Le rejet par l'opposition des mesures annoncées, en grande pompe, par le président Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, n'a pas été du goût du «maître» du Yémen. Hier, à l'aube, la police a lancé un assaut contre les manifestants qui campent depuis le 21 février sur la place de l'Université à Sanaa, usant de balles réelles et de grenades lacrymogènes. Bilan : un manifestant tué et près de 300 blessés ou intoxiqués par les gaz, d'après le comité médical formé par les contestataires. Le même jour à Moukalla, dans le sud-est du pays, un écolier qui participait à une manifestation contre le régime a été tué par des tirs de la police. Dans la matinée, un troisième manifestant a été tué alors qu'il tentait de se joindre avec d'autres à un sit-in à l'université de Sanaa. Le déchaînement de la répression contre les manifestants a débuté dans la nuit de mardi à mercredi, lorsque les forces de sécurité avaient attaqué le campement pour la même raison, en causant la mort d'un étudiant. Vendredi, quatorze personnes ont été blessées lorsque les forces de sécurité avaient tenté de disperser des manifestants réclamant le départ du président. Sur le plan politique, la tension entre le chef de l'Etat et l'opposition parlementaire, fortement soutenue par la rue, est montée d'un cran ces derniers jours. Le président mise gros sur les «profondes réformes» - historiques selon ses partisans, dépassés aux yeux de l'opposition- qu'il entend engager, et dont les plus importantes concernent l'abandon de ses pouvoirs exécutifs avant la fin de l'année, et l'organisation d'un référendum sur une nouvelle constitution consacrant un régime parlementaire. Des mesures qui ont été aussitôt saluées par l'administration américaine. Le conseiller du président Obama pour la lutte antiterroriste a félicité en personne M. Saleh, non sans exhorter l'opposition à accepter ce plan. A son tour, la chef de la diplomatie de l'Union européenne, Catherine Ashton, a salué les propositions tout en plaidant «pour un dialogue ouvert et constructif». A propos de la répression policière qui s'est intensifiée ces derniers jours, Mme Ashton s'est dite «préoccupée» : « Les autorités doivent protéger les manifestants pacifiques et leur droit de se réunir librement», a-t-elle martelé. Le Haut commissariat de l'ONU aux droits de l'homme avait demandé vendredi au gouvernement de Saleh d'enquêter sur des informations faisant état de militants tués durant des manifestations.