Hocine Aït-Ahmed, décédé, hier, à Lausanne (Suisse) à l'âge de 89 ans, était un des dirigeants historiques de la Révolution algérienne et leader charismatique du Front des forces socialistes (FFS), dont il est le père fondateur. Le défunt, dont l'état de santé s'est détérioré ces dernières années, a été victime d'une série d'accidents vasculaires cérébraux en janvier dernier ayant affecté notamment le centre de la parole. Il se soignait à Lausanne où il était établi. Né à Aïn El Hammam (Tizi Ouzou) en 1926, Aït-Ahmed a été l'un des principaux chefs du Front de libération nationale (FLN) durant la glorieuse Révolution du 1er novembre 1954. Auparavant, il avait intégré le Parti du peuple algérien (PPA) où il avait suggéré la création de l'Organisation spéciale (OS), qu'il avait dirigée, en succédant à Mohamed Belouizdad. Militant de la cause nationale depuis sa jeunesse, Aït-Ahmed a présenté, en 1948, un rapport qualifié de décisif sur les formes et la stratégie de la lutte armée pour l'indépendance. Aït-Ahmed avait aussi dirigé la délégation algérienne à la conférence de Bandung en 1955, avant son arrestation en 1956 en compagnie d'Ahmed Ben Bella, Mostefa Lachref, Mohamed Boudiaf et Mohamed Khider, suite au détournement, le 22 octobre 1956 par l'armée française, de leur avion civil marocain, entre Rabat et Tunis, en direction du Caire (Egypte). C'est à partir de la prison que Aït-Ahmed communiquait avec les dirigeants du Front de libération nationale et de l'Armée de libération nationale (ALN) sur l'urgence de la création d'un gouvernement provisoire en exil. Après l'indépendance, il se démarque du FLN, en créant en 1963 son propre parti, le FFS, le plus vieux parti de l'opposition en Algérie. Fervent militant des droits de l'homme Accusé de mener une « insurrection en Kabylie », il est arrêté en octobre 1964 et condamné à mort. En 1966, il s'évade de la prison d'El Harrach et se réfugie en Suisse d'où il n'a jamais cessé de militer pour la promotion et la défense des droits de l'homme et pour l'unité du Maghreb. Après 23 ans d'exil, ce fervent militant de la cause berbère et des droits de l'homme rentre en Algérie en décembre 1989, soit après les événements d'octobre 1988 et l'ouverture du champ politique avec l'instauration du multipartisme. Le FFS, qui activait dans la clandestinité, a été reconnu, au même titre que les autres partis politiques, à la faveur de la consécration du pluralisme politique en Algérie. Le parti d'Aït-Ahmed, qui avait participé aux élections législatives de 1991, avait alors mis en garde contre le danger de voir les armes prendre le pas sur les urnes, après l'annulation du premier tour de ces élections remportées par le FIS dissous. Après l'assassinat du président Mohamed Boudiaf, en juin 1992, Aït-Ahmed s'exile de nouveau en Suisse où il a continué son militantisme politique. En 1999, Aït-Ahmed s'était présenté à l'élection présidentielle avant de se retirer de la course. En décembre 2012, il avait adressé au conseil national du FFS une correspondance dans laquelle il a exprimé sa volonté de quitter la politique pour des raisons de santé. « Mes convictions et ma ferveur sont toujours aussi vivaces qu'aux premières heures de mes 70 ans de militantisme. Je dois vous dire que le moment est venu pour moi de passer le témoin et que je ne me présenterai pas à la présidence du parti pour le prochain exercice », avait-il écrit dans son message. Le défunt est titulaire d'une licence en droit à Lausanne où il devient docteur honoris causa. Il avait soutenu aussi une thèse de doctorat à Nancy (France) en 1975 sur « Les droits de l'homme dans la charte et la pratique de l'OUA » (Organisation de l'union africaine). Il est également auteur de plusieurs ouvrages dont notamment « Premier engagement politique et début de la lutte armée », « Tournée diplomatique pour une reconnaissance internationale », « L'indépendance, lutte pour un Etat démocratique », « Création du FFS, résistance dans les maquis de Kabylie » et « L'après-décennie noire, pour une nouvelle République ».