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« Tant qu'il n'y a pas de loi sur la publicité, il est impossible de concevoir un minimum d'organisation » Belkacem Ahcène jaballah, professeur associé à l'ENSJSI
Dans cet entretien, Belkacem Ahcène Djaballah, professeur associé à l'Ecole nationale supérieure de journalisme et des sciences de l'information Alger (ENSJSI), a bien voulu répondre à nos questions concernant la crise que connaît, depuis un certain temps, la presse nationale, l'anarchie dans laquelle évolue la publicité et la manière de pouvoir trouver une issue à cette situation. Quelle est la situation actuelle de la presse en Algérie ? Globalement, elle va (encore) bien. Cependant, elle est en train de traverser une zone de turbulences économiques et financières. Ce qui nécessite qu'elle doit revoir ses formes d'organisation et de gestion (comme d'ailleurs une bonne partie de notre économie). Bien sûr, l'Etat doit apporter une certaine aide beaucoup plus aux journalistes et à leur formation, mais les corporations doivent aussi s'organiser et devenir des forces de propositions et d'actions. Par quoi se caractérise-t-elle ? Elle a le mérite d'exister. Elle a la force de faire face et de continuer le combat. Elle est plurielle, puisqu'on y trouve de tout. Elle est diverse ce qui permet à tout un chacun de s'exprimer. Bien sûr, nul n'est satisfait car beaucoup ne savent pas ce qu'il n'y avait pas avant. Quel est votre avis, en tant que spécialiste de l'information, sur la crise que connaissent les médias, notamment la presse écrite en raison de la baisse de la publicité ? Il est évident que la contraction du marché de la publicité (pour des raisons économiques et financières objectives) est la raison la plus visible de la crise actuelle au niveau des organes de la presse écrite. Néanmoins, le bouleversement du marché de la presse écrite, entre autres, s'annonçait déjà depuis quelques années, à partir de la fin des années 2000 début des années 2010 avec l'apparition des télés privées satellitaires (des concurrentes insaisissables car fonctionnant avec des règles commerciales informelles), parallèlement à une migration du jeune lectorat vers le numérique. On a donc remarqué une stagnation du gisement du lectorat traditionnel de la presse écrite avec une absence de renouvellement rapide du jeune lectorat. Les femmes, elles, sont allées vers une nouvelle presse magazine proche de leurs besoins et de leurs préoccupations. Que pensez-vous du marché de la publicité en Algérie et de son organisation ? Tant qu'il n'y a pas de loi sur la publicité, il est impossible de concevoir un minimum d'organisation et de régulation ou même de compréhension du marché. Ce dernier reste donc suspendu entre un ordre ancien (au sein duquel l'Anep se trouverait au centre de toutes la problématique et de toutes les demandes) et un ordre commercial assez nouveau à la recherche de méthodes, d'approches et de clients, du secteur économique privé, générés par la « nouvelle » économie (libérale ?). La presse doit-elle compter uniquement sur les rentrées de la publicité pour pouvoir fonctionner et assurer ainsi sa pérennité ? Il est certain que la publicité est une source principale de financement. Pour beaucoup de nos gestionnaires de presse, elle est la seule, car la plus facile jusqu'ici. De ce fait, l'autre source de financement, la vente, entre autres, a été négligée, pour ne pas dire totalement ignorée par les « managers », restés beaucoup plus journalistes que gestionnaires. On n'est pas encore arrivés à faire la part du produit « journal » (cela peut s'appliquer à tous les médias) et le produit « éditorial ». Une mentalité que l'on trouve dans bien d'autres secteurs avec des gestion regroupées autour de la famille ou des copains, autour des Sarl et des Eurl bien plus que des Spa. La publicité profite surtout aux chaînes de télévision et pénalise la presse écrite, pourquoi ? Il ne faut pas s'étonner de voir ce transfert, la télévision et l'image attirant le consommateur. De plus, il y aurait une stratégie commerciale de dumping sur les prix de la part des entreprises télévisuelles (satellitaires privées) qui, par ailleurs, sont opaques quant à leur gestion (des ressources publicitaires) et au financement de leurs productions (quand il y en a) avec la complicité « affairiste » des annonceurs qui, tout naturellement, en profitent quand eux-mêmes ne sont pas des propriétaires d'organes (comme dans la presse écrite où sur les 150 titres de la presse quotidienne, à peine une centaine appartiennent aux journalistes) Quelles solutions peut-on préconiser en situation de difficultés financières, surtout avec la disparition de beaucoup de titres et d'autres qui sont sur le point de l'être ? D'abord élaborer et/ou corriger et promulguer les textes de loi ayant trait à la presse (audiovisuel, publicité, sondage, presse, diffusion, aides, conseils, autorités...) en tenant compte de la Constitution révisée et accélérer le processus de régularisation des situations bâtardes (elles le sont pour la plupart). Il faut également lancer, avec l'université et les instituts spécialisés, des formations ayant trait à la gestion des médias, dont ceux audio-visuels et électroniques, obliger tous les organes de presse, sans exception, à publier régulièrement les informations liées à leur gestion.