi » se désole Nabil, fonctionnaire. Une autre citoyenne ajoutera : « Les tarifs pratiqués par certains chauffeurs de taxi sont vraiment excessifs et nous sommes parfois contraints de payer des sommes très élevées ». Mais pour Rabah, retraité, les chauffeurs de taxi ne sont pas les seuls responsables de cette anarchie. « Le citoyen a sa part de responsabilité. S'il ne dépose pas plainte, les services concernés ne peuvent pas les sanctionner », rappelle-t-il. Partout où l'on se dirige, les mêmes signes de mécontentement des citoyens. Ici, c'est la rareté des taxis, là c'est la cherté des tarifs, ailleurs, c'est le comportement irresponsable des chauffeurs. Qu'en pensent les concernés ? Eux aussi ne cessent de se plaindre. « Être chauffeur de taxi de nos jours n'est pas un métier de tout repos. Non seulement les véhicules coûtent les yeux de la tête, mais de plus, il ne fait pas bon de rouler dans notre ville, les rues sont dans un état à faire pleurer », souligne un conducteur de taxi. Brahim, un autre professionnel du secteur, reconnaît qu'il s'adonne lui aussi au service par course mais en prévenant le client. « Nous sommes véritablement pris en étau : le coût de la location de la licence est en moyenne de 2.500 DA par semaine, si on fait des courses au compteur on ne peut s'acquitter du montant de la traite. Alors que je dois faire face aux besoins de base de ma famille », justifie-t-il.