“Nous assistons à des batailles et à des meurtres que nous n'avions pas vus en Irak”. Au 19e jour, la Libye s'enlise dans un état de guerre permanent. La partition est désormais consommée entre Benghazi aux mains du conseil de transition, présidé par l'ancien ministre de la Justice, et Tripoli multipliant les offensives militaires pour contenir l'avancée des insurgés, à l'Est, et assurer la reprise des villes sanctuaires de l'Ouest contrôlées par l'opposition. C'est le cas de Zawiyah, la ville la plus proche de la capitale, résistant dès le lancement de l'insurrection au siège des pro-Khadafi et néanmoins livrée à la puissance de feu des chars et des blindés en incursion incessante. « Avec toute cette artillerie, nous assistons à des batailles et à des meurtres que nous n'avions pas vus en Irak. Je considère qu'il s'agit d'un véritable génocide », a déclaré un témoin à la chaîne El Arabia. Au Nord-Ouest, la situation reste confuse à Ras Lanouf, abritant le terminal pétrolier donnant sur le Golfe de Syrte, où les deux belligérants se réclament de la maîtrise de la situation à l'issue de combats soutenus, alors que Benghazi a connu, vendredi, une explosion d'un dépôt de munition. Affaibli par la désertion en masse de personnalités influentes et de diplomates de divers horizons, isolé et perdant de son autorité, le régime contesté de Kadhafi, criant à la manipulation de la main étrangère (El Qaïda et les Etats-Unis en l'occurrence), se légitime du recours à la force jugé « minimal ». Dans une lettre adressée, vendredi, au conseil de sécurité, il a réclamé la suspension des sanctions prises contre le guide et son entourage « jusqu'à ce que la vérité soit établie» et se déclare favorable à la médiation de paix vénézuélienne. Dans cette bataille de légitimité, le conseil de transition ne veut pas céder du terrain. Il a, sous la présidence du ministre de la Justice démissionnaire, Mustapha Abdeljalil, tenu sa première réunion dans une discrétion totale. Assistera-t-on à l'accélération des événements ? Jusque-là opposé à toute intervention militaire, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a annoncé qu'il travaille, de concert avec les Britanniques et en concertation avec la ligue arabe, pour obtenir une résolution du conseil de sécurité autorisant la création d'une zone d'exclusion aérienne revendiquée de longue date par Washington positionnée au large des côtes libyennes. Serait-ce le début de la fin du régime de Kadhafi ?