Unité ou sécession ? Cette question sur le Sud-Soudan, au centre de toutes les discussions à Khartoum, ne se posera plus dans moins de deux semaines. Du 9 au 15 janvier prochain, plus de 3,5 millions de «sudistes» choisiront l'indépendance ou l'unité. En attendant ce scrutin dont l'issue ne fait guère de doute, Omar el-Béchir, le président soudanais, joue la carte de l'ouverture. «Nous disons à nos frères du Sud-Soudan que la balle est dans votre camp et la décision est la vôtre. Si vous choisissez l'unité, bienvenue. Si vous choisissez la sécession, bienvenue aussi», leur dit-il en se plaçant dans la perspective d'un «OUI» quand il annonce son engagement à les aider pour «bâtir un pays frère, sûr et stable». Nafie Ali Nafie, son assistant, a tenu récemment les mêmes propos : «Tous les efforts faits pour maintenir l'unité ont échoué», a-t-il reconnu. Changement d'approche à Khartoum ? Fort probable. Le rais a affirmé, il y a un an, lors d'un discours clé au Sud-Soudan, qu'il serait le premier à reconnaître l'indépendance du Sud si cette région votait en faveur de cette option dans un scrutin libre et équitable. «Nous allons coopérer, être intégrés dans tous les aspects possibles parce que nous partageons plus que n'importe quel pays», dit-il conscient d'une réalité : «S'il y a des troubles dans cet Etat, ces problèmes vont déborder». Notamment chez lui. «C'est précisément ce que nous prônons», déclare Pagan Amum, le secrétaire général des ex-rebelles du Mouvement populaire de libération du Soudan, en prenant connaissance des propos du président soudanais. «J'ai demandé à la population et aux autorités du Nord-Soudan d'être solidaires des Sudistes qui s'apprêtent à bâtir leur Etat indépendant, un nouveau pays. Aussi, les Sudistes doivent être solidaires du Nord-Soudan, qui commencera une nouvelle aventure en bâtissant un nouveau pays à partir de ce qui restera du Soudan», dit-il annonçant ainsi des «liens privilégiés» entre les deux pays dès juillet 2011, date de la fin de la période intérimaire de six ans initiée à Nairobi (Kenya) par l'accord de paix du 9 janvier 2005 qui a mis fin à 22 ans de guerre civile entre le Nord et le Sud. «Je n'ai vu aucune indication que le Nord et le Sud du Soudan ont l'intention de reprendre la guerre. Ce qui se déroule actuellement est loin de la guerre», déclare le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa qui a entamé mardi une visite au Soudan pour aborder les enjeux post-référendaires (citoyenneté, sécurité, économie et respect des accords internationaux). Khartoum et Juba qui négocient leur possible rupture depuis juillet dernier n'ont pas finalisé d'accords sur ces enjeux. Notamment, l'épineuse question du partage des ressources pétrolières et le tracé de la frontière entre le Nord et le Sud du Soudan. Juba qui se réfère aux frontières définies le 1er janvier 1956, date de l'indépendance du plus grand pays d'Afrique, n'exclut pas de soumettre ce «tracé» à un arbitrage international si une solution n'est pas trouvée dans les prochains mois aux «20%» que la commission mixte n'a pas encore délimités. Le Mouvement populaire de libération du Soudan et le parti du Congrès national d'el-Béchir ont déjà soumis en 2008 leur différend sur la frontière d'Abyei, une région contestée, située à la lisière du Nord et du Sud-Soudan, à la Cour d'arbitrage de La Haye. En vain. Khartoum n'a pas reconnu la décision rendue une année après par ce tribunal. Khartoum et Juba ne sont pas au bout de leurs peines. Elles seront dès le 9 juillet avec leurs calculettes. Pour que la sécession soit entérinée, une majorité simple des 3 millions de personnes inscrites sur les listes électorales - sur les 6 ou 7 millions de Sudistes - doit se prononcer en sa faveur et le taux de participation doit être de 60%. En sus, la capitale du Soudan doit se préparer à faire face à une opposition qui demande des élections générales anticipées. Juba qui a 90% d'analphabètes doit faire face à une absence d'élite, un pouvoir monopolisé par les rebelles.