Voilà un rôle que veut assumer le romancier, critique littéraire et traducteur, Mohamed Sari, qui a présenté, mardi dernier, son dernier roman « Pluie d'or » à la Libraire internationale des Editions Chihab, à Alger. « Comment peut-on rester indifférent devant ce qui se passe aujourd'hui ? Je ne peux écrire sur un thème qui ne soit pas en lien avec les problématiques que nous vivons actuellement, entre autres l'Etat national, l'Islam, l'identité, 50 ans d'indépendance, le terrorisme », explique l'écrivain. Loin de formuler une solution, l'auteur de « Labyrinthe » appelle à étudier les raisons des crises en remontant jusqu'aux racines anthropologiques. « Il ne s'agit pas de partir sur des bases idéologiques, religieuses, culturelles ou autres. Toute action dans ce sens doit rester objective avec pour seul but, comprendre le pourquoi de la chose », suggère-t-il en assurant que la liberté d'opinion et d'expression doit s'exercer dans le cadre du respect mutuel et de la cohabitation pacifique. « L'écrivain n'a pas pour rôle de juger » Citant l'exemple de l'Islam, il affirme que la genèse — qui ne date pas d'hier — du discours extrémiste, ayant conduit à des guerres fratricides, est le fruit non pas d'une mais de plusieurs interprétations erronées. « Il faut aller vers une nouvelle approche pour mieux appréhender les véritables fondements de notre religion », soutient-il en précisant que l'écrivain n'a pas pour rôle de juger mais plutôt d'essayer de comprendre les tenants et les aboutissants de ces phénomènes. Ces derniers sont au cœur de son nouveau texte qui retrace la vie et les déboires d'un jeune homme, El Mahdi, ayant pris la voie tortueuse et très risquée de l'islamisme radical. Au passé tumultueux, privé de sa mère répudiée par un père qui tenait un mausolée dans une bourgade, Aïn El Kerma, maudite par le sort, il tente d'abord de suivre la tariqa léguée par ses ancêtres. Il prit pour idole un maître soufi du nom d'Ibrahim Abdullah qui a accompli le pèlerinage aux Lieux Saints en marchant sur sa... tête. Le recours au fantastique quasi burlesque est savamment utilisé pour évoquer une situation réelle à bien des égards. Puisque le jeune homme entreprend une longue marche vers La Mecque, mais ni sa tête encore moins ses jambes ne parviennent à exhausser son rêve. De guerre lasse, rongé par la frustration, il rentre au village avec son compagnon de fortune et verse dans une pratique religieuse radicale, chassant à tout-va toute personne qui ose résister à ses desseins, y compris le vieil imam d'Aïn El Kerma. « L'histoire est une tentative visant à comprendre ce qui s'est passé depuis l'indépendance à nos jours », résume le romancier qui brille par un style d'écriture élégant et puisant dans une forte symbolique. Son roman est à lire mais surtout à méditer.