Le CRA se déploie sur le terrain. Quelle est sa nouvelle stratégie ? Dans sa nouvelle stratégie, le CRA se déploie en complément des efforts de l'Etat en matière de solidarité nationale. Cet organisme ne veut pas être une charge ou un fardeau pour l'Etat. Le CRA n'est plus dans cette logique d'attente des subventions de l'Etat. Il a initié son propre programme d'action pour, d'abord, vulgariser et réinstaurer la culture de la solidarité, qui est le fondement même de notre personnalité, et que nous avons, quelque peu, délaissée. Notre action s'inscrit dans le développement du sens de l'humanisme et du sens profond de la solidarité et cela ne peut pas se faire avec l'argent du contribuable. Nous œuvrons donc à renforcer nos capacités pour accomplir notre mission. La réussite de nos actions est tributaire de la transparence de l'environnement du CRA, ce qui va garantir sa crédibilité. L'imagination joue un grand rôle pour atteindre ces objectifs, car chaque individu peut contribuer à sa manière. Etant donné que la société est composée en majorité de jeunes, qui font la force et la richesse de ce pays, nous avons été réjouis de recevoir trois stars du monde sportif algérien en l'occurrence Antar Yahia, Toufik Makhloufi et Mehdi Hassan, qui sont devenus les ambassadeurs de bonne volonté du CRA. Ces sportifs se sont portés volontaires et ont décidé de s'impliquer dans nos actions. La présentation de cet évènement nous a permis l'adhésion de jeunes étudiants, devenus eux aussi des bénévoles au CRA. L'opération de collecte de sang avec Makhloufi a drainé beaucoup de monde. Dans le même sillage, divers projets seront lancés prochainement, dont le marathon du CRA prévu cette année. Nous allons aussi rétablir une vieille pratique, à savoir la vente du timbre du CRA dans les établissements scolaires. La convention a été conclue avec le ministère de l'Education nationale dans le but d'inculquer la notion de l'humanisme et de la solidarité chez l'enfant. Nous saisissons cette occasion pour inculquer les notions de secourisme chez l'enfant et les premiers gestes en cas de séisme. Dans le même contexte, nous avons un projet de création d'un espace dédié aux amis du CRA. La première catégorie ciblée sera les artistes dans le cadre d'une opération menée avec le ministère de la Culture intitulée « La culture au service de l'humanitaire » pour regrouper les acteurs, les poètes, les chanteurs, les musiciens et autres autour du CRA. D'autres opérations seront lancées dans cet espace pour capter d'autres catégories de la société. La signature d'une convention avec le FCE va nous permettre d'avoir un centre équipé de dépôt pour le CRA sur 6.000 m2 à Douera étant donné que nous n'avons pas encore une structure de ce genre. La convention signée avec Naftal nous permet de mener des actions d'aide en direction des immigrants, des réfugiés, de prise en charge des malades cancéreux, de solidarité pendant le mois de Ramadan. La contribution d'Ooredoo a été précieuse à l'occasion des évènements de Ghaza, de Ramadan, de la rentrée scolaire et d'acquisition de trois cliniques mobiles pour Tamanresset, Adrar et Illizi. La signature, hier, d'une convention avec l'entreprise publique de gestion des marchés de gros de fruits et légumes et l'association des mandataires aidera à approvisionner les familles nécessiteuses, le centre d'accueil des réfugiés syriens et le centre de repos des malades des réfugiés sahraouis. L'essentiel pour nous, c'est de faire renaître cette flamme de solidarité et d'humanisme dans la société algérienne. Nous voulons que le CRA soit cet espace où se conjuguent tous les efforts. Est-il vrai que le CRA est boudé par les pouvoirs publics ? Le CRA n'a jamais été sanctionné par les pouvoirs publics qui ne peuvent pas l'abandonner. Il bénéficie toujours du soutien de l'Etat, de ses encouragements et de ses félicitations. Nous entretenons de bons rapports de collaboration avec les départements ministériels qui acceptent de travailler avec nous, dans nos différentes opérations. Le CRA veut jouer son véritable rôle d'auxiliaire des pouvoirs publics, et compléter les efforts de l'Etat en matière de solidarité. Nous refusons d'être une charge. Il y a une stratégie adoptée et une volonté de contribuer à la politique de rationalisation des dépenses. Il faut rappeler dans ce contexte que la solidarité ne se fait pas avec l'argent du contribuable, c'est plutôt la politique de solidarité qui se fait avec ces fonds. Quel est votre programme pour ce ramadan ? Notre stratégie visant la création d'un espace crédible pour le renforcement de l'aide et l'espace solidaire a déjà porté ses fruits, puisque c'est la troisième opération ramadan que nous organison sans la contribution des pouvoirs publics. Etant des auxiliaires des pouvoirs publics, j'estime qu'il est indécent de recourir à l'argent du contribuable pour aider les familles démunies. D'autant que nous sommes en période de crise où la rationalisation des dépenses publiques est recommandée. Il y a de plus en plus de donateurs, ce qui nous permis la prise en charge de 10.000 familles sur le territoire national. En attendant une démarche nationale pour l'élaboration du fichier national des démunis, le CRA a pris l'initiative d'établir des listes des familles nécessiteuses au niveau des villages, en s'appuyant sur la contribution de l'imam, du cheïkh de la zaouia, des notables, des associations locales qui se réunissent avec le CRA pour ce faire. La priorité a été accordée aux 47 communes classées par le ministère de l'Intérieur comme étant les plus pauvres. Nous donnons aussi de l'importance aux villages touchés par le terrorisme où les populations reprennent la vie progressivement. J'insiste pour que les dons se fassent du donateur aux nécessiteux directement. La mission du CRA se limite à orienter, à donner les listes et établir les contacts pour l'acheminement des aides. Cela mettra les donateurs en confiance. Jusqu'à maintenant, nous avons servi 7.000 couffins en plus des initiatives locales menées au niveau des wilayas par le CRA comme à El Oued où un radiothon a permis de faire bénéficier des familles de 5.000 DA et des dons pour 350 familles. Vous avez critiqué les restaurants du cœur. Quelle est votre vision ? Je suis contre l'anarchie et la débandade qui règnent dans ces espaces qu'il fautv absolument organiser. En ces temps de crise, j'ai envoyé une note écrite à tous les comités de wilaya pour rationaliser les dons. Ces restaurants sont ouverts aux sans-abris, aux travailleurs de chantiers qui vivent loin de leurs familles, aux migrants L'autre habitude que je condamne, c'est la distribution de repas chauds aux familles. J'estime que c'est une atteinte à la dignité de ces dernières. La solidarité ce n'est pas de la charité. La solidarité, c'est le respect de la dignité humaine. J'ai interdit cela, car je veux que toutes ces familles bénéficient de denrées alimentaires pour préparer, dignement, leurs repas à la maison et pouvoir ainsi jouir du plaisir et de la joie de cuisiner un repas, créer cette ambiance et cette chaleur familiales. Il est intolérable de priver une famille de ce plaisir de cuisiner sous prétexte qu'elle est pauvre ou qu'elle est à la merci des associations. Qu'en est-il de la question des réfugiés ? Ils sont toujours là et nous n'allons pas les abandonner. C'est pour cela que j'insiste sur l'ouverture de restaurants pour les accueillir. Ils refusent d'intégrer les centres qui leur sont réservés. Nous avons rapatrié plus de 12.000 ressortissants nigériens, sur demande de leur gouvernement, et les opérations se sont déroulées dans de bonnes conditions. Ce qu'il faut dire, c'est que la politique humanitaire de l'Algérie est un exemple à suivre. Lors de la célébration de la journée internationale des Croix-rouges et Croissant-rouges, Alger a été déclarée capitale de la communauté humanitaire, et le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a été nommé Cavalier de l'humanitaire. C'est un message très fort et constitue une fierté pour le CRA. Ces réfugiés sont considérés comme des êtres humains et non des dossiers, des nationalités ou des numéros. Il y a une couverture sanitaire extraordinaire, notamment à Tamanrasset, où pour les pathologies qui ne peuvent être traitées sur place, les malades sont transférés par avion vers les hôpitaux d'Alger. Les coûts de certains soins sont très élevés et les médicaments de lutte contre le sida sont distribués gratuitement. Certains malades viennent du Mali et du Niger pour se soigner, des femmes viennent pour accoucher. Ils bénéficient de haises roulantes, de l'hémodialyse, et des analyses médicales gratuitement. On n'a pas pu procéder à la scolarisation des familles des Subsahariens en raison de la mobilité de leurs familles. Les enfants des réfugiés syriens sont scolarisés et le seul document exigé pour leur inscription est la déclaration sur l'honneur du tuteur du niveau de la scolarité de l'enfant. Nous les prenons en charge en matière de fournitures scolaires et autres. Les réfugiés bénéficient d'un traitement à la hauteur. Ils célèbrent leurs fêtes religieuses et autres évènements de leur culture et ce, quelle que soit leur religion. Le seul appel que je lance, c'est que tant que ces espaces humanitaires ne deviennent pas des forces de pression au niveau des Nations unies et des grandes puissances, les poussant à y réfléchir à deux fois sur les conséquences de leur décision politique sur la situation humanitaire, on ne vivra pas ce drame qu'on n'a pas vécu depuis la Seconde Guerre mondiale.