Les participants à la 3e rencontre internationale sur « Le nom propre : mémoire et identité » ont mis l'accent, dimanche dernier à Tizi Ouzou, sur l'importance de se réapproprier les toponymes et autres noms propres en vue de leur utilisation dans la promotion de la langue amazigh. La toponymie constitue une « source non négligeable pour le développement de la langue amazigh et la réhabilitation des termes et des sens perdus dans l'usage courant », ont observé des universitaires présents à cette rencontre organisée par le Laboratoire d'aménagement et d'enseignement de tamazight de l'Université de Tizi Ouzou. Dans son allocution d'ouverture des travaux de cette rencontre internationale qui s'étalera sur deux jours, le vice-recteur de l'Université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, Idir Ahmed Zaïd, a insisté sur la nécessité d'arrêter une démarche afin de « se réapproprier tout le champ des noms propres dans le but de leur utilisation pour nourrir le développement de la langue amazigh ». De par les archaïsmes contenus dans ces noms propres, ces derniers, qui sont des « désignateurs » et « marqueurs d'identité » rigides et invariables dans le temps et l'espace, « sont porteurs d'une charge sémantique qui permet de se réapproprier des sens et des termes aujourd'hui disparus de l'usage de la langue en vue de les réinjecter dans le développement de tamazight », a-t-il relevé. Pour sa part, l'universitaire Moussa Imarazène, qui s'est intéressé au patronyme dans la région de Kabylie, dans le cadre d'une étude ayant ciblé 1.500 patronymes collectés dans les wilayas de Tizi Ouzou, Bejaïa, Boumerdès et Bouira, a indiqué que l'établissement d'état civil à la fin du 19e siècle par l'administration coloniale française « a détruit la patronymie kabyle en la remplaçant par des noms dont des sobriquets et des termes vulgaires difficiles à porter par les intéressés dont nombreux les ont changés à l'indépendance ». L'universitaire Mohand Akli Haddadou abonde dans le même sens, relevant qu'évoquer des noms propres de lieux ou de personnes, c'est aussi évoquer leur culture et leur d'identité. Dès lors, a-t-il estimé, « il ne faut pas s'étonner que toute entreprise de colonisation cherche une altération de ces noms propres », soulignant que l'Algérie en a fait « l'amère expérience » puisque toutes les occupations subies (romaine, française) ont marqué son anthroponymie et sa toponymie. « L'Algérie indépendante a été confrontée au problème de son onomastique, et l'Etat a entamé le remplacement des noms français des villes et communes par des noms algériens, soit en reprenant les noms traditionnels arabes ou berbères, encore vivant dans la mémoire collective, soit en proposant des noms à consonance algérienne, toutefois, l'état civil établi durant la colonisation a été reconduit en dépit de ses incohérences », a-t-il relevé. Aujourd'hui a-t-il ajouté, l'onomastique algérienne « se cherche entre un système anthroponymique hérité de la colonisation et une toponymie qui ne restitue pas toujours la diversité culturelle et linguistique du pays ».