Le cycle d'affrontements qui ont fait au moins onze tués marque une très nette crispation de la situation politique. Finie, la lune de miel ? Entre le président ougandais Museveni et la royauté des Bagandas, l'alliance des « sudistes » a été rompue pour mettre un terme à une idylle à dividende mutuellement utile : une royauté pour sortir du statut de la marginalisation contre un soutien actif qui a rendu possible la victoire électotale de Museveni aux élections de 1996, 2001 et 2006. Longtemps opprimés sous les présidents nordistes (Milton Obote, Idi Amin Dada et Tito Okello), ils ont trouvé en Museveni, un sudiste de l'ethnie minoritaire des Banyankole, un allié de circonstance qui, fort opportunément, a rétabli symboliquement en 1993 la royauté du Buganda, sous le contrôle de l'Etat fédéral. Mais, depuis deux ans cependant, les nuages se sont accumulés sur cette alliance, de nombreux Bagandas aspirant à s'émanciper de la tutelle museveniste. La déception est née du sentiment que les sujets du vénéré souverain «Kabaka» Ronald Muwenda Mutité II, se sont estimés lésés par un deal trompeur. Selon un récent manifeste, ils se sont estimés également trahis au fil des ans par «un gouvernement autocratique qui tente de monopoliser les ressources», de leur terre natale, et instrumentalise à son profit les rivalités ethniques. La crise qui couve a inévitablement éclaté sous forme de manifestations spontanées dégénérant en graves émeutes difficilement contenues par la police et l'armée. Si les violences ont finalement cessé, il y a deux jours, le cycle d'affrontements qui ont fait au moins onze tués marque une très nette crispation de la situation politique. «Le gouvernement a probablement perdu le Buganda. Il s'est tiré une balle dans le pied», juge un député de l'opposition, Benson Obua-Ogwal. Car, pour le quotidien «Monitor», «la manière dont le chef de l'Etat jonglera dans ses relations avec cette région stratégique, peuplée et prospère, est pourtant la clé pour avoir une chance de remporter la présidentielle de 2011 ». A deux ans de la présidentielle, le président Museveni a fort à faire pour mater la rébellion des Bagandas ramenés au statut de simples «institutions culturelles» et se préparer à affronter le dangereux challenge de l'opposant Olara Otunnu, de retour au pays, depuis fin août, après 23 ans d'exil.