L'Algérie présentera prochainement son rapport, sur le trafic de drogue qui sévit aux frontières ouest, à l'ONU à Genève. Elle emboîte ainsi le pas à la Russie qui a introduit une motion devant le Conseil de sécurité pour le motif. Pour Abdelmalek Sayeh, Directeur général de l'Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie (ONLCDT) cette décision est motivée par le déferlement de quantités considérables de cannabis déversées par le Maroc à nos frontières, suite à une lutte sans merci et l'instauration d'une surveillance drastique aux frontières des pays européens, et par le lien étroit entre le terrorisme et le trafic de drogue. «Le lien entre le terrorisme, le crime et le trafic de drogue est réel», a affirmé M. Sayeh, lors d'une journée d'étude sur «la drogue et ses effets socio-économiques» organisée au Conseil de la Nation. Depuis janvier 2010, 26,5 tonnes de cannabis, 3,5 kilogrammes d'héroïne et 2,5 kg de cocaïne ont été saisies sur le territoire national. Pour M. Sayeh l'enjeu du trafic dans la région du Sahel est très important. «Les membres du groupe terroriste AQMI prélèvent 10 % du prix de la tonne de drogue, soit environ 1,4 million d'euros, pour permettre aux trafiquants de passer sur le territoire qu'ils surveillent», affirme le DG de l'ONLCDT. Tous ces trafics ont leurs conséquences. La consommation de drogue ronge la société algérienne. L'arsenal juridique et la lutte implacable des corps constitués n'ont pu stopper ce phénomène qui continue à faire des ravages parmi les jeunes. Ainsi, notre pays compterait près de 300.000 consommateurs de drogues. En 2009, les autorités ont mis sous les verrous 16 000 consommateurs et 4000 dealers, selon l'ONLCDT et 85 % des toxicomanes ont entre 12 et 35 ans. La dangerosité de la consommation des substances hallucinogènes est constatée dans les crimes commis suite à cette absorption. «La consommation de la drogue est à l'origine de beaucoup d'accidents de circulation et de travail. Ceci en plus des cas de mort subite, de vol, de viol et autres violences physiques», précise le DG de l'ONLCDT. DES LOIS POUR PROTEGER LES CONSOMMATEURS ET PUNIR LES DEALERS Noureddine Bekli, professeur d'université, a souligné l'aspect criminel de ce trafic tant les retombées socio-économiques sont néfastes. Ainsi, en 2004, une loi, la 4/18 relative à la protection contre les dangers de la drogue a été promulguée. C'est la résultante d'une série de conventions signées par l'Algérie qui a commué la peine capitale en perpétuité et durci les peines à l'encontre des dealers. Le but étant «de protéger le citoyen qui, lors de sa première condamnation pour usage de stupéfiant, se voit soumis à une peine d'emprisonnement de deux mois accompagnée de mesures de prise en charge en milieux sanitaires», dira M. Bekli. Ainsi, 1000 drogués ont été traités dans des établissements hospitaliers en 2009. «Le code pénal algérien différencie parfaitement entre le consommateur qui est une victime et le trafiquant». Même «les médecins et les pharmaciens n'échappent pas à ces sanctions en cas de prescription et de vente de psychotropes à usage non médical», précise M. Bekli. Ces interventions ont été suivies de débats en présence de la ministre déléguée à la Famille et à la Condition féminine, des membres des deux Chambres du Parlement, des membres des services sécuritaires et du mouvement associatif.