Quelque 13 millions d'Allemands étaient appelés, hier, à voter pour trois Parlements régionaux alors que le pays est en proie aux doutes depuis qu'il a ouvert ses portes, en 2015, à plus d'un million de demandeurs d'asile. Pour éviter un revers à son parti, l'Union chrétienne-démocrate (CDU), la chancelière Angela Merkel multipliait les meetings lors de la campagne électorale. Samedi dernier, elle a insisté sur le « devoir » qu'avaient les réfugiés de s'intégrer, tout en martelant que les solutions européennes promises depuis des mois allaient réduire le nombre de migrants s'engageant dans l'odyssée périlleuse vers le nord de l'Europe. La dirigeante conservatrice risque de ne pas être très convaincante auprès des Allemands qui avaient dans un premier temps accueillis chaleureusement les réfugiés mais qui, — après divers incidents commis par un petit nombre de ces derniers —, sont de plus en plus nombreux à se tourner vers la droite populiste. L'Alternative pour l'Allemagne (AFD), jeune formation créée il y a trois ans pour contester l'euro, est pressentie comme la grande gagnante des scrutins régionaux. En Saxe-Anhalt, avec 19% dans les sondages, elle dispute même la place de deuxième force politique régionale à la gauche radicale, die Linke, sachant que cette région accueille peu de réfugiés. En plus des dérapages verbaux, l'AFD, qui prône notamment la fermeture des frontières, creuse son sillon populiste en haranguant les foules contre les partis traditionnels. Ces derniers rejettent toute coopération avec l'AFD, vilipendée comme étant « une honte pour l'Allemagne », selon les propos du ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, tandis que le secrétaire général de la CDU de Hesse, Manfred Pentz, a fait part de sa « grande inquiétude ». La percée de l'AFD est « très effrayante », a réagi, pour sa part, une responsable du Parti social-démocrate d'Allemagne (SPD), Eva Högl, sur la chaîne publique ARD. Pour ces deux partis, la tâche de former des coalitions régionales viables pourrait s'en trouver alourdie notamment pour le SPD actuellement au plus bas dans les sondages. Confiante de sa cote de popularité, Angela Merkel a assuré que le vote en faveur de l'AFD était un feu de paille et qu'à mesure que se résoudrait la crise des réfugiés, ce parti refluerait. Or si cette crise se poursuivait, la petite formation europhobe pourrait grandir et il y a un grand risque qu'elle atteigne son prochain objectif : l'entrée au Bundestag, dans un an et demi.