Un régal pour les amateurs d'aventures, de pêche ou tout simplement de calme. Sur ce long littoral qui s'étend de Damous, à l'est, jusqu'à Dechmia, à l'ouest, où se mêlent eau limpide, montagnes somptueuses et forêts de chêne et de pins, la beauté et la tranquillité des lieux sont saisissantes. Mais ne cherchez pas d'hôtels ou d'auberges, il n'en existe pas. Cette wilaya à forte vocation touristique et dont les paysages n'ont rien à envier à ceux de la corniche jijelienne reste à la traîne en matière de structures d'hébergement. La côte chélifienne reste le territoire des initiés. En dehors des gens qui habitent le littoral chélifien, seuls les habitants du sud de la wilaya ou les initiés des wilayas limitrophes (Aïn Defla, Blida et Alger) s'y aventurent. Pour s'y rendre, deux principaux axes routiers : la RN11, reliant Cherchell à Ténès, en passant par Béni Haoua, Boucheghal, Damous sur une centaine de kilomètres qui a connu des travaux d'élargissement. Dommage que les responsables des travaux publics tardent à relier cette route nationale à l'autoroute Cherchell-Dar El-Beïda et éviter aux automobilistes de subir des heures d'embouteillage aux entrées de Cherchell. Sinon, il y a la RN19, reliant la ville de Chlef à Ténès, en passant par Chettia, Ouled Farès et Bouzeghaïa, sur 50 km, en bon état. Notre voyage commence à partir de la ville de Chlef. Il fait 35 degrés à l'ombre, avec les embouteillages comme bonus. Direction la RN19, en passant par Chettia. La circulation est beaucoup plus fluide que durant les week-ends où la majorité des fonctionnaires se ruent sur le littoral. Le bruit assourdissant des « tertara », ces vieilles motos aux tuyaux d'échappement modifiés, sont le moyen privilégié des jeunes de la région. Des camions-citernes sont stationnés le long du trajet où les personnes croisées sont soit en train de remplir des jerricans d'eau, soit en train de se cacher dans les rares coins d'ombre. Ce n'est qu'en arrivant à Sidi Akacha que le décor commence à changer et que l'on aperçoit les articles de plage proposés à la vente et une brise marine qui nous parvient de loin. Les virages du massif boisé annoncent la couleur et les gorges qui nous séparent de l'entrée de la ville ressemblent à celles de la Chiffa. A la seule différence que l'oued ici est transformé en égout à ciel ouvert et qui se déverse dans la mer. La circulation routière devient infernale, notamment à côté de la station de bus et du marché. Mais à mesure que l'on se rapproche du littoral, les choses s'améliorent. Il suffit de descendre du véhicule, de discuter avec les gens de Ténès pour oublier tout ce qui ne va pas. Ici, le sens de l'accueil, la bonhomie sont légendaires. Que ce soit sur les terrasses des cafés ou dans les restaurants, les gens sont d'une gentillesse, d'une politesse et d'une disponibilité qui vous feront haïr les grandes villes. Le front de mer a subi un grand lifting avec l'aménagement des allées et surtout la disposition des restaurants tout le long de cette portion du littoral. Seul bémol : des « parkingueurs » se pointent tout le long du front de mer, de même que les loueurs de parasols au niveau des petites parcelles de plages de Ténès-Ville. À la sortie du port de Ténès, un projet immobilier est presque achevé. De très jolis immeubles, pieds dans l'eau. Mais qui a eu cette ingénieuse idée de bâtir un ensemble immobilier face à la plage ? Cet endroit est censé abriter des hôtels, des bungalows, des complexes de loisirs, mais sûrement pas des immeubles, aussi beaux soient-ils. En l'absence d'hôtels, les vacanciers se rabattent sur la location d'appartements. Ces derniers sont cédés entre 40.000 et 60.000 DA la quinzaine. Mais il faudrait s'y prendre au moins trois mois à l'avance. Sinon, les rabatteurs sont là pour vous proposer des appartements, à des prix plus ou moins abordables, mais loin, parfois très loin de la plage. Le littoral, ce ne sont pas seulement les plages De Ténès, l'on peut gagner les belles plages de l'Ouest, notamment Sidi Abderrahmane et El-Marsa, comme on peut rejoindre celles qui se trouvent à l'Est. Mais le littoral, ce ne sont pas seulement les plages. La région dispose de plusieurs belles forêts, à l'image de Bissa, Oued Romane, El-Guelta, capables de devenir un lieu de villégiature. La région recèle également des vestiges phéniciens et romains, des phares aux mille et une histoires, la mosquée de Sidi Maïza qui date du Xe siècle et le mausolée érigé à la mémoire de Mama Binet, à Béni Haoua. Nous prendrons le chemin de la côte est chélifienne, en direction de Béni Haoua. Des virages et des montagnes boisées sur des dizaines de kilomètres et pas l'ombre d'un café, d'un restaurant ou d'une plaque indiquant une plage. Puis, au milieu de ces paysages féeriques, trois voitures sont à l'arrêt sur le bas-côté. Enfin un café ! En plein milieu de la forêt. Mais pas la peine de demander de l'eau ou des jus frais. Le petit frigo est vide ! Nous demandons au propriétaire de nous indiquer la plage la plus proche. Il nous dit : « A 20 m, prenez la première piste à droite. » Sur place, un petit fil barbelé, deux torchons accrochés, puis un jeune tenant une corde, en guise de barrière d'entrée. On nous exige 100 DA de droit d'accès et pas de ticket ! Au milieu de la forêt qui descend vers la mer, il faut se débrouiller une place de stationnement entre arbres et tentes érigées un peu partout. C'est un camping sauvage. Pour descendre à la plage, il faudrait user du système D. Des pistes aménagées à la hâte par les campeurs où le moindre faux pas pourrait être fatal. Une fois en bas, une plage de galets, dont la propreté est irréprochable, offre un cadre de rêve. Mais pas de poste de la Protection civile. Ici, c'est Draghnia. Peu de gens la connaissent. Le préposé à l'entrée nous propose une place de camping à 1.000 DA la nuit, avec branchement électrique sauvage garanti. Le prix reste négociable. Il peut être réduit de moitié, si le campeur ramène sa tente. Quelques familles s'en donnent à cœur joie, tandis que les campeurs s'attellent à s'installer un peu partout dans la forêt qui surplombe la plage. Une cinquantaine de mètres plus loin, un autre camping, celui-là légal et bien clôturé, ne semble pas attirer beaucoup de familles. C'est que le camping se trouve très éloigné des centres urbains et que les commodités les plus élémentaires n'y sont pas réunies. Ce n'est qu'en arrivant à l'entrée de Béni-Haoua que l'on retrouve quelques structures d'accueil : un camping familial par-ci, un complexe de bungalows flambant neuf par-là et une plage de sable très vaste pouvant recevoir tout ce monde qui la préfère. Parmi ce monde, beaucoup de Blidéens et d'Algérois, mais aussi les téméraires d'Aïn Defla qui restent fidèles à cette plage, malgré le fait que l'effet autoroute Est-Ouest ait porté la majorité vers les plages de Tipasa, particulièrement Zéralda.Plus à l'Est, Damous et Larhat gardent intacte leur réputation et leurs fidèles vacanciers. En dépit d'une urbanisation rapide et anarchique, ces deux haltes restent parmi les plus belles de la côte chélifienne. Devant offrir 2.700 lits, mais pour le moment, c'est le règne de la débrouillardise. Autre grief : l'absence de plaques de signalisation des plages ainsi que les activités culturelles ou sportives durant la saison estivale, de jour comme de nuit. « Les estivants viennent nager et dormir. Même à Ténès-Ville, le théâtre reste fermé pendant tout l'été. Tout est mort ici », se plaint un connaisseur des lieux. De Ténès à Damous, en passant par Boucheghal et Béni-Haoua, les plages restent étrangement vides, en cette mi-juillet, malgré la canicule. Hormis les initiés, qui connaissent les pistes et autres criques inaccessibles au grand public, ou encore les amateurs de la grande évasion qui viennent solidement équipés (zodiacs, articles de pêche et de plongée sous-marine et même groupes électrogènes), rares sont les vacanciers qui s'aventurent dans cette vaste bande côtière.