Les difficultés rencontrées par les chercheurs dans l'écriture de l'histoire du mouvement national et la guerre de Libération nationale ont été au centre des débats, lors d'une rencontre, mardi dernier à Oran, organisée au Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (Crasc). Trois chercheurs du Crasc, Ouanassa Siari Tengour, Amar Mohand Amer et Sadek Benkada, ont dressé « l'état des lieux de la recherche sur le mouvement national et la guerre de Libération nationale ». Ils ont évoqué les difficultés rencontrées par les chercheurs en histoire dans l'accomplissement de leur travail. Fouad Soufi, chercheur au Crasc et modérateur, a focalisé sa présentation sur la confusion entre l'écriture des mémoires et l'écriture de l'histoire. « Les auteurs de mémoires sont plus compilateurs qu'historiens. Leurs travaux ne répondent pas aux exigences de l'écriture de l'histoire, une discipline académique obéissant à des critères draconiens d'objectivité et de vérités historiques, notamment en ce qui concerne les sources, les archives et les témoignages oraux », a-t-il soutenu. Mme Siari Tengour a souligné la difficulté du chercheur à entreprendre des recherches sur des thématiques qui lui sont proches, car touchant sa région ou sa famille, entre autres. Elle a toutefois fait remarquer que « l'histoire de la guerre de Libération nationale — et du mouvement national en général — est dynamique ». « Cette histoire n'est ni figée ni statique et la recherche n'est jamais terminée, car les analyses changent et s'enrichissent. La recherche n'est intéressante que si elle revisite les événements sous des angles différents », a-t-elle indiqué. « Solliciter la mémoire des moudjahidine, en l'absence d'archives, peut combler un vide et c'est une voie ouverte aux chercheurs, quoique cela puisse poser des problèmes car les souvenirs, même pour ceux qui ont été acteurs peuvent, avec le temps, subir des modifications ou à la partialité pour favoriser tel événement ou tel personnage », a-t-elle ajouté. Prenant comme exemple les événements du 8 Mai 1945, Ouanassa Siari Tengour a affirmé que « tout n'a pas encore été dit et les chercheurs peuvent avoir accès à une foule d'informations en interrogeant plusieurs éléments comme les archives locales et étrangères, la presse de l'époque, la mémoire sociale et individuelle ». Aller vers l'histoire locale Amar Mohand Amer a fait part de toute la difficulté rencontrée pour déterminer les organigrammes des wilayas et des zones. » « Il faut connaître tous les acteurs de la guerre de Libération nationale de 1954 à 1962, ainsi que tous les acteurs de l'OS, car, à part ses dirigeants, les autres acteurs ne sont pas connus », a-t-il indiqué. « Il est très compliqué pour les historiens d'effectuer un travail cohérent sans archives et avec seulement des témoignages. Il faut aller vers l'histoire locale ». Enfin, Sadek Benkada s'est intéressé au récit autobiographique comme « fixateur de la mémoire ». Dans ce cadre, il a expliqué que le rapport entre histoire et mémoire « est omniprésent » et il existe une profusion de récits autobiographiques que l'intervenant a classé par catégories, notamment la mémoire de la guerre de Libération nationale, les mémoires des wilayas, les mémoires carcérales, ceux de la Fédération de France du FLN et la zone autonome d'Alger. Benkada a répertorié tous les ouvrages consacrés à la guerre de Libération nationale par wilaya, au niveau national, par métier (la santé, par exemple) et les mémoires de prison. Il a cité notamment les œuvres de Yacef Saâdi, Ali Haroun, Harbi, le docteur Benzerdjeb, le docteur Tami Medjebeur et d'autres.