Le pays du Cèdre est de nouveau devant une impasse politique, voire une agression militaire israélienne. Saâd Hariri, le chef de la Coalition du 14 mars (majorité parlementaire) qui a été désigné en juin par Michel Sleïmane, le président de la République, pour former un gouvernement d'union nationale, claque la porte. «Je ne suis pas une simple boîte postale», obligé de nommer les ministres «issus des clubs et des couloirs politiques», dit-il, accusant l'opposition (Hezbollah, Amal et le Courant patriotique libre de Michel Aoun) d'avoir entravé ses efforts en lui posant des conditions extravagantes et rejetant la liste de ministres qu'il a proposée au chef de l'Etat. Réellement la pomme de la discorde est le portefeuille des Télécommunications. Pour l'opposition, la décision de Hariri de confier ce ministère à la majorité équivaut à la décision du gouvernement Siniora de démanteler le réseau de télécommunications du Hezbollah le 5 mai 2008. Au-delà des «portefeuilles», les analystes lient l'échec de Hariri à l'absence d'accord entre la Syrie et l'Arabie Saoudite sur le Liban et la poursuite des différends entre Damas et Washington sur l'Irak. Selon les médias libanais, M. Hariri, qui veut être Premier ministre avec un plus grand soutien américain et de Nabih Berri, le président du Parlement, sera chargé de former un gouvernement après des consultations de Michel Sleïmane avec les députés qui seront lancées mardi prochain. Fort de l'appui de 71 des 128 députés du Parlement, il sera probablement désigné à nouveau. La démission du fils de l'ancien Premier ministre serait-elle une ruse de la majorité et de ses sponsors pour reprendre la main dans des négociations qui mêlent tous les acteurs politiques qui activent au Moyen-Orient ? Tout porte à croire que Hariri, qui s'est récusé en étant sûr d'être reconduit, veut changer les règles du jeu. Dont celle qui l'a obligé à chercher la formation d'un gouvernement d'union nationale, une revendication de la minorité qui se soucie de la gestion de l'arsenal du Hezbollah. Selon son entourage, il le fera sans respecter le tiers des ministres pour l'opposition. Une éventualité qui pourrait conduire le pays à rester dans gouvernement et à entrer peut-être dans une crise politique qui pourrait rappeler la situation qui a prévalu quand le Liban est resté sans président en novembre 2007 : après des mois de tensions, le pays a vécu les affrontements armés de mai 2008. Les affrontements chiites-sunnites reprendraient-ils au Liban ? Le Qatar, qui a désamorcé la crise majorité-minorité qui s'est soldée en mai 2008 par des heurts sanglants, offre, pour la seconde fois, ses bons offices. Les «commanditaires» des tirs de roquettes du sud du Liban sur le nord d'Israël le laisseraient-ils faire ? L'Etat hébreu fait porter la responsabilité au gouvernement libanais et dépose plainte auprès des Nations unies. Objectif : relancer le débat sur l'arsenal du Hezbollah dont le chef répète depuis la «guerre de 34 jours» (été 2006) qu'il est prêt pour un autre affrontement militaire avec Israël. Ce dernier promet de répondre «massivement si le calme est sérieusement rompu»